L e 1er Novembre 1954 a été la thématique d’un colloque scientifique d’envergure internationale organisé, hier à Akbou, par l’association Med-Action pour la jeunesse et la citoyenneté. Ce colloque s’est tenu à l’hôtel Majestic sous le thème «Pourquoi le 1er Novembre 1954 ?», en présence d’un parterre de citoyens fortement représentés par la population locale. La journée a été marquée par les communications des historiens français Gilbert Meynier et Gilles Manceron, intitulées respectivement «Pourquoi le 1er Novembre ?» et «Le FLN ou la construction d’un anticolonialisme moderne», la communication «La domanialisation de la propriété foncière en Algérie : la spoliation couverte de l’habit de la légalité» du conseiller juridique Tahar Khalfoune, ainsi que par l’intervention de l’ancien officier de l’ALN, Rachid Adjaoud. A noter que la journaliste Samira Bendris Oulebsir est la modératrice de ce colloque. Intervenant en premier, Rachid Ajaoud plaide pour une histoire «d’apaisement», appelant à la levée des tabous. Notamment ceux ayant trait à la mort du colonel Amirouche et celle de Abderrahmane Mira et l’affaire des harkis, invitant les Français «à nous aider dans cette tâche, car vous êtes les seuls à pouvoir le faire». L’ancien secrétaire de la Wilaya III n’a pas manqué de tirer sur les Messalistes déclarant qu’ils «étaient les premiers à nous attaquer».Dans son intervention, Gilbert Meynier est revenu sur le contexte colonial qui a concouru à l’émergence des courants nationalistes, sans entrer dans les détails. Manuel d’histoire commun Pourtant invité par d’insistantes questions du public à s’exprimer sur des questions projetant le débat dans l’actualité, à l’instar des circonstances de la mort des révolutionnaires Abane Ramdane et Amirouche, ou encore ce qui est appelé «le clan d’Oujda», le conférencier s’est montré réticent, comme pour éviter la polémique. Tout en évoquant «des difficultés pour l’accès aux archives des deux côtés (algérien et français, ndlr)», Gilbert Meynier décrit l’apparition du FLN comme conséquence de ce qu’il appelle «les blocages coloniaux». «Le système colonial, de par sa nature violente, ses pratiques de dépossession, de dépersonnalisation, son racisme et sa politique scolaire ségrégationniste, a allumé la mèche», développe l’orateur. Et d’ajouter : «L’allumage de la mèche était une réponse à l’échec du réformisme ; la lutte armée était la seule voie envisageable.» Interrogé par un citoyen sur ce qu’il pense de la repentance, l’historien répond qu’il est «contre». «Je ne suis pas d’accord avec l’idée de repentance, car elle est de connotation religieuse. En plus, avec la montée comme challenger politique redoutable de Marine Le Pen en France, il faut oublier cette idée», a-t-il suggéré. Toutefois, Gibert Meynier, qui impute toute la responsabilité au «système colonial», plaide pour un «manuel historique commun» entre l’Algérie et la France. Spoliation Intervenant l’après-midi, l’historien Gilles Manceron est revenu sur l’occultation volontaire ou involontaire des résistances anticoloniales ayant précédé le mouvement indépendantiste moderne incarné par les différents courants nationalistes, dont le FLN. «En réalité, des rebellions armées n’ont pas cessé de se produire dans diverses régions. Il faut restituer leur place et souligner leur importance. Mais, aussi, leurs particularités par rapport à la nouvelle étape du Mouvement national qui a commencé à partir de la fin des années 1930», soutient le conférencier. Gilles Manceron invite, dans ce sens, à se rappeler les résistances, «peu étudiées par l’historiographie» ayant eu lieu entre 1851 et 1854, à Sétif, Béjaïa et la vallée de la Soummam, qui ont prolongé la lutte de l’Emir Abdelkader et tracé le chemin pour les luttes futures, jusqu’à la naissance de la lutte moderne. Dans un long et riche exposé, le conseiller juridique Tahar Khalfoune décrit la nature de l’appropriation de l’espace en Algérie anté-coloniale, avant de dévoiler, en termes juridiques, les mécanismes de «spoliation» des terres après la conquête du pays par les Français. Il s’agit, selon le conférencier, d’un passage «d’un système de variété à la dualité des statuts». C’est de cette façon que les colons ont mis la main sur toutes les terres fertiles, tandis que les autochtones se contentaient de montagnes, des terres arides, ou carrément prenaient le chemin de l’exil. A noter qu’à l’issue de ce colloque, une convention de partenariat a été signée entre l’association Med-Action et l’association Amitié France-Algérie et qu’une revue Mémoire est éditée par l’association Med-Action. Elle renferme les communications des intervenants aux colloques, des témoignages, des entretiens, dont deux avec Ali Haroun et le fils de Jean Amrouche, Pierre Amrouche. Un écrit inédit de Mohamed Boudiaf, écrit à Turquant le 22 octobre 1961, y figure également en exclusivité.
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