mercredi 20 juin 2018

Manœuvres politiques en toile de fond

Arrivés hier à Vienne pour préparer la réunion de l’Opep qui s’ouvrira vendredi prochain, les ministres des pays membres de l’Organisation sont face à un véritable dilemme qui conditionnera l’avenir du marché pétrolier. La prise de décision en faveur d’une augmentation de la production ou un choix orienté vers le statu quo sont, en effet, les deux options qui s’affrontent au sein de l’Opep, avec en toile de fond de nombreuses interférences politiques représentées notamment par les déclarations belliqueuses du président américain, les relations conflictuelles irano-saoudiennes et la position russe. Les Etats-Unis et la Russie sont de la partie forcément. Les premiers voulant casser ce qu’ils qualifient de «chantage» de la part de l’Opep et prêchant pour le camp des pays consommateurs — quoique les prix attractifs font le bonheur des producteurs de schiste américains — le second est écartelé entre son soutien à l’Opep et les pressions de ses compagnies pétrolières qui aspirent à augmenter leur production dans un marché plutôt revigoré. L’Arabie Saoudite, pour sa part, a opéré un net revirement dans ses positions, passant d’un soutien à l’option de prix plus élevés du baril de pétrole — pour soutenir notamment l’entrée en Bourse de son fleuron Aramco — prévue en 2019, à une récente position — empreinte d’arrière-pensées politiques — orientée vers la révision à la hausse des quantités de brut mises sur le marché par l’Opep. Une position devenue subitement ambiguë mais largement calée sur les positions des Etats-Unis qui viennent de dénoncer l’accord sur le nucléaire iranien, ajoutant ainsi aux incertitudes quant à la tendance du marché dans les mois à venir. La menace de nouvelles sanctions américaines sur les ventes de pétrole iranien, ajoutée à la chute de la production pétrolière du Venezuela pourraient faire chuter la production combinée d’environ 1,5 million de barils par jour, soit près de 30%, d’ici la fin de l’année prochaine, selon un scénario envisagé par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), qui conseille les pays consommateurs. De ce fait, la Russie a suggéré une augmentation jusqu’à 1,5 million de barils par jour, ce qui compenserait à peu près le montant qui, selon l’AIE, pourrait être perdu par le Venezuela et l’Iran. Pourtant, il est possible, selon ce que signale l’agence Bloomberg, que les pertes au sein de l’OPEP soient plus faibles que prévu, d’où un risque que l’Organisation, qui aura mal jugé l’augmentation de la production, se retrouve face à un scénario de forte chute des prix. Une erreur que l’Organisation des pays exportateurs de pétrole a faite auparavant et qui lui a valu de payer un coût très élevé.

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