dimanche 20 septembre 2015

Le mouton hors de prix

L’absence de contrôle des services de la tutelle (agriculture, commerce) et des APC a favorisé l’installation des spéculateurs. Ces derniers acheminent des dizaines de camions vers les grandes villes. Le cheptel est alors dispersé parmi des centaines de détaillants, qui prennent possession des points de vente stratégiques des villes : garages, cours des cités, terrains vagues, ronds-points. Les maquignons arrivent ainsi à imposer leurs prix, rendant le mouton hors de portée. Ce phénomène décrié pousse les citoyens à se rabattre sur l’agneau et menace le cheptel national déjà maigre : moins de 25 millions de têtes. Les éleveurs vont casser les prix.» Le secrétaire général de l’Union nationale des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, a annoncé, lors de son passage au forum de DK News, l’arrivée par camions entiers de troupeaux de moutons dans les villes du nord du pays. Après une petite tournée dans certains points de vente formels et informels d’Alger, un constat s’impose : les prix n’ont guère varié ; ils fluctuent entre 30 000 et 70 000 DA. «Je me suis dit qu’il fallait acheter durant la dernière semaine, pour faire des économies et ne pas salir mon appartement du quatrième étage. Mais j’ai vite déchanté. Je constate que je me suis lourdement trompé. Les prix sont toujours élevés et ce n’est pas à cause de l’offre qui serait faible», regrette Khaled, sexagénaire, habitant rue Nessira Nounou, à Belouizdad, en montrant du doigt le garage de mécanique encombré par des béliers et des agnelles. «Les prix vont peut-être baisser la veille, mais pas avant. Cette baisse n’excédera pas 5000 DA», prédit le vendeur trentenaire, qui a «loué» avec ses collègues des espaces de vente illégaux sans que les services de l’APC et du Commerce ne réagissent.   Les éleveurs, qui commercent avec des intermédiaires surtout, ne compteraient pas obéir à leur représentant, M. Alioui. «On ne voit pas venir toutes ces quantités de moutons dont a parlé M. Aloui. La situation, cette année, est identique à celle de l’an dernier. La demande restera jusqu’à la veille de l’Aïd la même et l’offre aussi. Jusqu’à 4 millions de moutons seront sacrifiés jeudi prochain. Comme je l’ai déjà déclaré, les Algériens auront à débourser à l’occasion de la fête 150 milliards de dinars», signale El Hadj Tahar Boulenouar, porte-parole de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA). Désorganisation du circuit L’absence de contrôle des services de la tutelle (agriculture, commerce) et des APC a favorisé l’installation des spéculateurs. Ils acheminent des dizaines de camions vers les grandes villes. Le cheptel est alors dispersé parmi des centaines détaillants, qui prennent possession des points de vente stratégiques des villes : garages, cours des cités, terrains vagues, ronds-points. «Plusieurs facteurs expliquent la hausse du prix du bétail : il y a certes la cherté de l’aliment importé et vendu au marché noir (4 à 5000 DA), les épidémies, le manque de main-d’œuvre et l’absence d’aides au profit des professionnels du secteur. Mais à mon sens, il y a un facteur plus important, c’est celui de la forte spéculation qui fait augmenter les prix d’au moins 20%. Les spéculateurs transportent le cheptel sans avoir de carte d’éleveur», estime M. Boulenouar.   Le comportement du consommateur a également favorisé la hausse des prix. «Deux moutons identiques sont vendus à des prix différents lorsque l’une des bêtes a des cornes ou une robe noire. La différence est parfois de 10 000 DA. Un ami a assisté à une transaction qui l’a estomaqué. Le client, qui a dans son esprit l’archétype du mouton du bon musulman, est reparti satisfait en déboursant 10 000 DA de plus pour un mouton aux cornes bien importantes», raconte, tout sourire, le porte-parole de l’UGCAA, qui observe que l’islam prescrit que la bête sacrifiée doit être «en bonne santé et ne portant pas de blessures apparentes» sans plus.

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