Le gouvernement dispose désormais de peu de cordes à son arc pour mener ses politiques budgétaires. Les arbitrages en la matière seront pour le moins complexes et très délicats. Les économistes les plus avertis ont prévenu que la budgétisation des prochains exercices serait un phénomène complexe à mettre en équation. Face à un tableau de bord qui donne l’alerte : baisse des réserves de change et de l’épargne interne, déficits budgétaires abyssaux, baisse des revenus et des recettes fiscales pétrolières,… le nouvel Exécutif va devoir faire face à des arbitrages tous aussi difficiles les uns que les autres. Ceux d’il y a une année ont donné lieu à une trajectoire austère dans la politique budgétaire du pays. Dans un format similaire à celui de l’année en cours, la loi budgétaire du prochain exercice devrait faire monter d’un cran le degré d’austérité, tant il est vrai que les fondamentaux de l’économie n’ont pas bougé d’un iota. Sur les tendances budgétaires attendues du prochain exercice, le vice-président du Conseil national économique et social (CNES), Mustapha Mekideche, a indiqué hier dans les studios de la radio algérienne que le gouvernement devrait opter pour de nouveaux «arbitrages budgétaires», afin de permettre au pays de disposer des ressources nécessaires à son développement et de mieux contenir les importations. Cependant, la position inconfortable des finances publiques devrait imposer de nouvelles règles du jeu en matière de codification budgétaire. Mustapha Mekideche s’attend à ce que l’Exécutif soit devant nombre de dilemmes : entre la baisse du budget de fonctionnement et celui de l’équipement, le choix est cornélien. Les deux appellent des mesures de rupture qui pourraient aggraver le coût social de la crise. Contacté par El Watan, Mustapha Mekideche rappelle à juste titre que certaines mesures contenues dans la loi de finances 2017 ont été à la source de la situation dans laquelle se débat le secteur du BTPH, voire de l’ajournement de certains projets d’infrastructures. Le vice-président du CNES fait allusion à la coupe de 28% dans le budget d’équipement de l’actuel exercice. C’est désormais au nouveau gouvernement de fixer une nouvelle orientation. Tout porte à croire qu’il n’y aurait pas une révolution en matière d’allocation budgétaire pour l’année prochaine, étant donné qu’un plafond de dépenses a été fixé par la politique budgétaire 2017-2019 qui, faut-il le rappeler, vise un seuil de dépenses globales n’excédant pas les 7000 milliards de dollars. La réforme des subventions, le gros chantier Une révision à la hausse des budgets devrait aussi s’accompagner nécessairement d’une hausse des recettes. Autrement, le déficit se creusera davantage alors qu’il avait atteint en 2015 et 2016 des seuils pour le moins problématiques. Les prévisions d’évolution des revenus et des recettes de la fiscalité pétrolière sur la période 2017-2019 ne font que complexifier davantage l’équation budgétaire. Avec des revenus annuels de 40 milliards de dollars en moyenne sur les trois prochaines années (sur la base d’un baril de pétrole de 55 à 60 dollars) et des recettes de 3000 milliards de dinars en moyenne de la fiscalité pétrolière, le gouvernement ne dispose plus d’aucune marge de manœuvre. Sur d’autres sujets, tel que le financement de l’économie, le gouvernement risque de perdre la main au profit des marchés. Le financement budgétaire a montré ses limites et l’Exécutif doit trouver des sources alternatives de financement. Ce serait l’autre arbitrage auquel est confronté le gouvernement Tebboune, selon Mustapha Mekideche. Il n’y aura assurément pas mille réponses à cette question. Il s’agit à la fois de relancer la mobilisation de l’épargne interne et faire appel au marché de la dette, sous forme de crédits concessionnels auprès des partenaires, tels que le Japon, la Chine et l’Union européenne. La loi de finances 2018 devrait fixer le cap en matière d’endettement. Dans quelques semaines, on en saura un peu plus également sur le projet de réforme des subventions. Certaines mesures de cette refonte pourrait également figurer dans le projet de la loi de finances 2018, à en croire le vice-président du CNES, étant donné que le ministre des Finances semble faire du chemin sur ce dossier. Sur cette question également, un arbitrage politique entre les ampleurs du chômage et de l’inflation devra être fait par le gouvernement. Ne pas baisser les subventions implique plus de chômage ; baisser les subventions implique de l’inflation. Le choix est tout aussi cornélien que les précédents. C’est dire toute la difficulté de l’équation budgétaire à laquelle fait face le gouvernement Tebboune, appelé à rendre une copie un peu plus présentable que son prédécesseur. Le pays entre désormais dans la quatrième année de crise. Alors que Abdelmadjid Tebboune accède à peine à ses fonctions, le tableau de bord financier et économique ne joue nullement en sa faveur. Il fait face au tarissement des ressources, à un marché pétrolier capricieux, à tout un défi de surmonter la crise tout en transformant l’économie de fond en comble.
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