A Boumerdès, plusieurs investisseurs qui ont reçu des notifications pour la réalisation de leurs projets touristiques attendent la suite de la procédure. Le retard constaté nourrit toutes les inquiétudes. La wilaya, elle, rappelle que la démarche a changé depuis la loi de finances complémentaire 2015. Retour sur un dossier qui a provoqué une paranoïa qui n’en est pas une chez les investisseurs du tourisme. Les projets touristiques prévus depuis plusieurs années sur les côtes de la wilaya de Boumerdès tardent à voir le jour, laissant la porte ouverte à toutes les interprétations, parfois des plus incertaines, notamment de la part des investisseurs concernés. Entre 2010 et 2015, plus d’une centaine d’entrepreneurs ont soumis leurs projets d’investissement à la wilaya. Après étude des dossiers, le Calpiref, assemblée composée par le wali et l’ensemble de ses directeurs, leur avait délivré des notifications portant «octroi de terrains pour la réalisation de projets touristiques». Une sorte d’«accord initial» des autorités avant l’achèvement de la procédure en délivrant à ces investisseurs un acte de propriété qui leur permet l’entame des études, la conception du projet et sa réalisation. Dans l’une de ces notifications datant de 2015, dont El Watan Week-end détient une copie, il était demandé à l’investisseur de «se rapprocher des services des Domaines afin de conclure la démarche». Mais depuis, aucune suite n’a été donnée aux concernés. Devant le «refus» du directeur des Domaines de les recevoir, certains porteurs de projet craignent de perdre les terrains acquis dans ce cadre. Ces derniers ignorent donc ce qu’il est advenu de leurs dossiers. Ces notifications seront-elles prises en compte ? Ou alors, les investisseurs devront-ils refaire la procédure ? Ce sont là les questions que posent les bénéficiaires et pour lesquelles ils n’ont toujours pas eu de réponses. Calpiref Les craintes de ces derniers ne sont pas fortuites, car il ne s’agit pas là d’un quelconque projet. De Boudouaou El Bahri à Cap Djinet, en passant par Corso, Boumerdès, les Figuiers (El Kerma) ou encore Zemmouri, soit sur 107 km de côtes, cette région maritime compte à elle seule 11 zones d’extension touristiques (ZET) qui s’étalent, selon la direction du tourisme, sur une superficie de plus de 4700 hectares. Boumerdès, cette ville splendide au potentiel touristique séduisant, avec ses magnifiques paysages et ses plages ensoleillées, fait saliver «même des proches des plus hauts placés de l’Etat», selon certaines sources proches du dossier. Plus de «60 000 lits» sont prévus dans ce grand chantier qui va générer, selon Louerdi Abidi, directeur du tourisme de cette wilaya, rencontré dans son bureau, jusqu’à «120 000 postes d’emploi directs et indirects». Selon les chiffres de la direction du tourisme, 126 investisseurs attendent impatiemment l’approbation finale de la wilaya. Après avoir rencontré les différents responsables, il s’est avéré que lesdites notifications risquent aujourd’hui d’être «remises en cause». «Pourquoi ce blocage ?» s’interroge l’un des investisseurs. Rencontré en marge de la conférence de presse organisée par le ministre des Finances, Hadji Baba Ammi, pour annoncer le lancement en Algérie de l’opération d’enregistrement électronique du foncier, le 20 mars dernier, Noureddine Ben Mohamed, directeur des Domaines de la wilaya de Boumerdès, se défend : «Ce n’est pas un blocage. En vérité, les investisseurs concernés n’ont eu que des notifications et non pas des décisions finales d’attribution de terrains. La loi de finances complémentaire de 2015 est claire. Seul le wali a le pouvoir de délivrer les décisions de concession aux investisseurs. Mais avant, il lui faut d’abord l’approbation du ministère du Tourisme et celui de l’Agence nationale du tourisme, ce que nous appelons le Plan d’aménagement touristique (PAT). Le wali ne peut rien faire sans ce dernier.» Les inquiétudes exprimées par les investisseurs sont donc confirmées. Décret Les deux directeurs, ceux des Domaines et du tourisme, ne l’ont pas ouvertement avoué, mais il était clair dans la déclaration de Louerdi Abidi que les notifications délivrées aux investisseurs «ne constituent aucunement un document officiel attestant qu’un tel investisseur sera bénéficiaire de ces projets». «La procédure a changé avec la loi de finances complémentaire 2015. J’ignore ce que vont devenir les dossiers des investisseurs qui ont reçu des notifications, car seul le wali peut vous répondre à cette question. Tout ce que je sais, c’est que pour parler d’investissement touristique, nous devons d’abord avoir les plans d’aménagement touristiques des 11 ZET existant dans notre wilaya, ce qui n’est pas le cas actuellement. Ce n’est qu’après que le wali décidera, selon les dossiers exposés, quels seront les investisseurs qui pourront en bénéficier ou non», confie le directeur du tourisme. Sur la procédure à suivre dans les différentes étapes d’élaboration du PAT en question, Louerdi Abidi explique : «Selon le décret exécutif 15-78 qui défini les méthodes d’élaboration des plans d’aménagement touristique, le PAT doit passer par plusieurs étapes. D’abord par une enquête publique qui dure 45 jours, puis l’approbation du président de l’Assemblée de wilaya, celui de l’Assemblée communale concernée, avant l’appréciation finale du wali. Ce n’est qu’après que ce dernier pourra envoyer le dossier complet au ministère du Tourisme pour un jugement final avec l’appréciation de l’Agence nationale du tourisme. Donc, le PAT sera délivré par décret ministériel.» Valeur Selon le directeur du tourisme de la wilaya de Boumerdès, sur les 11 ZET, 4 dossiers (4 ZET) sont actuellement au niveau du ministère du Tourisme après l’achèvement de leur étude au niveau de la wilaya. Il s’agit des régions Les Salines, Tagdemt, Zemmouri Est et Boudouaou. Ils n’attendent donc que le décret en question du ministère. La semaine prochaine, deux autres, en l’occurrence celui de Corso et de Sebaou (près de Dellys), seront envoyés par la wilaya au ministère après l’aval du secrétaire général de la wilaya de Boumerdès. Quant à ceux d’El Kerma-Boumerdès, El Kerma-Boumerdès-Thénia ainsi que celui de Zemmouri Ouest, qui ont eu l’accord des communes concernées et celui de la wilaya, ils doivent attendre au moins un mois avant d’être transférés au ministère du Tourisme. Ces derniers cas présentent, selon le directeur du tourisme, des réserves de certaines directions de la wilaya. Quant aux deux derniers, Cap Djinet et Corso II, ils ne tarderont pas à être exposés à l’Assemblée de la wilaya, explique Louerdi Abidi. Pour la direction du tourisme, l’opération en question n’est pas facile et présente beaucoup de contraintes, ce qui expliquerait, selon elle, tout ce retard dans l’étude des dossiers. «Sur les 4700 hectares prévus pour les 11 ZET, seulement 1056 seront aménageables, dans lesquels 289 hectares, soit 27,4%, sont des terres agricoles et 91 hectares, soit 8%, sur lesquels se trouvent actuellement les chalets distribués après le séisme de 2003. Donc, il faut régler la situation de ces terrains et les extraire des domaines agricoles et de l’habitat pour les inscrire dans le domaine du tourisme», indique M. Abidi. «Ce qui nous préoccupe actuellement, c’est l’acquisition de ces terrains au profit de nos projets touristiques. Leur distribution ne relève que de la responsabilité du wali et aucunement des directions. Il est le seul habilité à prendre une telle décision», insiste-t-il. Sur la valeur réelle des notifications distribuées, Louerdi Abidi explique : «Je ne saurai vous dire si les notifications seront prises en compte après l’élaboration des PAT. De toutes les façons, nous n’avons jamais entendu parler de leur annulation. Mais une chose est sûre, les vrais investisseurs auront certainement leurs projets.» Pour les investisseurs qui souhaitent s’informer sur leurs dossiers, le directeur des Domaines, Noureddine Ben Mohamed, informe ces derniers du lancement d’une cellule de l’investissement chargée, selon lui, du suivi des dossiers en question et sur l’opération de l’avancement des PAT.
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