jeudi 2 mars 2017

«La bombe à retardement c’est le fait que l’économie ne repose pas sur le travail»

- Le taux de natalité a sensiblement augmenté ces dernières années. Cette tendance reflète-t-elle une vraie amélioration des conditions de vie des ménages, ou s’agit-il tout simplement du résultat du baby-boom des années 1980 ? Je constate avec surprise que les observateurs soulignent l’augmentation du taux de natalité, mais ne parlent pas de la baisse de l’emploi féminin. De la même façon, ils ne parlent pas de la reprise des programmes de logements qui permettent à ceux qui en bénéficient de se marier. Il y a aussi le phénomène de la «reprise» des naissances après les années de conflit, durant lesquelles les Algériens et les Algériennes étaient surtout préoccupés à survivre. - Est-ce une bonne chose pour l’Algérie, ou s’agit-il d’une bombe à retardement ? J’aimerais bien répondre à votre question. Est-ce un bien ou un mal, mais par rapport à quoi ? Par rapport à un développement économique qui se résume à surveiller les prix du pétrole ? Par rapport à la densité au kilomètre carré ? S’il me faut répondre à cette question, je dirais qu’il y a en Algérie des territoires à développer. La jeunesse de notre population est de ce fait une chance. Si nous ne développons pas nous-mêmes ces territoires, les Chinois ou d’autres le feront. Pourquoi nous définir en référence aux injonctions et aux modèles du monde occidental ? La politique de contrôle des naissances, aujourd’hui, m’intéresse davantage du point de vue de la rationalité des familles, de la santé et du droit des femmes sur leurs corps… Ce qui me semble une bombe à retardement, c’est le fait que l’économie ne repose pas sur le travail, que nos consommations dépendent de notre accès différencié à la rente pétrolière… - L’évolution des indicateurs liés au mariage et la procréation reflète-t-elle une évolution de la famille algérienne ? Pourquoi, selon vous, les politiques de développement lancées depuis des années ne prennent pas en considération cette évolution démographique ? La formulation de votre question montre combien les propos des autorités en la matière tiennent du bégaiement. J’ai l’impression, en lisant les déclarations actuelles sur ce thème, d’être revenue aux années 1970. Il y a là un déni de l’histoire, du devenir des sociétés et des mutations familiales. Il n’y a que dans les sociétés mortes que les individus, les familles, les groupes ne changent pas. J’ose croire que nous sommes encore vivants… Même si les autorités semblent l’ignorer.

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