dimanche 26 octobre 2014

La voiture connectée passe à la vitesse supérieure

La voiture connectée apparaît comme le nouvel Eldorado pour les constructeurs automobiles et les fabricants de puces électroniques. Mais force est de constater qu’il est difficile de s’y retrouver tant les initiatives en la matière sont nombreuses et souvent très différentes les unes des autres. Voici de quoi remettre les choses au clair.

Qu’est qu’un véhicule connecté ?


Si la Google Car, ce véhicule à pilotage automatique, occupe le terrain médiatique, la réalité du marché de l’automobile est toute autre en matière de véhicule connecté.



Quel type de connexion doit embarquer une voiture pour être qualifiée de connectée ?

Avec l’incroyable essor des smartphones, les constructeurs se sont rendu compte que l’utilisateur voudrait continuer à utiliser certains des services de son terminal mobile une fois au volant (ou bien en tant que passager) d’une voiture. Des systèmes connectés en Bluetooth à votre smartphone prennent ainsi le relais. On retrouve finalement le même schéma qu’avec les smartwatches ou autres bracelets qualifiés de connectés, mais qui le sont finalement uniquement au smartphone. Pour ceux-ci, pas de connexion (à part quelques modèles exotiques) directe à Internet (pour des raisons d’autonomie notamment, la batterie étant trop petite) et de coût (des composants, dont le modem RF et de carte SIM supplémentaire pour l’utilisateur).

Une voiture est donc connectée lorsqu’elle se distingue par la présence d’un hub. D’une part, celui-ci collecte des informations en provenance du véhicule et les présente au conducteur. D’autre part, il assure une connectivité via le Bluetooth au smartphone.

Depuis peu, certains véhicules peuvent aussi se connecter directement à internet. C’est le cas de l’Audi A3 Sedan (modèle 2015) qui dispose de sa propre connectivité au réseau cellulaire 4G LTE.



Le GNS associé à la constellation GPS est également une manière de dire que le véhicule est connecté. Il reçoit des informations en provenance de la constellation de satellites du système GPS. Et quid des autres types de connectivités (radar par exemple) qui permettent au véhicule de collecter des informations ?

Pour conclure, on peut dire qu’un véhicule est connecté lorsqu’il intègre des systèmes de connectivité sans fil lui permettant de collecter des informations qu’il pourra ensuite exploiter : de la musique stockée sur votre smartphone via le Bluetooth, un film stocké dans le Cloud grâce à la 4G LTE, des informations de distance avec une connectivité radar, des données de géolocalisation avec les systèmes GNS…

Le domaine est donc vaste et embrasse une multitude de possibilités : de l’infodivertissement à la sécurité en passant par la géolocalisation…

Les différentes approches


Récemment, Nokia annonçait avoir investi 100 millions de dollars pour développer la voiture connectée. Pour l’heure, le constructeur finlandais articule son système autour de la géolocalisation avec Here bâti sur la technologie de Navteq racheté en 2008. Here est exploité par Amazon, Yahoo, Microsoft et plusieurs systèmes d’assistance à la conduite.

Actuellement, des plates-formes d’ordinateur de bord sont proposées par Apple, Google, Microsoft etBlackBerry. Les constructeurs choisissent souvent l’un de ces systèmes et le personnalisent.



Carplay d’Apple a ainsi séduit Volvo, Mercedes et Ferrari. Ils devraient être rejoints par une myriade d’autres constructeurs : PSA, Kia, Honda, BMW, Ford, General Motors, Hyundia, Jaguar, Nissan, Toyota… Carplay est une version adaptée d’iOS permettant notamment d’installer certaines applications sélectionnées.

Toyota a mis au point Touch & Go (qui vient avec des applications) dès 2011.

PSA a développé Connect Apps qui se présente sous la forme d’un écran tactile surplombant la console centrale (sur les 208 et 2008).

Opel a opté pour IntelliLink qui consiste en un simple relais permettant de commander votre smartphone.

En partenariat avec TomTom, Renault a développé son système baptisé R-Link qui dispose de sa propre boutique d’applications, le R-Link Store.

Dans tous les cas, il s’agit de systèmes évolués d’infodivertissement.

En septembre 2013, R-Link de Renault a été jugé comme meilleur système embarqué par le cabinet de conseil SBD. Il devançait trois systèmes embarqués dans des véhicules de marques allemandes : le Connect D’Audi, le Comand de Mercedes et l’IntelliLink d’Opel.



Autre démarche, celle de la startup française Eliocity qui propose le boîtier Xee. Connecté à la prise diagnostic (OBD) de quasiment n’importe quel véhicule (voir sur le site de la société pour la compatibilité avec un véhicule particulier), il recueille ainsi des informations, mais dispose également de son propre accéléromètre (permettant de détecter les chocs sur la voiture).

Grâce à la technologie Dquid (qui permet de lire les données), toutes ces données sont alors exploitées par un écosystème d’applications développées par Eliocity, tantôt pour avertir d’un problème (XeeAlert), tantôt pour gérer son budget auto (XeeBudget). Elles sont actuellement au nombre de 5 (XeeCar , XeeAlert, XeeEcodrive, XeeBudget et MyXee).

La sécurité est ainsi au coeur du projet avec possibilité d’envoyer un message en cas de difficulté sur la route (panne ou accident par exemple). D’une certaine manière, Xee devance ainsi l’eCall qui a été retardé à 2017. Les États membres de l’Union européenne ont effet jusqu’au 1er octobre 2017 (et non plus 2015) pour déployer eCall, le système de réception et de traitement des appels gratuits qui a pour objectif de réduire les délais d’intervention des secours.

De surcroît, l’écosystème Xee sera amené à se développer dans le futur avec plus d’applications. Eliocity invite en effet les développeurs à s’inscrire sur son site afin d’être informés dès que le SDK du boîtier sera disponible. Les scénarios et les usages relatifs à ce petit boîtier se multiplieront alors assurément.

La connexion entre le boîtier Xee et le terminal mobile (iOS ou Android) se fait via le Bluetooth et une connexion cellulaire en 2G (dont l’utilisateur n’a pas à se soucier) permet également de recevoir des alertes afin d’avoir des informations (géolocalisation, vitesse…) à distance sur son véhicule.

En « faisant parler votre véhicule », Eliocity se propose ainsi de transformer n’importe quel véhicule en voiture connectée pour la somme de 149.90 euros (prix du boîtier).

Dans les grandes lignes, ces systèmes proposent plusieurs aspects :
-le multimédia
-la téléphonie
-l’aide à la navigation
-une partie directement liée au véhicule (consommation de carburant, gestion d’équipements tels que des caméras de recul)
-des services divers (météo, affichages de photos…)

Une histoire de capteurs


Comme sur les smartphones, les capteurs sont très nombreux dans les voitures.

L’un des capteurs les plus connus sur les véhicules est associé à l’assistance pour le recul (afin de ne pas heurter d’obstacles). Le principe est celui du radar fonctionnant ici avec les ondes ultrasons. Fixés sur le pare-chocs arrière, les capteurs transmettent des impulsions ultrasoniques. Parfois doublé d’une caméra, ce type de capteur apporte une information importante aux conducteurs.

Mais les capteurs se trouvent également directement sous le capot. On parle ainsi de capteur PMH (point mort haut) qui informe un module électronique en charge de la gestion du dosage air/essence.

Des capteurs sont aussi associés au déclenchement des airbags.

Le capteur de pluie (au sommet du pare-brise) permet sur certains véhicules de déclencher automatiquement les essuie-glaces et même d’adapter la vitesse de balayage en fonction de l’intensité de la pluie. De la même manière, des capteurs de luminosité sont capables de déclencher les feux d’un véhicule.



Autant d’informations qui peuvent être exploités par un hub pour centraliser de multiples données et pour informer le conducteur qu’il faudra par exemple bientôt changer les essuies-glaces (en fonction du nombre d’heures d’utilisation…). La plupart des véhicules sont également en mesure de vous informer de la consommation de carburant.

Ces informations ont subrepticement fait leur apparition dans les véhicules depuis plusieurs années grâce à l’électronique embarquée et aux nombreux capteurs.

La sécurité au centre des pré-occupations


La notion de sécurité est au coeur des préoccupations des constructeurs, mais aussi des services publics et des acheteurs. L’adoption de certains systèmes soulève toutefois de nombreuses interrogations. Peut-on entièrement faire confiance à l’électronique ? Le véhicule connecté à internet n’est-il pas finalement exposé à des risques informatiques (virus, trojan…).Autant de questions qui pourraient retarder l’arrivée d’une aide à la conduite ou bien de la conduite sans conducteur. Mais qu’en est-il réellement ?

Il faut dire que les esprits ont été durablement marqués à plusieurs reprises depuis 2004.

En juillet 2006, un tragique fait divers ayant entrainé la mort d’une employée des autoroutes fauchée par un 4×4 Toyota aurait été causé par le régulateur de vitesse. Mais avant même cela, un homme expliquait avoir été obligé de rouler plusieurs dizaines de minutes à près de 200 km/h. À nouveau, le régulateur de vitesse (celui d’une Renault Vel Satis dans ce cas) était mis en cause.

Il a toujours été difficile de confirmer que le régulateur de vitesse était bien à l’origine de ces problèmes. Par définition, il s’agit d’un dysfonctionnement hautement aléatoire et donc impossible à reproduire.



La notion même de hasard effraie, mais ne peut être intégralement écartée des puces électroniques. Les fabricants s’imposent bien des normes drastiques pour concevoir leurs puces (fonctionnement de -40’C à 125’C…). Ces précautions sont associées aux rendements, mais aussi à la probabilité qu’une caractéristique électrique sorte des spécifications. Pour vous donner un ordre d’idée, des précautions à 6 sigmas (6 fois la déviation standard pour un paramètre variant de manière gaussienne) correspondent à 3.4 erreurs par million. Ces erreurs n’entrainent toutefois pas forcément un dysfonctionnement de la puce et des systèmes redondants permettent encore de réduire les problèmes potentiels.

Malgré cela, le risque de dysfonctionnement ne peut (et ne pourra jamais) être entièrement écarté.

Ceci étant dit, il faut aussi corréler ce « nouveau » risque avec le nombre de tués par an qui a été de 3250 personnes en 2013 sur les routes françaises.

La question est donc de savoir si la sécurité introduite avec les véhicules connectés peut diminuer ce chiffre.

Les constructeurs y croient dur comme fer et mise beaucoup sur la technologie radar pour assister le conducteur dans la conduite. Les systèmes radars embarqués dans les véhicules sont destinés à assister les conducteurs afin de prévenir les accidents. Baptisés ADAS (pour Advanced Driver Assistance Systems), ils devraient se démocratiser très rapidement dans les véhicules. Un émetteur récepteur fonctionnant autour d’une porteuse à 77 GHz est couplé à un système de freinage d’urgence et au régulateur de vitesse. Si de tels systèmes équipent actuellement des véhicules haut de gamme, ils devraient devenir obligatoires d’ici quelques années. Ainsi, aux États-Unis, l’administration en charge de la sécurité routière (US National Highway Administration) prévoit de modifier son programme de sécurité étalonné sur 5 étoiles. La nouvelle norme devrait voir le jour en 2016. Les constructeurs seront vraisemblablement dans l’obligation d’intégrer des systèmes de sécurité proactifs afin d’anticiper d’éventuels accidents pour les éviter ou minimiser leurs effets.



De manière similaire, l’organisme EuroNCAP (European New Car Assessment Program) a fait évoluer sa grille d’évaluation depuis janvier 2014. La note étoilée intègre ainsi l’évaluation du freinage d’urgence autonome (AEB) pour les véhicules vendus en Europe. L’organisme basé à Bruxelles estime que l’AEB devrait réduire de 27% les accidents de la route.

Si ces systèmes de freinage d’urgence associés à des radars permettent d’anticiper les collisions, d’autres systèmes ont également pour vacation de réduire les accidents de la route.

Sur autoroute, 30% des accidents mortels sont associés à l’endormissement. Des trajectoires sinueuses déclenchent une alarme qui alerte le conducteur de son endormissement. Ces systèmes sont déjà embarqués dans certains véhicules depuis plusieurs années. Des caméras analysant de manière continue le visage du conducteur à la recherche de clignements de paupières fréquents sont aussi à l’étude. La détection des piétons est également associée à la sécurité routière : détecter un piéton en mouvement, estimer le risque d’impact et déclencher le freinage d’urgence si nécessaire.

La voiture sans conducteur


La voiture sans conducteur est le fantasme absolu. L’ordinateur embarqué dans le véhicule utilisera des données en provenance de radars, de caméras, de lasers pour analyser l’environnement en temps réel.

Dans les grandes lignes, les voitures auto-pilotées calquent leur fonctionnement sur la conduite humaine : analyser l’environnement afin d’agir de manière appropriée. Mais, l’électronique embarquée ne connaît ni somnolence et est capable d’analyser beaucoup plus d’informations qu’un être humain.



Les prémices de la voiture auto-pilotée sont arrivées avec les modèles intégrant des systèmes leur permettant de se garer sans intervention humaine.

Des microcontrôleurs sont aussi capables de gérer l’accélération, le freinage et le changement de direction. Cela est rendu possible parce que l’électronique est profondément ancrée dans les systèmes de contrôle de la voiture. Les volants ne tournent pas directement les roues, les pédales de frein ne poussent plus directement des fluides hydrauliques et les pédales d’accélérateur ne tirent plus directement des câbles. Au lieu de cela, des microcontrôleurs interprètent les actions du conducteur et prennent les mesures appropriées. Tout ceci est déjà une réalité dans les véhicules d’aujourd’hui et laisse la porte ouverte pour compléter le jugement humain, voire déléguer certains aspects à l’électronique. À cet effet, il faut toujours plus de capteurs.

Les industriels sur les rangs sont nombreux. Parmi ceux-ci, il y a l’équipementier Bosch dont le système s’appuie sur des capteurs radar lasers LIDAR (« light detection and ranging ») qui génèrent en continu une vue 3D à 360 degrés de l’environnement du véhicule.



Les voitures sans conducteur de Google utilisent également le LIDAR ainsi que des radars, la géolocalisation par GPS, des caméras et des capteurs sur les roues motrices. Certaines Google Car ont déjà parcouru plus de 800 000 kilomètres sans incidents ou accidents. Mais des problèmes législatifs relatifs à la conduite sans conducteur se posent dans de nombres États américains (le Nevada, le Michigan et la Californie sont parmi ceux qui l’autorisent).

De nombreux constructeurs automobiles sont également à pied d’oeuvre pour concevoir leur propre vision de la voiture autonome. C’est le cas de Renault qui a présenté la Next Two en janvier 2014. Il s’agit en fait d’une Renault Zoé embarquant des capteurs et des logiciels. Le système permet de déléguer en certaines occasions la conduite, dans les embouteillages par exemple (vitesse n’excédant pas 30 km/h). Elle permet également de se garer seule et de venir chercher de manière autonome le conducteur devant son domicile ou bien au pied de son bureau (le conducteur active cette fonctionnalité via son smartphone).

Infrastructure pour la voiture connectée


Qui dit voitures connectées, dit également routes connectées. Les deux vont de pair et les pays développés sont d’ores et déjà à pied d’oeuvre pour équiper les routes de la sorte.

En France, il s’agira de bornes placées tout le long des routes afin d’établir une connexion (en Wifi) avec des voitures. Frédéric Cuvillier, le ministre des Transports, a annoncé « plus de 3 000 véhicules communicants sur 2 000 kilomètres de routes connectées » en 2016. Il s’agira de véhicules prêtés par l’État à des particuliers volontaires et à des professionnels de la route.



Pour le ministre, il s’agit d’un véritable laboratoire, un préalable avant la généralisation qui serait alors envisagée en 2017 si l’essai s’avère concluant.

Qui dit voiture connectée, dit accès à un réseau pour recevoir et transmettre des informations. Le réseau cellulaire n’est actuellement pas en mesure d’assurer continuellement un accès à internet sur l’ensemble du réseau routier.

Cet accès doit être continu et fiable, faute de quoi le véhicule n’est connecté qu’une partie du temps. Le défi s’annonce de taille étant donné la taille des réseaux routiers.

Conclusion


La voiture connectée est un énorme chantier faisant appel à de multiples technologies. C’est cette foison d’initiatives qui devrait lui donner son élan. Mais pour qu’elle se démocratise et séduise le public, il faudra que les constructeurs harmonisent leurs efforts. Plusieurs alliances devraient faciliter la mutualisation des efforts et l’harmonisation. C’est le cas de l’Alliance Genivi qui consiste en une architecture logicielle visant à standardiser l’intégration des appareils électroniques à bord des véhicules. Il y a aussi MirrorLink du Car Connectivity Consortium qui permet à l’équipement de la voiture de prendre le contrôle de la voiture. Quant à la voiture autonome, il faudra dissiper les craintes des automobilistes et montrer tout le potentiel avec des solutions intermédiaires associées au radar et au freinage d’urgence autonome. in Le Journal du Geek

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