Qu’il commence aujourd’hui, samedi, ou demain, le mois de Ramadhan est bien là. A la veille de ce mois-événement, les Algériens sombrent dans la folie des achats. Les marchés sont pris d’assaut, de même que toutes les grandes surfaces, voire toutes les ruelles marchandes sur tout le territoire national. Malgré la crise et le pouvoir d’achat érodé, les familles algériennes semblent avoir fait des économies pour affronter les dépenses de ce mois. Les autres, moins bien loties financièrement, jonglent entre leurs envies, culinaires et autres, et les frais de les réaliser. La folie des achats Il est 11h au marché de la place des Martyrs à Alger. L’ambiance est à son summum. Les clients, souvent des femmes accompagnées de jeunes filles et d’enfants, vont d’une boutique à une autre et d’un marchand informel à l’autre en quête de la bonne affaire. Le rush se fait sentir le plus chez les vendeurs de vaisselle, d’épices et de fruits secs. «C’est comme si toutes ces femmes n’avaient pas de vaisselle chez elles ou qu’elles vont tout utiliser de ce qu’elles vont achater, s’exclame Ratiba, une quinquagénaire rencontrée sur les lieux. De pareils achats n’ont absolument rien à voir avec ce mois de piété qui doit initialement nous sensibiliser à la condition des pauvres. C’est du gaspillage pur et simple. Je ne parle pas de celles qui achètent un article ou deux au maximum, mais de celles qui refont la totalité de leur vaisselle.» En effet, les boutiques d’articles de cuisine sont de par toutes les grandes villes bondées de monde. Les achats, quant à eux, se font à tort, à travers et rarement à l’endroit. «Je ne me vois pas commencer le Ramadhan avec les mêmes casseroles, tajines et autres vaisselles, confie Hassina, une jeune trentenaire, maman de 4 enfants. Pour moi, c’est un rituel lié à ce mois sacré auquel mon mari n’ose pas interdire ou même contester. J’en profite au maximum.» Yasmina, quant à elle, une Blidéenne rencontrée à la rue d’Alger, officiellement la rue des Martyrs, acheter de la vaisselle pour le Ramadhan est un bon présage et également une manière de célébrer ce mois de grande consommation. L’achat d’une toile cirée est, pour elle, une obligation sacrée. Le rituel ramadhanesque dans la ville des Roses, comme dans bon nombre de villes dans le pays, exige également une opération de grand nettoyage de la maison et de l’entourage. Les achats ne se limitent pas à la vaisselle, mais également aux épices et aux fruits secs. Au centre commercial Ezzouar, sis dans la commune de Bab Ezzouar, à l’est d’Alger, un espace leur est dédié avec en option l’opportunité de se servir soi-même avant de passer à la pesée, puis à la caisse. En vrac ou en paquet, la facture finit toujours avec un excès de sel. Sans jouer de la métaphore, les prix peuvent facilement atteindre les 4000 DA pour une petite variété de fruits secs et quelques épices. «Personnellement, j’ai fait mon inventaire pour ne pas laisser ma femme acheter tout et n’importe quoi», nous dira Réda avant de rejoindre sa femme au rayon des fruits secs. En effet, dans l’espace Uno, au centre commercial Ezzouar, les prix sont plus ou moins abordables mais restent élevés pour les petites bourses. Le kilo d’abricots secs est affiché à 750 DA, les raisins secs à 550 DA, de pruneaux d’Agen à 699 DA et le frik de blé à 350 DA. Malgré ces prix jugés élevés par la plupart des Algériens, les caddys sortent souvent pleins à craquer des hypermarchés. Que ce soit à Ardis, Uno ou Family Shop, la consistance des caddys est presque la même, avec des factures qui dépassent souvent les 6000 à 7000 DA. La crainte de la pénurie Malgré les différentes déclarations officielles rassurantes quant à la disponibilité des produits alimentaire, notamment ceux de grande consommation, les familles préfèrent faire leurs courses avant de connaître la date exacte du début de ce mois sacré. La crainte de la pénurie et la hausse insensée de la mercuriale sont à l’origine de ce type de comportement. Chez les marchands de fruits et légumes, les prix grimpent selon l’emplacement géographique de la boutique. Un kilo de poivron vendu à Hydra n’a pas le même prix qu’à Bab El Oued. Il l’est encore moins chez les vendeurs informels qui le cèdent à 60 DA contre 120 à 150 DA en boutique. Une raison logique pour l’engouement que connaissent ces vendeurs souvent en camionnettes. Ces derniers affichent souvent les plus bas prix, que ce soit pour les fruits et légumes ou encore les œufs. Le plateau d’œufs acheté dans les grandes surfaces à 350 jusqu’à 450 DA est cédé par ces vendeurs à 250 DA. Pour les viandes, les prix flambent, notamment pour les moyennes et petites bourses. Chez les bouchers, le prix du kilo de viande bovine fraîche oscille entre 1300 jusqu’à 1600 DA. Dans certains quartiers dits «chics», le prix peut atteindre jusqu’à 1800 DA. La viande ovine n’est pas loin de ces prix et va de 1200 à 1700 DA à certains endroits. Avec cette flambée des prix, le marché dit Maqtaâ Khira, dans la wilaya de Tipasa, connaît un engouement sans précédent. «Je suis parti hier, jeudi, en fin de journée à ce marché pour acheter un peu de viande, mais, à ma grande surprise, tous les marchands affichaient un épuisement de stock. Un des bouchers m’a recommandé de faire ma commande une journée à l’avance et de la récupérer le lendemain tôt dans la journée. C’est normal, le prix du kilo de viande ovine y est le moins cher dans toute la région Centre. Il est affiché à 1100 DA», déclare Brahim, retraité. Faire face à d’éventuelles pénuries et une flambée systématique des prix est désormais le souci premier de la majorité des Algériens. Un souci dominant au point où certains ont préféré acheter les vêtements de l’Aïd avant même que le Ramadhan ne commence. A Blida ainsi que dans les quartiers populaires d’Alger, les effets vestimentaires et le slogan annonçant la bonne affaire foisonnent avec l’odeur des épices et les étals de fruits et légumes. Les prix, qui ne sont pas si abordables que ça sont appelés à grimper vers la 2e quinzaine de ce mois.
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