Crises et conflits actuels» a été, hier, le thème d’une conférence-débat animée par le géopolitologue français, Pascal Boniface, fondateur et directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), en marge du 20e Salon international du livre d’Alger. Le géopolitologue n’a pas mis beaucoup de temps pour entrer dans le vif du sujet, tranchant avec ce qu’il a appelé la «paresse intellectuelle de certains», qui mettent en avant l’idée d’une troisième guerre mondiale. «C’est assez frappant, dit-il, que les gens regardent le présent avec une vision du passé.» Pascal Boniface, qui a expliqué les conflits qui bouleversent le monde, affirme qu’il n’y a pas de comparaison entre le troisième Reich et Daech, comme «il n’existe pas de pays revanchard avec une idéologie totalitaire». Se disant toujours frappé par les gens qui ne veulent pas changer de logiciel, le politologue français, qui souligne qu’«il y a des conflits sur une large partie de la planète», précise, toutefois, que chacun de ces conflits à ses logiques propres. Le conflit en Ukraine n’a rien à voir avec le conflit en Syrie, soutient le conférencier qui fait un constat sans concession de la situation du monde et de la communauté internationale. Selon lui, «il n’y a pas de système de gouvernance de la communauté internationale». Cette dernière, soutient le directeur de l’IRIS, est «comme le monstre du Loch Ness dont tout le monde parle mais que personne ne voit». Pascal Boniface, qui retrace l’évolution des relations internationales, indique que la chute du mur de Berlin n’est pas le symbole de la fin de la guerre froide, car le monde bipolaire était déjà effrité. Ce qu’on appelle le nouvel ordre mondial a commencé en novembre 1990, quand le président de l’URSS, à l’époque Mikhaïl Gorbatchev, avait montré – en approuvant l’intervention militaire pour libérer le Koweït envahi pas l’Irak – combien il était sérieux pour bâtir un nouvel ordre mondial. Mais la chute du prix du pétrole voulue par les Américains et l’Arabie Saoudite pour l’affaiblir, ne l’a pas aidé à peser dans les rapports internationaux et rester au pouvoir au Kremlin. C’est Boris Eltsine qui lui succéda, et les Américains n’ont pas fait le choix de construire un nouvel ordre mondial comme proposé par le père de la Perestroïka, mais celui du vainqueur de la guerre froide et d’un monde unipolaire, explique le directeur de l’IRIS, pour qui «nous payons aujourd’hui les conséquences de cette grande étape historique». C’est dans ce même ordre d’idées que Pascal Boniface parle de la guerre d’Irak en 2003 et la qualifie d’erreur en cela qu’elle a créé Daech. Le géopolitologue évoque, également dans ce cadre, le renversement d’El Gueddafi et la situation en Libye. C’est la peur de population de Benghazi qui a conduit la Chine et la Russie à ne pas opposer leur veto contre l’intervention étrangère en Libye, fait remarquer le conférencier avant de souligner que finalement la protection des populations d’un réel danger masquait l’ingérence et des politiques néocoloniales. Pascal Boniface refuse de parler d’un Printemps arabe. Selon lui, chaque pays arabe a vécu une situation propre à lui. Il n’y a pas eu d’effet de dominos, soutient le conférencier qui considère que les peuples qui se sont soulevés l’ont fait d’eux-mêmes. M. Boniface parle du peuple palestinien qui fait les frais de l’axe Netanyahu- Sharon-Hamas. Rappelant comment un acte terroriste, l’assassinat d’Ishak Rabin par un extrémiste israélien, a bouleversé tout le processus de paix, le conférencier indique que la solution n’est pas sécuritaire mais politique : la paix et la création d’un Etat palestinien. En Syrie, combattre Daech oui, seulement Bachar Al Assad n’est pas la solution, soutient Pascal Boniface qui estime qu’aujourd’hui «il n’y a pas plus de guerre qu’à l’époque de la guerre froide». Soulignant que les Etats-Unis ne contrôlent plus rien, le directeur de l’IRIS indique que dans le monde, il y a des stratégies de puissance.
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