Pour être au rendez-vous de la commémoration du 1er Novembre, le Festival international du théâtre de Béjaïa (FITB) a choisi de réserver, cette année, les planches de la grande salle du théâtre régional à P’tit Omar, figure emblématique de l’engagement précoce pour la guerre de Libération nationale. Abbas Mohamed Islam a mis en scène l’histoire héroïque de l’adolescent-martyr dans une pièce, produite par le TNA et l’association théâtrale Achbal Aïn Benian, qui porte le titre thématique de La Guerre d’adolescence. Comment raconter P’tit Omar sans risquer un parallèle avec La Bataille d’Alger, espace créatif et représentatif inévitable et indissociable du personnage de l’enfant ? Le public du théâtre de Béjaïa a cru avoir vu, à travers plusieurs séquences théâtrales de La Guerre d’adolescence, des scènes du film de Gillo Pontecorvo «adaptées» au jeu théâtral. Les planches ont ce pouvoir d’exacerber les émotions du fait du spectacle vivant et du contact direct avec le public. Derrière un rideau éclairé, un projecteur se dessine dans la douleur l’ombre de Dahbia, enceinte de Omar. Le bébé est né et, dans un passage elliptique, Omar devient un adolescent joué par le tout jeune Harat Abdelhakim, d’à peine 15 ans. Lorsque la bande d’amis constituée de Boualem, Mahmoud et autres enfants de La Casbah s’occupe dans la rue, Omar, la tête ailleurs, trouve le moyen de s’éclipser. Dans la proximité du militantisme de son oncle, qui n’est autre, en vrai, que Yacef Saâdi, il s’engage sur la voie périlleuse de la guerre de Libération nationale et devient agent de liaison du Front dans la Zone autonome d’Alger. «Je veux devenir un fidaï», ne cesse-t-il de répéter à son oncle, débordant de détermination. Sur scène, comme dans l’histoire de la zone autonome, P’tit Omar côtoie Si Larbi, Ali La Pointe, Hassiba, Mahmoud… Le passage du film au théâtre amène le processus de la trans-écriture à adopter un procédé narratif qui s’appuie sur un discours émouvant. La narration est menée par des chants exécutés par Ikariouene Abderrahmane, Manou de son nom d’artiste, qui gratte sa guitare avec ses doigts et son cœur. Submergé par l’émotion, c’est avec des sanglots qu’il finit un refrain de A Yemma aâzizen ur tsru (chère mère ne pleure pas) de Farid Ali. Le public est vite contaminé ; la lumière rallumée, on croise des regards encore embués. La pièce se termine sur la célèbre séquence de la cache de La Casbah où se sont abrités Ali La Pointe, Hassiba, P’tit Omar et Mahmoud (agent de liaison), encerclés par les paras. Contrairement au film, il n’y a pas d’explosion. La fin est voulue autrement, avec un effet irréel : les quatre héros sortent de la planque et, sur un fond musical qui reprend le chant du henné, P’tit Omar réapparaît en costume blanc immaculé. Il s’est «marié» avec la Révolution. Cette dernière séquence sacralise cette union que l’on a choisie de célébrer.
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