samedi 17 juin 2017

La Turquie assoie sa réputation médicale

Ces dernières années, les hôpitaux turcs ont été les plus prisés par les cancéreux et les malades nécessitant une transplantation d’organe, en témoignent les patients rencontrés au centre médical Anadolu. Les médecins algériens sont compétents, ils n’ont pas besoin de notre assistance. Mais nous travaillons ensemble dans le cadre d’un partenariat et d’échanges de connaissances», confesse le docteur Hasim Ustunsoy, chef de service cardiovasculaire au centre médical Anadolu, en Turquie, devant un parterre de journalistes algériens invités fin mai dernier à visiter le centre hospitalier situé à quelque 40 kilomètres du centre d’Istanbul. L’avis de ce spécialiste n’est pas partagé par les malades algériens qui arrivent généralement dans les hôpitaux turcs à un stade avancé de la maladie, et ce, faute d’une prise en charge sérieuse. Ces patients sont souvent traînés d’une structure à une autre, et face aux difficultés d’accès aux soins, ils optent pour l’étranger. Ces dernières années, les hôpitaux turcs ont été les plus prisés par les cancéreux et les malades nécessitant une transplantation d’organe, en témoignent les patients rencontrés au centre médical Anadolu. Une infrastructure hospitalière impressionnante surtout par ses offres de soins basés sur des équipements de hautes technologies. Toutes les spécialités médicales sont pratiquées dans cette enceinte. L’Anadolu Medical Center a signé une seule convention avec l’hôpital militaire de Aïn Naadja sur la base de laquelle le chef du département cardiovasculaire d’Anadolu se déplace en Algérie pour opérer des enfants souffrant de pathologies cardiaques et vice versa. L’intérêt de cet hôpital réside dans le fait qu’il offre des prestations médicales pointues, tels que la chirurgie robotique et le traitement de tous les types de cancer, et ce, à des prix inférieurs à ceux pratiqués par des établissements de même rang de par le monde. Ce centre a pris en charge, depuis sa création en 2005, plus de 20 000 patients étrangers venus essentiellement des pays scandinaves, de l’Europe de l’Est, d’Afrique du Nord, des pays du Golfe, de la Bulgarie, la Roumanie, la Russie, du Pakistan, de l’Algérie et aussi d’Angleterre et des Etats-Unis. Les patients de ces deux derniers pays, dont le système de santé est très développé, choisissent le centre Anadolu ,car il répond aux standards de leur pays et de surcroît à des prix beaucoup moins cher. La santé n’a pas de prix «Certes, nul ne peut contester le fait que les Américains et les Britanniques ont un système médical des plus développés et ils préfèrent se soigner chez eux. Seulement pour les pathologies lourdes, il y a une forte demande et certains patients qui se trouvent sur la liste d’attente ne veulent pas attendre et optent ainsi pour notre établissement», explique le docteur Fatih Agalar, professeur en chirurgie générale. Contrairement aux Algériens, les Britanniques et les Américains ont une assurance médicale, ainsi le coût du traitement ou de l’intervention leur revient beaucoup moins cher. Mais pour les patients algériens, en l’absence d’une convention entre la CNAS et les hôpitaux, ils y vont par leurs propres moyens. Les plus démunis sont aidés par des associations et des âmes charitables. Des parents vendent souvent leurs biens pour permettre à un de leurs malades d’aller se soigner en Turquie. La santé pour eux n’a pas de prix. S’agissant de la demande des Algériens, elle est axée essentiellement sur les départements d’urologie, d’oncologie et de cardiologie. Ils se soignent généralement pour des cancers du poumon, du sein et du colon. «Notre centre d’oncologie est une référence, et ce, pas uniquement en Turquie, mais aussi ailleurs, notamment au Moyen-Orient. D’ailleurs, nous recevons beaucoup de patients algériens», explique Cemil Hygur, spécialiste en urologie. Sa devise est de sauver un organe en recourant le moins possible à l’ablation. Selon Amel Bouhadjar Goyildar, spécialiste du service international à Anadolu, les services d’oncologie pédiatrique et de chirurgie cardio-vasculaire reçoivent de plus en plus d’enfants algériens. Le coût des soins, d’après les malades, est très élevé, mais il reste très largement inférieur à ceux pratiqués en France. A titre d’exemple, une greffe d’organe coûte en moyenne dans les 65 000 euros en Turquie contre 350 000 euros en France ou dans d’autres pays européens. Pour Amel Bouhadjar, le prix des traitements et des examens est de 30% moins cher qu’en Europe. Le visa en 24h, une aubaine A la différence de la France, la Turquie délivre le visa en 24 heures, une aubaine pour les malades. Le maillon fort de cet hôpital est le traitement qu’il réserve aux malades avant même leur déplacement en Turquie. Sur un simple contact par courrier électronique, le malade reçoit gratuitement un avis médical et bien sûr une estimation du coût de l’intervention. A partir de là, le malade et ses proches sont assistés dans les démarches pour le voyage et le choix de l’hôtel situé à proximité de l’hôpital. Le patient est pris en charge du premier contact jusqu’à ce qu’il quitte l’hôpital. Tous les malades que nous avons rencontrés à Anadolu ont remis en cause le système de santé algérien. Ils ont qualifié, sans aucune hésitation, de «mouroirs» nos hôpitaux et n’ont pas caché leur consternation concernant l’indifférence et le mépris de certains médecins. Un sexagénaire résidant à Bouzaréah (Alger) nous raconte son calvaire. Il souffrait au début d’une toux gênante et s’est retrouvé avec des complications en raison d’un faux diagnostic. Ses déboires ont commencé en 2014, lorsque les médecins ont soupçonné une tuberculose qu’il a pourtant bien traitée au CHU de Beni Messous. Mais une année plus tard, il a commencé à ressentir une douleur au niveau du thorax et à avoir une toux insupportable. Il a consulté des généralistes, puis des pneumologues dans le privé et le public et tous ont conclu à une simple bronchite. En dépit du traitement prescrit, son cas ne s’est pas amélioré, bien au contraire, il s’est aggravé puisque, dit-il, il a traîné une «tumeur pendant deux ans» et que personne n’a vue. Très remonté contre le corps médical, ce sexagénaire accuse certain médecins d’être tout simplement des «commerçants». «Aucun médecin n’a pris la peine d’examiner sérieusement mes bilans médicaux et mes radios, aucun d’eux ne m’a demandé un scanner au regard des symptômes que je présentais. Et en définitive, c’est un simple médecin de garde qui a pu détecter ce que les spécialistes n’ont pas vu», raconte-t-il. Ce médecin de garde lui a recommandé un scanner et une biopsie. Il a tenté de faire son scanner à Tizi Ouzou, où un des rares Pet-Scan était disponible, mais il n’a pas pu le faire en raison d’une indisponibilité de charge de l’appareil. Un ami lui a alors conseillé, pour un traitement sérieux, la Turquie. Ses amis et ses proches l’ont aidé en prenant en charge toutes les étapes de son déplacement à l’Anadolu Center où il avait la possibilité de «faire le scanner et d’avoir les résultats en 48 heures». Malgré des séances de chimiothérapie, la prise en charge ayant été tardive, son cas s’est aggravé. Le cancer, dit-il, a atteint aujourd’hui la tête. «J’ai abandonné mon travail et je me rends en Turquie tous les deux ou trois mois pour des contrôles…». L’autre cas est celui d’une Algérienne souffrant de douleurs d’estomac, les médecins consultés ont chacun donné leur propre diagnostic. Certains ont soupçonné une tumeur, mais au lieu d’une prise charge immédiate, ils lui ont donné rendez-vous pour des mois plus tard. Ces parents qui sont à l’abri du besoin ont décidé de l’évacuer en Turquie. «A l’Anadolu Center, ma sœur a subi en deux jours une batterie d’analyses et plusieurs radiologies, les médecins ont conclu que c’était un problème d’appendicite et non une tumeur», raconte, soulagé, le frère de la patiente. 

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