mercredi 31 août 2016

Rush sur le marché de M’dina J’dida à Oran

A M’dina J’dida, plusieurs étals, d’habitude réservés à des effets vestimentaires féminins, se sont transformés, cette dernière semaine, en large comptoir bric-à-brac réservé exclusivement à la vente de fournitures scolaires. On y trouve de tout : cahiers de différentes épaisseurs, avec des pages de garde «alléchantes» allant des super-héros et jusqu’à l’improbable drapeau anglais. Les incontournables règles sont toujours là et n’ont pas changé d’apparence depuis des lustres, mais le nouveau marketing a quand même pu proposer de nouveaux modèles et en faire des objets de convoitise, à l’image de règles à l’effigie de Bob l’éponge, Hello Kitty, Ben 10 et Superman. Les stylos à bille sont indétrônables et affichent toujours leurs couleurs scolaires : bleu, rouge et vert. Deux choix pour les cartables : entrée de gamme ou moyenne gamme. Opter pour l’une ou l’autre est une question de bourse. Les trousses sont au choix, mono ou multi couleurs et sont presque toutes à ouverture zip, celles en bouton-poussoir ou aimantées ne sont plus à la mode. Les crayons à tête de gomme sont toujours très prisés et les gommes, que beaucoup d’enfants aiment mordiller, sont proposées à la vente en pièce ou compris gratuitement dans un lot en trousse. Personne ici ne pose la question de savoir si les produits sont dangereux ou pas ou s’ils sont toxiques. Ici on est appâtés par les prix, la principale clientèle étant à faible ou moyen revenu et le produit sain est le dernier de ses soucis. Les mères principalement, flanquées de leurs enfants, adorent négocier les prix, mais rien n’y fait, les vendeurs se sont comme passé le mot et répètent inlassablement la même rengaine «mafihèch», en d’autres termes le bénéfice est réduit au minimum. Des stylos et des crayons à 10 DA pièce, des trousses sont proposées entre 100, 200 et 500 DA. Les cartables, sac-à-dos principalement, sont vendus de 600 à 2500 DA, et sont de provenance chinoise, turque ou locale. Quant aux blouses, qui sont obligatoires, bien évidemment rose ou bleu selon le sexe, presque toutes les familles en achètent de nouvelles. Les prix sont compris entre 400 DA et jusqu’à 3000 DA, selon le textile et la couture, celles en nylon sont évidemment les moins chères. Avec la forte inflation et la chute libre du dinar, les familles oranaises sont mises à rude épreuve. Le budget à réserver pour la rentrée scolaire, pour un seul enfant, est compris entre 3000 et 8000 DA. Un père de famille ayant un salaire de 40 000 DA, un seul enfant, les charges multiples à payer (nourriture, électricité, ménage, habillement, transport…), sans compter les «aléas» du Ramadhan, l’Aïd El Fitr, les vacances d’été et l’Aïd El Kebir, se retrouve rapidement dans la zone si inconfortable de la pauvreté. Des familles préfèrent cependant se rendre dans des magasins spécialisés, dont une enseigne en particulier exclusivement destinée à la vente des articles scolaires et tous les produits en rapport avec la pédagogie et l’enseignement. Des supérettes aux supermarchés, l’ambiance est en mode rentrée scolaire avec des PLV (publicité sur lieux de vente) savamment dosées et destinées à attirer une clientèle qui fait ses emplettes pour elle et pour ses enfants. De l’avis de tous, cette rentrée semble très préoccupante : malaise social, inflation et dépenses de plus en plus lourdes. Des lendemains qui déchantent. «Nous, de notre temps, les articles scolaires étaient vendus chez des buralistes spécialisés et non pas sur le trottoir. Ce n’est pas possible, comment en est-on arrivé là !» Ces mots, d’un citoyen d’un certain âge, en colère contre le spectacle de la vente à la criée de stylos, cahiers et trousses, résument à eux seuls la situation de «démocratisation» du business des articles scolaires, monopole de l’Etat jusqu’à la fin des années 1980.

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