mercredi 22 novembre 2017

Béjaïa : Assirem, Tafath… des indépendants en conquérants

A chaque rendez-vous électoral, les indépendants se rendent visibles et nombreux dans la compétition, bousculant maires-candidats et chapelles politiques. Le phénomène, qui n’est pas nouveau à Béjaïa, a pris de l’importance cette fois-ci avec une nouvelle donnée : la mobilisation d’animateurs du mouvement associatif qui se lancent dans l’aventure électorale. La liste indépendante Assirem de Tazmalt fait parler d’elle depuis le rejet contesté de la candidature de sa tête de liste Fatah Redjdal, un militant associatif dynamique connu des Tazmaltis. Elle s’engage sur le terrain difficile d’une commune qu’a longtemps dirigée le maire-candidat Smail Mira. La liste Assirem (Espoir) est constituée d’acteurs de plusieurs associations locales qui lancent le défi de reconstruire Tazmalt et de l’arracher au «despotisme». Sa particularité est qu’elle réunit plusieurs présidents d’association. «Nous sommes indépendants et à 90% des acteurs du mouvement associatif. Personne n’est militant d’un parti politique», affirme Fatah Redjdal, dont le rejet du dossier a servi de carburant à toute l’équipe et a drainé un élan de sympathie et de solidarité de la population durant la campagne. Le cachet d’«indépendants» semble redonner le crédit que perd la chose politique. «Nous sommes contre le parrainage. Ce n’est pas à deux doigts que nous allons plonger dans un parti politique», répond Fatah, ex-militant d’un parti. La collecte des signatures n’a pas été un écueil pour Assirem. Le contraire l’aurait poussé à chercher un parrainage. «Ce serait dans ce cas juste une casquette politique», nous répond-il. Le discrédit dont on accable les partis politiques a encouragé le phénomène des listes indépendantes. «Le FLN, par exemple, a fait sa campagne au nom de sa tête de liste ou avec son numéro. Il n’a pas mis en avant son sigle», nous dit-on à Tazmalt. Ce contexte reste plus ou moins profitable aux indépendants dans certaines régions, comme dans cette commune à la frontière sud de la wilaya de Béjaïa, où «l’ennemi» est le «maire-sortant-revenant». «Nous avons quatre adversaires et un ennemi», confirme Fatah qui fait office de parrain de la liste. «Avec les quatre autres listes, nous voulons construire Tazmalt, ce sont nos frères», ajoute-t-il. Le rassemblement du mouvement associatif a cela d’avantageux qu’il permet de pouvoir compter sur un électorat qui fait sa base. Et cela donne de l’optimisme à Assirem. «Nous allons l’écraser dans les 41 bureaux de vote de la commune», prédit Fatah Redjdal. Le modèle de gestion que l’on présente se résume à cela : «Gérer l’APC comme une association.» Et lorsque les associations ont eu le temps de montrer leur dynamisme, dans le cadre du bénévolat et de la gestion horizontale, l’espoir est permis. A Aokas aussi, la liste indépendante Tafath n Aokas (Lumière) est dans cette logique et dynamique. Elle englobe des animateurs qui se sont distingués dans des actions du mouvement associatif dans la commune, comme le Café littéraire, l’association des Aït Aïssa, l’initiatrice du projet du théâtre de verdure et le mouvement pour la protection de la bande boisée. Tafath, qui allait être la liste du PST, s’est émancipée des sigles de partis pour pouvoir s’élargir à divers horizons. «Nous avons préféré aller au-delà», explique Hamou Aidali, tête de liste. Selon lui, plus de la moitié de la liste est une composante de militants associatifs. «La question de la bande boisée mérite qu’on engage un combat plus large, elle nous tient à cœur», confie-t-il. Le combat pour la préservation de la bande boisée a rassemblé les énergies des candidats sur cette liste pour qui le statut d’élus sera un atout. «Au-delà de la cause de la bande boisée, nous avons le souci de reconstruire le mouvement associatif qui est indispensable pour contrecarrer le bradage», ajoute Hamou Aidali. Les jeunes de Tafath, comme ceux de Assirem, ambitionnent de créer de nouveaux rapports de force. A Aokas, les adversaires sont nombreux, cinq listes partisanes et une autre indépendante qui pèseront de leurs poids. A Akfadou, Boualem Amoura, le secrétaire général du Satef, mène une liste indépendante, la seule dans sa commune. Il le fait sous ce même cachet pour la troisième fois, depuis 2007 : «J’en fais un défi.» Pour avoir été un ancien d’un parti, il refuse de rejoindre une quelconque chapelle politique. «Je resterai toute ma vie indépendant, c’est un principe», se confie-t-il, considérant que le passage par le recueil des signatures est un test utile. Sa liste n’est pas celle des associations, mais l’on a compris que le mouvement associatif — que même les partis politiques ont dragué pour ces élections — est une carte gagnante. «C’est une exigence, nous allons travailler avec eux. Ils peuvent apporter beaucoup pour la commune», note-t-il. Ensemble Bougie, la liste de Mohamed Mansouri, le directeur général du CHU d’Oran, pour l’APC de Béjaïa, fait aussi parler d’elle. Elle a l’ambition d’évincer le FLN de la mairie et de concurrencer les grosses cylindrées parmi les partis politiques. Mohamed Mansouri aussi est un ex d’un parti politique. «Nous avons lancé un appel ouvert à la population pour confectionner une liste indépendante», nous explique-t-il, prenant l’exemple des listes indépendantes qui «ont montré leur savoir-faire». A Ensemble Bougie, on se félicite même qu’on ait réussi à intéresser «des jeunes qui ne connaissent même pas la définition de politique». L’intérêt est tourné vers les associations auxquelles il est proposé une occasion de «concrétiser leurs projets dans un cadre managérial» à travers le canal de l’Assemblée populaire communal. Beaucoup d’autres listes indépendantes se sont formées, ou ont tenté de le faire, autour du vivier associatif. Certaines, de guerre lasse, ont été amenées à se mettre sous la coupe de sigles partisans, acculées par la lourde exigence administratives du recueil de signatures. Elles l’ont fait même pour des parrainages contre nature. Il est attendu d’elles de se débarrasser de leurs sigles le 23 novembre au soir.  

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