Les mesures de sécurisation des examens nationaux, prévus dimanche prochain pour le Brevet d’enseignement moyen (Bem) et à partir du 11 juin pour le baccalauréat, sont insuffisantes aux yeux des syndicats du secteur. Le scénario de la fraude massive avec fuite des sujets, tel que vécu en 2016, risque de se répéter pour la session de cette année. Les enseignants s’inquiètent des retombées de «la crise de confiance» dans laquelle est plongé le secteur avec tout ce qu’ elle peut dévaster. Car, pour Meziane Meriane, coordonnateur national du Syndicat autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Sapest), «aucune mesure ne saura freiner les auteurs de ces fuites si les différents intervenants sur la chaîne de l’organisation de l’examen sont dénués de conscience». Tout en exprimant son inquiétude face au phénomène de la fraude qui a atteint même le primaire, M. Meriane estime qu’en plus des mesures prises cette année pour dissuader les tricheurs, les pouvoirs publics devront lever le blocage de la réforme du baccalauréat. Car, selon notre interlocuteur, la nature des sujets actuels sollicitant essentiellement l’effort de mémorisation chez les candidats favorise la tricherie. «Le gouvernement a marqué un recul sur le dossier après un long débat sur le thème et durant lequel il y a eu consensus sur la nécessité d’aller vers des sujets favorisant l’esprit de synthèse et de réflexion», souligne M. Meriane, appelant les décideurs à plus de «courage politique». Le Snapest estime que le chemin que prennent les sujets de leur conception jusqu’à leur distribution est bien sécurisé avec les moyens humains et techniques déployés. «Le défi est d’empêcher le contact entre les candidats et ceux qui pourraient être une source de fuite», souligne le même syndicaliste, déplorant le black-out maintenu sur l’épisode de la fuite de l’année dernière. Le Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef) s’interroge aussi sur les commanditaires de la fuite de l’année dernière. «Les auteurs de ces faits peuvent recommencer, surtout si l’objectif est d’attaquer la crédibilité de l’examen», s’inquiète Boualem Amoura, président dudit syndicat. «L’Etat n’a pas tiré de leçon», estime M. Amoura persuadé que «le secteur continuera à être ciblé par ceux qui refusent le changement». Le syndicat appelle au renforcement des mesures contre la fuite : «Les moyens techniques et législatifs devraient être mis à la disposition des experts de la cybercriminalité pour traquer les auteurs de fuite.» «Les blogueurs, les syndicalistes et le citoyen lambda sont identifiés et poursuivis dès qu’ils expriment une opinion politique dérangeante. Pourquoi ces moyens ne sont-ils pas déployés pour sécuriser l’examen ?» s’interroge M. Amoura. Pour le Satef, la fraude est favorisée par le système centralisé d’organisation de l’examen. Le syndicaliste appelle au contrôle des réseaux sociaux comme mesure préventive, «mais seule une réforme du système de l’évaluation et un rétablissement de la confiance en la communauté éducative mettront fin au fléau». Le Conseil national autonome du personnel enseignant du secteur ternaire de l’éducation (Cnapeste) déplore le climat de manque de confiance qui caractérise la préparation et l’organisation des examens. «Les enseignants et autres personnels pédagogiques sont pointés du doigt comme étant de présumés auteurs d’actes de fraude. Les efforts de sécurisation sont focalisés là-dessus, alors que la faille est ailleurs», souligne Messaoud Boudiba, secrétaire national dudit syndicat. Ce dernier estime que l’annonce détaillée des mesures fragilise davantage le système de sécurisation des examens. «Les mesures annoncées sont à chaque fois contournées par les fraudeurs. La technologie ne se défie pas avec la parole», enchaîne le représentant du Cnapeste, constatant que l’Algérie est le seul pays à vivre une telle angoisse de fuite. Pour le syndicat, les conclusions de l’enquête sur la fuite des sujets en 2016 doivent être rendues publiques. C’est uniquement en identifiant les auteurs de cette fraude que l’on saura comment éviter le scénario à l’avenir.
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