Le Premier ministre élude les problèmes que pourrait engendrer la hausse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et préfère concentrer son discours sur les «produits subventionnés» qui ne seront pas touchés par l’augmentation des prix. Assurances, tentative de dire des vérités et des données chiffrées : Abdelmalek Sellal s’est essayé, mercredi soir à la Télévision publique, à un délicat exercice de franchise sur la situation économique et sociale du pays. Le Premier ministre, qui a visiblement fait d’énormes efforts pour améliorer ses performances discursives, a employé un langage populaire pour dresser un tableau idyllique d’un pays qui prend peur à l’approche de la nouvelle année. Alors que le bateau Algérie prend l’eau de toutes parts, notamment sur le plan économique, le Premier ministre tente de rassurer. Il élude les problèmes que pourrait engendrer la hausse de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et préfère concentrer son discours sur les «produits subventionnés» qui ne seront pas touchés par les augmentations. Ni le sucre, ni l’huile et encore moins le pain et le lait ne changeront de prix. «Nous maîtrisons la situation», explique M. Sellal qui n’a par contre pas pu indiquer de quelle manière son gouvernement tentera de «gérer les spéculateurs» qui ont déjà fait flamber les prix des fruits importés. A la place de cela, il a préféré devenir conseiller en consommation. «Il faut apprendre à consommer les produits de saison. En hiver, par exemple, il faut manger les oranges» qui, à ses yeux, sont vendues à des prix abordables. Malgré quelques maladresses, Abdelmalek Sellal a joué sur les chiffres. Il a même tenté d’être précis : les recettes des ventes des hydrocarbures sont à peine de 27,5 milliards de dollars à la fin de l’année en cours, les réserves de change sont à 114 milliards de dollars, tandis que les importations ont chuté de 60 à 48 milliards de dollars durant l’année qui s’achève et le gouvernement compte encore abaisser le montant des importations à moins de 45 milliards de dollars en 2017. Par contre, les recettes de la vente des hydrocarbures devront augmenter à 35 milliards de dollars durant l’année prochaine, pour atteindre 45 milliards en 2018. Ces recettes ne seront pas le fruit d’une hausse des cours du brent mais plutôt de la hausse de la production nationale, un objectif pour lequel Sonatrach a déjà dégagé plus de 9 milliards de dollars sur 4 ans. Plus d’argent pour la paix sociale Malgré le maintien de «la politique sociale» de son gouvernement, Abdelmalek Sellal a été obligé de lâcher une évidence : l’Etat ne pourra plus augmenter les salaires des fonctionnaires. «Nous avons même demandé à certaines entreprises publiques de baisser les salaires de leurs employés», révèle le Premier ministre qui n’a pas cité d’exemple précis. Pour calmer les esprits, l’invité de la Télévision publique, qui n’a pratiquement fait aucune déclaration politique en dehors des assurances quant à la cohésion du gouvernement, s’est limité à des projections qui peuvent paraître fantaisistes. Il a déclaré que l’Algérie sera «un pays émergent» en 2017. Pour cela, il s’est basé sur «le nouveau modèle de croissance» dont les contours sont flous. Le seul aspect qui émerge de cette politique est la diversification de l’économie. Une notion qui reste pour l’heure au stade de slogan, puisque les exportations hors hydrocarbures demeurent insignifiantes. Et les rares initiatives d’implantation d’industries se limitent à de l’assemblage qui s’appuie, donc, sur des importations massives de pièces de rechange. Devant l’impasse, il ne reste au gouvernement que l’appui sur son principal partenaire économique, à savoir le FCE et son alibi social, l’UGTA. Les trois vont se rencontrer dans une nouvelle tripartite en mars prochain pour «faire le bilan» de la «nouvelle politique économique» du gouvernement. Mais en dehors de cela, il semble qu’aucun ordre du jour n’est disponible dans l’agenda du gouvernement. Pour l’année prochaine, l’Algérie aura «peut-être» recours à l’endettement extérieur, anticipe Abdelmalek Sellal qui explique que ce recours à la dette sera limité aux «projets économiques». Mais le Premier ministre n’a pas relevé qu’il venait de faire là une vraie révélation. Il a même annoncé que c’est un des tabous de l’ère Bouteflika qui est tombé. Dans son passage à la Télévision publique, le Premier ministre a fait un aveu d’échec : le gouvernement a été incapable de convaincre les détenteurs de gros capitaux activant dans l’informel de déposer leur argent dans les circuits bancaires. Il avouera même que «cela n’a pas donné de bons résultats». Pis, «je sais que dans certaines régions, les gens comptent leur argent à la pesée, parce qu’ils n’ont pas le temps de compter», révèle-t-il. Il annonce au passage que devant cette situation, le gouvernement baissera le taux d’intérêt estimé initialement à 7% pour capter plus de capitaux. «On les aura à l’usure», se contente de dire M. Sellal.
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