Le classement de l’Algérie parmi les 23 pays que le nouveau président américain aurait mis en garde pour avoir refusé de recevoir leurs ressortissants expulsés des Etats-Unis, ne semble pas inquiéter les autorités algériennes. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères se montre «prudent» en évitant «les conclusions hâtives» et met en avant les relations excellentes entre l’Algérie et les Etats-Unis. Des sources bien informées abondent dans le même sens et affirment que «l’Algérie n’a jamais refusé» d’accueillir ses ressortissants expulsés. Elle exige que la réadmission se fasse au cas par cas, et dans le cadre du respect de la législation. Le retour des 26 sur les 28 détenus algériens de Guantanamo, en Algérie, est présenté comme le meilleur exemple. Citée parmi les 23 pays «mis en garde» par l’Administration américaine contre leur refus de recevoir leurs ressortissants expulsés des Etats-Unis, l’Algérie se garde de «commenter» par «prudence». Le 28 janvier, Los Angeles Times, journal américain, évoquait cette «mise en garde» adressée à une liste de 23 pays, incluant la Chine, l’Iran, l’Irak, la Libye, la Somalie, le Zimbabwe, mais aussi l’Algérie. En fait, le nouveau président des Etats-Unis avait donné le ton, en septembre dernier, lors de la campagne présidentielle, en parlant des «23 pays qui refusent de reprendre leurs citoyens après qu’ils aient été ordonnés de quitter les Etats-Unis d’Amérique». Contacté par nos soins, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Abdelaziz Benali-Cherif, se montre très sceptique. Pour lui, «entre ce qu’écrit la presse et la réalité, il y a un monde». Il précise : «Les relations entre les Etats ne se font pas à travers les médias. Une mise en garde sous-entend un écrit officiel et une réponse. Nous avons de bonnes relations avec les Etats-unis d’Amérique et dans certains domaines, celles-ci sont excellentes. Il faut éviter les conclusions hâtives.» A propos des Algériens vivant aux Etats-Unis, M. Benali-Cherif est formel : «Nous avons une petite communauté très sereine, et bien intégrée. En général, ce sont des intellectuels, des cadres et des personnes d’un certain niveau. Ils n’ont jamais posé de problèmes.» Si le porte-parole du ministère des Affaires étrangères se montre très prudent, des sources bien informées se déclarent «étonnées» d’une telle décision. «En général, l’Algérie a deux principes inaliénables en matière de prise en charge de ses ressortissants vivant à l’étranger et frappés par une décision d’expulsion. Le premier est l’obligation consacrée par la Constitution de protéger ses ressortissants vivants en dehors de son territoire, et ce, quelle que soit leur situation. Le deuxième principe est la réadmission de ces derniers dans le cadre du respect de la réglementation internationale en la matière», expliquent nos interlocuteurs, sous couvert de l’anonymat. Selon eux, tout pays est souverain dans ses décisions, s’il estime nécessaire d’expulser des personnes étrangères vivant sur son sol. «Chaque pays est souverain, mais il doit respecter les conditions en matière de réadmission. Cependant, il y a des conditions à respecter. L’Algérie n’a jamais refusé d’accueillir ses ressortissants expulsés par des pays tiers. Elle exige que la question de l’accueil soit traitée au cas par cas, qu’il y ait une vérification, par les soins de ses services, de l’identité de l’expulsé et que ce dernier ait épuisé toutes les voies de recours contre son expulsion», révèlent nos sources. Elles précisent que «des pays comme l’Allemagne, l’Italie ou encore l’Espagne, ont bien compris la préoccupation de l’Algérie, qui agit dans le cadre du respect de la réglementation internationale. Elle a refusé un rapatriement en groupe et sans aucune vérification. Les partenaires ont fini par comprendre. Les expulsés ont été réadmis au cas par cas». Nos interlocuteurs rappellent la gestion du dossier des Algériens détenus à Guantanamo qui, à leurs yeux, est «le meilleur exemple de gestion» : «Le cas de Guantanamo est un exemple à rappeler. Au début il y a eu une grande polémique, parce que les Américains voulaient renvoyer les 28 Algériens arrêtés en Irak, en Bosnie, au Pakistan et en Afghanistan, en imposant ce qu’ils appellent des garanties diplomatiques qu’ils ne puissent plus constituer une menace à travers des mesures de sécurité. En clair, l’Algérie devait accepter de maintenir en détention les mis en cause, de leur refuser tout document de voyage et d’assumer toute responsabilité quant à leur agissement à l’égard des Etats-Unis. Pour les autorités algériennes, le seul traitement qui pouvait être réservé à ces personnes était de leur appliquer la loi. Les négociations ont duré longtemps avant que les Américains ne décident d’accepter de gérer le dossier au cas par cas et d’abandonner les garanties diplomatiques. Les détenus de Guantanamo, faut-il le rappeler, ont un statut de considérés de combattants ennemis sur lesquels ne s’applique pas la législation américaine. Ils sont soumis aux lois de la guerre. Sur les 28 Algériens identifiés comme tels, aujourd’hui, il ne reste dans cette prison que deux seulement et pour des raisons indépendantes de la partie algérienne. Les autres détenus sont rentrés au pays. Ils ont été entendus par la justice et seulement un seul a fait l’objet de poursuites par contumace. Les autres n’étaient pas cités dans les affaires de terrorisme en Algérie. Bon nombre d’entre eux ont été remis en liberté. Il est clair que l’Algérie ne peut être concernée par les mises en garde, si mises en garde il y a.» En fait la question de l’immigration clandestine n’a cessé d’être le sujet phare des campagnes électorales américaines, sans toutefois, dépasser ce cadre. Le dernier rapport, publié en septembre par le Centre d’étude des migrations, a avancé le nombre de 10,9 millions d’immigrés clandestins installés aux Etats-Unis, avec un recul par rapport à 2003, où ils étaient un peu plus de 11 millions. Les Mexicains viennent en tête avec plus de la moitié de cette population. Lors de la dernière campagne électorale, le candidat Donald Trump s’est plaint des pays qui «refusent de reprendre» leurs ressortissants expulsés et «que nous acceptons de garder» et a promis : «Cela ne se passera pas comme ça avec moi une fois élu.» Une fois à la Maison-Blanche, Trump a décidé, par décret, d’interdire l’accès à son pays aux citoyens de sept pays musulmans, la Libye, le Soudan, la Syrie, l’Irak, l’Iran, le Yémen et la Somalie, créant ainsi un précédent dans le monde.
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