jeudi 10 novembre 2016

Trump : Le «Bad boy» devenu the president

Donald Trump ?  «Un danger pour l’espèce humaine.» Noam Chomsky, l’idéologue de la gauche radicale américaine, en est presque convaincu. Interrogé il y a plus d’une semaine par la RTS (Radiotélévision suisse), le philosophe américain professe (déjà) le pire : «Trump se présente comme un grand négociateur, la Chine, la Russie feront ce qu’il demande. Supposez qu’il essaie et que personne ne lui obéisse. Que fera-t-il ensuite ? La survie de l’espèce humaine en dépend ! Prendre un tel risque, c’est vraiment effrayant.»  Ce que Trump ferait est «vraiment imprévisible», enchaîne le professeur au MIT de Boston. «Il dit tout et son contraire. Il dit ce qui lui passe par la tête.  On a là un ignorant, susceptible et mégalomane, qui pourrait faire n’importe quoi. Et en particulier avec l’arme nucléaire, c’est trop dangereux !» s’est-il alarmé. En mars dernier, la même voix prédisait la victoire du candidat républicain, porté par cette Amérique blanche, sévèrement bousculée dans son hégémonie et happée par les politiques cannibales des néo-libéraux. «Evidemment, estimait Chomsky, Trump est en train de faire appel à de profonds sentiments de colère, de peur, de frustration et de désespoir, probablement parmi des tranches semblables à celles qui connaissent une montée en mortalité, une chose inédite hors guerres et catastrophes.» «Aucune guerre, aucune catastrophe, selon Chomsky, n’a été derrière ce pic de mortalité chez cette population. C’est juste l’impact des politiques à travers une génération qui les a rendus, il paraît, en colère, sans espoir, frustrés, causant un comportement autodestructeur.» Pour gagner son ticket de 45e président des Etats-Unis, Donald Trump a su puiser dans la doctrine autoritaire et suprématiste en phase avec de larges pans de l’Amérique profonde.  Son slogan de campagne, «Make America Great Again !» (rendre aux Etats-Unis leur grandeur d’antan), avait valeur de programme. «Je joue avec les fantasmes des gens. J’appelle cela l’hyperbole véridique. C’est une forme innocente d’exagération et une technique de promotion très efficace», disait Trump dans son Art of deal, un de ses nombreux ouvrages cosignés, édité en 1987. Erreur de casting ? Accident  de l’histoire ? Trump, The Donald, comme le surnommaient avec mépris les médias du magnat Rupert Murdoch — résolument hostile à sa candidature comme ce fut d’ailleurs  le cas pour l’establishment américain — a déjoué sondages et prédictions  et emballé cette «majorité silencieuse» américaine qui s’est manifestée envers et contre tout le monde. «Clown», «bouffon», «vantard», «égocentrique», «raciste», «misogyne»… la liste des  quolibets dont est affublé le désormais nouveau président américain est très généreuse. N’empêche, le «pompeux» milliardaire — fortune estimée en 2015 à 4,1 milliards de dollars par le magazine Forbes — collectionne les success stories mais aussi les frasques, scandales et faillites (de ses casinos). «Le succès, dit-il, on l’a de naissance ou on ne l’a pas. C’est une question génétique.» Né le 14 juin de l’an 1946, dans l’enclave huppée du Queens.  Le père, Fred Trump, issu d’une famille d’immigrés allemands, avait fait fortune dans l’immobilier. Fred Trump, mentionnent les biographes de la dynastie Trump, se disait «Suédois» pour ne pas faire fuir les potentiels clients  juifs. Le Washington Post, dans une enquête fouillée, décrit un mini-Trump «athlétique, magouilleur et de mauvaise foi, refusant de reconnaître ses erreurs». Turbulent, l’enfant Trump est placé en internat à l’Académie militaire de New York, où il apprend «à se battre et à aimer ça», comme le rapporte le prix Pulitzer Michael d’Antonio, son biographe attitré. Fan de Hugh Hefner, fondateur de Playboy et… adorateur des serments capitalistes du pasteur Norman Vincent Peale sur «La Puissance de la pensée positive» déclamés à Marble Collegiate Church (Manhattan) façonnent l’être Trump. «Rien n’a été facile pour moi. J’ai commencé à Brooklyn, mon père m’a fait un petit prêt d’un million de dollars», se confie-t-il sur le plateau de NBC.  La politologue Marie-Cécile Naves (citée par Libération) parle d’un Donald Trump qui ne fut pas «le premier choix de son père» pour reprendre les affaires de la famille en 1972. L’héritier tout désigné était Fred Jr., le fils aîné, mort à 43 ans d’alcoolisme. «Les espoirs de Fred Trump se sont donc déplacés sur le deuxième fils : ça a dû jouer dans sa trajectoire, cette volonté de satisfaire son père. Fred Trump n’a jamais pu faire fortune à Manhattan, alors le fils s’est mis en tête de faire mieux que le père.»  L’érection de la Trump Tower, 58 étages, 202 mètres de hauteur, en 1983 au cœur de Manhattan, répondait à cette folle obsession de réussite, et ce, pour mieux narguer l’élite new-yorkaise qui l’a toujours snobé et traité comme un «plouc». Ses premiers flirts avec la politique datent de 1988 lorsqu’il fera montre, pour la première fois, de ses prétentions présidentielles. Il était alors dans le camp démocrate. En 2000, il change de camp, passe côté républicain et exprime les mêmes prétentions. Sans succès. Séduit par le «charisme» que dégageait le soupirant (malheureux) à la Maison-Blanche, l’ancien président Richard Nixon verra en lui un futur «commander in chief». «Quand vous vous présenterez, vous gagnerez», lui avait-il écrit.  

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