dimanche 28 août 2016

«Impliquer tous les partenaires dans l’établissement des listes»

Le Premier ministre a annoncé que la disposition fixant l’âge de départ à la retraite à 60 ans «peut être allégée pour les métiers pénibles». Un texte prévoyant cette situation existe, mais n’a jamais été appliqué. Pourquoi, selon vous ? Il est clair que de nombreux salariés ne peuvent continuellement prolonger l’exercice de leur métier et arrivent à l’âge de la retraite dans des conditions physiques diminuées, comme il est clair aussi que ne pas avoir décidé de traiter de la question de la pénibilité relève de l’injustice… La pénibilité est une question dont on ne peut s’entêter à négliger la réalité et nous ne  pouvons, cependant, parler des métiers pénibles sans évoquer la pénibilité du travail. Elle est liée étroitement à la santé et la sécurité au travail. Revenons à la question d’un texte prévoyant cette situation ; à ma connaissance, au plan national, aucun texte spécifique sur la question de la pénibilité des métiers n’a été adopté par la législation algérienne. Par contre, l’article 4 de l’ordonnance n°96-18 du 6 juillet 1996 modifiant et complétant la loi n° 83-12 du 2 juillet 1983 relative à la retraite évoque la possibilité du bénéfice de la pension avant l’âge pour les travailleurs occupant un poste de travail présentant des conditions particulières de nuisance. Le bénéfice de cette réduction d’âge devra donner lieu à des cotisations de  rachat à la charge de l’employeur et la liste des postes concernés ainsi que les âges correspondants et la durée minimale passée dans ces postes devront être fixés par décret exécutif et que les taux de cotisations de rachat devront être fixés par voie réglementaire (des textes non encore adoptés à ce jour). Une commission est mise en place par l’UGTA pour préparer une liste des métiers pénibles. Quels sont les critères à prendre en compte ? Il faut d’abord impliquer tous les partenaires sociaux sans exception, y compris le patronat car il s’agit d’une question d’ordre national, et élaborer en parallèle une étude actuarielle par l’implication de chercheurs universitaires ayant une expérience assez large dans le domaine académique, bien sûr en étroite collaboration avec tous les secteurs d’activité pour ensuite donner une définition précise des concepts de «métier pénible» et «travail pénible». Tels sont les préalables pour l’élaboration des critères. De manière générale, il me semble qu’il faut prendre en considération les contraintes physiques (manutention de charges, effort physique, postures pénibles…) ; l’environnement physique agressif (expositions, inhalations…) ; l’organisation et le rythme de travail (tel le travail de nuit sous certaines conditions, le travail successif…) et enfin le critère géographique (Sud, Haut-Plateaux…) Les difficultés financières des différentes caisses, particulièrement la Caisse nationale de retraite (CNR), nécessitent une réforme du système. Lesquelles, selon vous ? Le débat actuel sur la réforme du système de retraite nous interpelle sur la relation entre pénibilité du travail et politiques de retraite. Il y a lieu de souligner que cette préoccupation n’est pas spécifique à l’Algérie et que ces dernières années, dans beaucoup de pays, les réformes des systèmes de retraite sont devenues une préoccupation majeure, soit à la suite des changements démographiques, soit à la suite des mutations du marché du travail ou suite aux crises économiques et financières que traversent ces pays ; dans beaucoup de cas, c’est l’interaction de deux ou trois raisons citées, à l’exemple de notre pays. Toutes ces conditions créent une certaine pression sur le système de retraite à laquelle une réforme adéquate «urgente» et non à la «hâte» peut remédier. Cette réforme, qui doit intégrer la pénibilité de la carrière dans le calcul des droits à la retraite, doit être élaborée en tenant compte de certains enjeux liés à l’emploi de jeunes et des travailleurs âgés, et répondre à la question d’une prestation équitable pour les travailleurs les plus exposés pendant de longues périodes à un environnement de travail des plus pénibles, donc un système de retraite ou de préretraite conçu spécifiquement pour les travailleurs qui ont évolué dans les conditions difficiles prenant en considération la perspective de compensation, c’est-à-dire de réparation des conditions de travail ayant un impact sur la santé des travailleurs.

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