Le patron du contre-terrorisme marocain, Abdelhak Khiam, a affirmé que les huit pistolets récupérés lors du démantèlement d’une cellule de sept membres de Daech au Maroc ont été acheminés via la frontière algéro-marocaine. En revenant sur les détails du démantèlement d’une cellule terroriste au Maroc, le chef du contre-terrorisme marocain, Abdelhak Khiam, commence par pointer le doigt vers l’Algérie, «sans entrer dans les détails du voisin hostile ou non». Lors d’une conférence de presse animée dimanche dernier, il affirme tout simplement que les armes saisies (huit pistolets dont un mitrailleur, deux gilets dotés de ceintures explosives et des munitions) par les éléments du Bureau central des investigations judiciaires (BCIJ), qu’il dirige, «ont été introduites au Maroc, comme cela a été le cas pour les affaires précédentes, via sa frontière avec l’Algérie», après avoir été «infiltrées en coordination avec le groupe dit Etat islamique (EI), opérant en Irak, Syrie et en Libye». Abdelhak Khiam détaille les conclusions de l’enquête préliminaire sur les sept présumés terroristes, membres de Daech, arrêtés à El Jadida, Salé, El Gara, Boulaâouane (province d’El Jadida) et au douar Maâtallah (province de Taza), dont le chef vient juste de boucler ses 20 ans. S’il ne fait pas rire, le récit de son itinéraire par le patron du contre-terrorisme marocain laisse perplexe. «Il a pris attache via internet et les réseaux sociaux avec l’un des chefs du groupe terroriste Jund Al Khilafah en Algérie, un converti, pour intégrer ses rangs, mais il a essuyé un refus. Il a ensuite pris contact, par les mêmes moyens, avec les responsables de l’organisation terroriste Etat islamique en Irak et en Syrie, qui lui ont conseillé de passer d’abord à l’action au Maroc. Ils lui ont assuré toute l’aide nécessaire pour la création d’une cellule de l’organisation Etat islamique au Maroc. Ils l’ont dirigé vers des éléments de Daech en Libye qui lui ont procuré de l’argent pour l’achat de l’armement, mais aussi pour le recrutement de quelques éléments dont certains sont encore en fuite. Il a loué un appartement (…) qui sert de refuge grâce à l’argent transféré par le canal bancaire (…) de Libye. Jusqu’à présent, l’enquête a révélé que les armes récupérées ont été introduites au Maroc, via la frontière algérienne, au sud-ouest du pays, qui reste une région assez vaste, difficile à contrôler.» Peut-on croire à un tel scénario ? Difficile, même pour les plus naïfs. Le patron du contre-terrorisme marocain oublie que l’Algérie a été le premier pays à attirer l’attention du royaume sur le déplacement de dizaines, voire de centaines de ses sujets en Libye pour renforcer les rangs de Daech. Ils étaient pris en charge par une agence de voyage située à Tripoli, qui se chargeait du transport aérien du Maroc jusqu’en Libye en transitant par Alger. Rabat a même fait la sourde oreille en refusant de mettre un terme à ces déplacements sans retour suspicieux. Il a fallu que les plus hautes autorités du pays décident de renvoyer tous ces Marocains à destination de Tripoli, en leur assurant le transport aérien jusqu’à Casablanca. Une telle décision ne sert-elle pas la sécurité du Maroc, dont au moins 1500 sujets sont déjà dans les rangs de Daech en Irak et en Syrie et au moins 500 autres en Libye ? Ces chiffres restent en deçà de la réalité, puisqu’ils ne prennent pas en compte les Marocains ayant une double nationalité. Seulement hier, les autorités du Québec, au Canada, ont identifié un Marocain parmi les auteurs de la fusillade qui a fait au moins 6 morts dans une mosquée, alors que depuis des années, aucun nom d’Algérien n’a été cité parmi les terroristes à l’étranger et que leur nombre est insignifiant dans les rangs de Daech en Irak, en Syrie, ou en Libye, le pays voisin. Comment peut-on faire croire que l’Algérie, qui mobilise des moyens colossaux et ses forces armées tout le long des frontières avec le Mali, la Libye et la Tunisie, contre la menace terroriste, puisse être à l’origine du passage au Maroc de… huit pistolets, dont un mitrailleur ? Qui veut-on tromper avec cette saisie d’armes ? Il est important de rappeler les coups fourrés du makhzen contre la sécurité de l’Algérie : l’hébergement de groupes terroristes du GIA qui bénéficiaient de camps d’entraînement non loin de la frontière algérienne ; le refuge octroyé à leur émir Abdelhak Layada en 1993, qui a suscité de longues tractations avec Alger avant qu’il ne soit extradé ; l’accusation de l’Algérie de l’attentat terroriste contre un hôtel à Marrakech en 1994, suivie par l’expulsion manu militari, en pleine nuit, de centaines de familles algériennes. Autant de coups fourrés qui ont porté sérieusement atteinte à la sécurité de l’Algérie. Il est aussi important de rappeler que l’Algérie consacre des moyens colossaux pour faire barrage aux narcotrafiquants du makhzen et les réseaux de trafic d’armes auxquels ils recourent pour assurer le convoyage de leur poison vers l’Algérie. Le dispositif mis en place par les forces de l’ANP le long de la frontière ouest et les moyens technologiques ont permis de déjouer de nombreuses opérations d’acheminement de centaines de kilos de drogue et la saisie d’un véritable arsenal de guerre, comme des kalachnikovs, des lance-roquettes, des lance-grenades, des mortiers, pour ne citer que ces types d’armes. Les plus initiés savent très bien que toute cette logistique mise en place par l’Algérie pour assurer la sécurité de ses frontières assure également celle de ses voisins, à commencer par le Maroc, dont les sujets enrôlés au sein des organisations terroristes risquent à tout moment de retourner au pays et d’en faire un champ de bataille. Mais une telle situation d’instabilité n’a jamais été souhaitée par l’Algérie, parce que consciente des dangers qu’elle peut avoir sur sa sécurité intérieure. Visiblement, la sortie du patron du contre-terrorisme marocain, Abdelhak Khiam, avait d’autres objectifs que de rassurer les Marocains sur leur sécurité. Peut-être voulait-il détourner leur attention de l’échec de leurs autorités à rompre l’isolement du royaume sur plan international en raison de son occupation du territoire sahraoui et surtout son admission au sein de l’Union africaine, où le Sahara occidental est membre fondateur, qu’il sera sommé de reconnaître en tant que tel.
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