Le respect de la loi. Telle est la raison officielle de la saisie du tribunal administratif par le ministère de la Communication pour s’opposer à l’achat du groupe de presse El Khabar par Issad Rebrab. La seule et unique raison, insiste le ministre de la Communication. «L’agrément est incessible. Le nouveau propriétaire doit demander un nouvel agrément, a déclaré Hamid Grine aux journalistes hier à Constantine. Nous allons gérer cette affaire sans passion ni émotion. C’est une affaire strictement commerciale. La loi de la République est au-dessus de tout le monde et le dernier mot reviendra à la justice.» Mais les faits malmènent l’argumentation du ministre. Le 13 octobre 2014, nos confrères d’El Khabar accusaient en une du journal le ministre de la Communication de faire pression sur les annonceurs publicitaires privés. Le ministre dément. Mais les recettes publicitaires du quotidien s’effondrent. Reporters sans frontières (RSF) publie alors un communiqué et s’inquiète du retrait de «plusieurs annonceurs publicitaires sous la pression» et de «la chute conséquente des recettes publicitaires de quotidiens critiques envers le pouvoir algérien», ce qui «participe à l’étouffement des médias libres». Aujourd’hui, le rachat d’El Khabar par Issad Rebrab, une transaction de 4 milliards de dinars, devait permettre au journal de souffler. Mais le gouvernement en a décidé autrement. C’est la première fois qu’il s’interpose dans une transaction commerciale qui concerne le secteur de la presse. «Le ministre de la Communication n’a aucune qualité pour interférer dans une opération commerciale», estime Nourredine Benissad, président de la Ligue de défense des droits de l’homme. Comme d’autres observateurs, il s’étonne de l’absence de réaction des autorités face à d’autres hommes d’affaires qui possèdent plusieurs titres de presse. «On constate qu’il y a deux poids deux mesures avec la loi. Il y a ceux qui travaillent librement, pourvu que leur ligne éditoriale caresse dans le sens du poil, alors que certains ne peuvent pas lancer un média lourd. Cette affaire révèle une intention de contrôler les lignes éditoriales», note-t-il. Si la vente est annulée par le tribunal administratif, les problèmes financiers d’El Khabar resteront très importants. Trop importants peut-être pour parvenir à survivre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire