dimanche 29 octobre 2017

L’étrange volte-face du gouvernement

Curieux revirement du ministère de la Communication. Deux semaines seulement après avoir lancé l’appel à candidature pour l’octroi d’autorisation de création de chaînes de télévision thématiques, formulé dans un arrêté publié au Journal officiel, le ministre de la Communication, Djamel Kaouane, revoit sa copie. Il juge après coup nécessaire de «réétudier» le projet. Une explication peu convaincante. Est-ce que cela voudrait dire que l’appel a été lancé précipitamment, sans étude sérieuse ni réflexion préalable ? Ce qui, en soi, est une anomalie qui renseigne sur le peu d’importance accordé à ce «dossier». A ce niveau de responsabilité, cela s’apparente à du bricolage. Mal échafaudé ? Ou bien s’agit-il d’autres raisons non assumées qui seraient à l’origine de cette volte-face du ministre de la Communication ? Lancer des chaînes thématiques aurait commandé des chaînes déjà existantes un alignement. D’évidence, la démarche annoncée puis ajournée aurait vite impacté le paysage audiovisuel dominé par des chaînes de télé offshore et de droit étranger. Un pari risqué pour le pouvoir politique, à un peu plus d’une année de l’élection présidentielle. Les chaînes de télé privées existantes qui lui sont totalement acquises constituent un bras médiatique redoutable pendant la période électorale. Mieux contrôler et mieux soumettre Il n’est pas dans l’intérêt des décideurs politiques de chambouler la carte de l’audiovisuel actuelle, tout comme ce n’est pas le souhait des patrons de ces chaînes de télévision de se conformer à une nouvelle architecture de la loi – thématiser – de peur de perdre de l’influence et des parts de marché. Le rétropédalage du ministre Djamel Kaouane s’apparente manifestement à une «volonté» de maintenir le statu quo audiovisuel. Ne pas changer l’image. La «concertation» avancée par le ministre justifiant le report de l’application de l’arrêté n’est qu’un fallacieux prétexte. L’autre inquiétude qui aurait contraint le ministre de la Communication à abandonner le projet – du moins «momentanément» – serait de voir de nouveaux acteurs médiatiques arriver sur le marché. D’autant que certains hommes d’affaires, connus pour leur distance vis-à-vis du pouvoir politique, expriment leurs ambitions d’investir dans l’audiovisuel. Les décideurs verraient d’un mauvais œil l’arrivée de nouveaux acteurs critiques. Il faut rappeler que l’ouverture des chaînes privées, que le pouvoir politique a «tolérée» au lendemain des révoltes qu’a connues la région à partir de 2011, n’était pas une motivation de conviction. Pis encore. Une ouverture par effraction avec une velléité de mieux contrôler pour mieux soumettre. «Nous ne voulons pas refaire l’expérience de la presse écrite avec des journaux émancipés», avouait un ancien ministre. Depuis sa nomination à la tête du ministère de la Communication, Djamel Kaouane n’a pas esquissé les contours d’un «programme» ou d’une vison pour un secteur livré volontairement à l’anarchie. Composante stratégique dans l’architecture du pouvoir, la gestion de l’audiovisuel obéit davantage à des considérations politiciennes qu’à une volonté de se doter d’un champ médiatique fiable nécessaire à la construction démocratique de l’Etat.

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