Après l’attentat kamikaze de dimanche contre un commissariat à Constantine, certains habitants de cette wilaya de l’est du pays ont manifesté leur crainte à l’idée d’un retour du terrorisme. Si l’on considère qu’un attentat est censé produire un effet de terreur au sein des populations, celui de Constantine devrait décevoir ses initiateurs. Hier, au lendemain de l’attentat kamikaze ayant ciblé le commissariat du 13e arrondissement, près du centre-ville, peu de gens avaient accordé un point d’orgue à cette histoire, reléguée dans les discussions des chaumières, par le comportement royal du cortège du chef d’état-major, ayant bloqué trois heures durant l’économie de la ville et la libre circulation des citoyens, ou encore l’assemblée générale de la FAF et l’espoir de destitution de Raouraoua. Pour le reste, les Constantinois ont vaqué à leurs occupations, comme si de rien n’était.quelques citoyens parmi les plus avertis, que nous avons interrogés, ont manifesté leur crainte à l’idée d’un retour aux années du terrorisme. En plus de la peur, ils ont exprimé leur incompréhension sur l’attentat de dimanche. Un attentat assez osé avec un procédé inédit, il faut le dire, et qui du reste ne correspond à aucune dynamique terroriste dans la région. Car même du temps de l’activité terroriste dans les années 1990, jamais à Constantine on a enregistré une action de ce genre. Une action qui aurait pu produire un bilan macabre très lourd, compte tenu de la charge explosive et la densité de la population dans le quartier de Bab El Kantara. Il faut dire aussi que le terrorisme a été vaincu à Constantine au début de 1998, et la ville nettoyée des groupuscules de l’AIS et ensuite du GIA, qui avaient semé la terreur des années durant. Une pacification qui semble rompue, non pas brutalement, mais progressivement depuis quelque temps. Depuis 2014, les services de sécurité suivent de près un groupe qui tente de s’installer sur les hauteurs de la ville, précisément dans la forêt de Djebel El Ouahch. Les éléments de l’ANP ratissent le massif à chaque fois que des déplacements du groupe sont signalés. Des casemates ont été détruites et des vivres découverts, preuve de l’existence d’un soutien logistique local. En janvier dernier, l’armée avait découvert 17 kg de TNT, toujours à Djebel El Ouahch, ce qui renseigne sur le sérieux et l’ampleur de la menace. Parfois aussi, des mines antipersonnel explosent sur le passage des soldats, il en résulte des pertes humaines, comme en avril 2016, quand l’explosion d’une mine dans la même forêt avait tué trois jeunes soldats. Le point culminant de cette menace a été l’assassinat d’un officier de police, le 27 octobre dernier, par deux terroristes dans un restaurant de la cité Ziadia, non loin de Djebel El Ouahch. Un attentat vaguement revendiqué par Daech et dont la stratégie de filiation n’est guère établie. On tente alors laborieusement de trouver une explication à l’attentat-suicide de dimanche. A-t-il un lien avec le rendez-vous électoral de mai prochain, comme l’affirme le ministre de l’Intérieur, Noureddine Bedoui ? L’idée fait sourire, parce qu’elle insulte un tantinet l’intelligence des Algériens. Par contre, lier cet attentat à la visite du chef d’état-major à Constantine ne manque pas de pertinence, mais il faut davantage de temps pour voir plus clair. Les communiqués laconiques émanant des autorités ne permettent pas d’identifier le responsable de l’attentat, encore moins ses motivations. Encore faut-il savoir s’il s’agit d’un loup solitaire ou d’un groupe structuré, avec un plan d’action à court, moyen ou long terme. Se hasarder à formuler des thèses ne peut que conduire à des conclusions simplistes qui brouilleront davantage la visibilité. En revanche, on peut se fier à une certitude : la bête immonde n’est pas morte. Elle est tapie dans l’ombre et peut frapper à n’importe quel moment. L’attentat de Constantine, s’il a servi à quelque chose, c’est de rappeler aux esprits, notamment aux services qui veillent à la sécurité des Algériens, que la vigilance doit être toujours de mise, elle est très précieuse.
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