lundi 26 décembre 2016

Tunisie : Le retour inquiétant des terroristes

La société civile a organisé une manifestation, samedi dernier, devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) pour réclamer des poursuites judiciaires contre les Tunisiens ayant combattu dans les rangs des groupes armés en Syrie, en Libye et en Irak. Selon le ministre tunisien de l’Intérieur, près de 800 Tunisiens seraient rentrés au pays durant l’année 2016, après avoir passé des périodes prolongées dans ces zones de conflit. Les défaites subies par Daech à Syrte (Libye) et Alep (Syrie) inquiètent à plus d’un titre la société civile tunisienne, qui a peur d’un «deal» entre les puissances régionales, stipulant de rapatrier des milliers de terroristes en Tunisie, sans poursuites judiciaires. Avant-hier, une manifestation a été planifiée par des organisations de la société civile devant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) pour réclamer des poursuites judiciaires contre les Tunisiens ayant combattu dans les rangs des groupes armés en Syrie, Libye et en Irak. «Nous sentons l’odeur d’un arrangement international stipulant de rapatrier ces combattants en Tunisie, par les mêmes puissances régionales qui ont encouragé leur immersion dans ces combats», a averti la militante citoyenne Latifa Bouslama. Les slogans scandés par les quelques centaines de manifestants ont insisté sur l’aspect civil de l’Etat. «Tunisie, Etat civil respectant les droits et les libertés», ont-ils crié. Présent à la manifestation, Mehdi Abdeljawed, membre du parti Machrouaa Tounes (20 sièges au Parlement), s’est dit inquiet de voir la Tunisie «envahie par ces troupes de terroristes, rodés aux techniques des perturbations et des crimes». L’universitaire a appelé les autorités tunisiennes à «éviter le piège des puissances régionales, comme la Turquie et le Qatar, qui ont été derrière l’immersion des jeunes Tunisiens dans ces conflits». Risques Dans le même ordre d’idées, le ministre tunisien de l’Intérieur, Hédi Majdoub, a déclaré jeudi dernier, lors d’une séance réservée à son questionnement à l’ARP, concernant l’assassinat, le 15 décembre 2016, de l’ingénieur spécialiste en drones, Mohamed Zouari, que près de 800 Tunisiens sont rentrés au pays durant l’année écoulée, après avoir passé des périodes prolongées dans des zones de conflits armés (Irak, Syrie et Libye). Le ministre a reconnu que les renseignements concernant ces personnes ne sont, parfois, pas suffisants. «Les services de sécurité font de leur mieux pour les surveiller et réunir toutes les informations les concernant», a affirmé le ministre de l’Intérieur. En règle générale en Tunisie, ces personnes rentrées des aires de conflits armés et reconnues impliquées dans les combats sont traduites devant la justice, en vertu des juridictions antiterroristes. Quelques dizaines, seulement, parmi les 800 personnes de retour en Tunisie, ont été concernées par ces poursuites. L’incertitude plane donc sur ce dossier très complexe. Les Tunisiens ont peur de ce que leur préparent les puissances internationales et régionales. «La manifestation de ces Tunisiens est un avertissement à l’égard de leur gouvernement», constate le député Mongi Rahoui du Front populaire (opposition). Les forces de sécurité intérieure se sont alarmées d’un risque de «somalisation» de la Tunisie en cas de retour massif des terroristes tunisiens dans leur pays, exhortant le gouvernement à prendre des «mesures exceptionnelles», dont la déchéance de la nationalité. «Le retour en Tunisie des terroristes en provenance des foyers de tension est alarmant et peut conduire à la somalisation du pays», a affirmé dans un communiqué, repris par l’AFP, le Syndicat national des forces de sécurité intérieure. Ces terroristes ayant notamment combattu en Irak, en Syrie et en Libye «ont reçu des formations militaires et appris à manipuler toutes sortes d’armes de guerre sophistiquées», a relevé le syndicat. Déplorant «l’absence de volonté politique», les forces de sécurité ont exhorté le gouvernement à prendre des mesures «exceptionnelles», mentionnant «la déchéance de nationalité». Ces terroristes pourraient rejoindre les «cellules dormantes» du pays, et «accepter leur retour (...) contribuera à élargir le cercle du terrorisme»,   ont-elles prévenu. La Tunisie compte plus de 5000 ressortissants dans les rangs d’organisations terroristes à l’étranger, selon l’AFP qui cite un groupe de travail de l’ONU, et la perspective de leur retour suscite une inquiétude grandissante.

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