lundi 8 août 2016

Oran : Une foule impressionnante a accompagné Nihal à sa dernière demeure

Hier matin, des milliers d’Oranais se sont rendus au cimetière Aïn El Beïda, tenant coûte que coûte à assister aux obsèques de Nihal Si Mohand, cette petite fille d’à peine 4 ans dont l’assassinat a bouleversé toute l’Algérie. Une longue procession de milliers de personnes, hommes et femmes, jeunes et moins jeunes, a suivi le cortège funèbre, pour se rendre, à pied, du quartier populaire d’Eckmül jusqu’au cimetière Aïn El Beïda, à la sortie ouest de la ville. En effet, du fait de la foule compacte, il n’était pas de tout repos d’entreprendre la procession funèbre en voiture, comme de coutume. Aussi, les gens ont opté pour la marche à pied, et ont parcouru la distance de 8 km séparant le quartier d’Eckmül du cimetière Aïn El Beïda. Un dispositif policier impressionnant a encadré la marche, épaulé par les éléments de la Protection civile, qui étaient à pied d’œuvre pour éviter tout débordement. Dans les yeux de chacun, la colère se lisait, mêlée au chagrin et à l’indignation. Il y avait aussi un sentiment d’impuissance face à la sauvagerie de ces «amputés du cœur» (pour reprendre une expression connue) qui s’en prennent aux enfants et à leur innocence. Les gens étaient venus de tous les quartiers d’Oran et même de wilayas limitrophes, voulant à tout prix rendre un hommage posthume à la petite Nihal, victime de la folie humaine. Si certains ont choisi de se rendre d’abord au domicile mortuaire pour accompagner la défunte de son quartier natal jusqu’à sa dernière demeure, d’autres se sont rendus directement au cimetière. Ils étaient, en effet, plusieurs centaines à s’y être rendus, dès les premières heures de la matinée, formant déjà une foule silencieuse, les yeux braqués sur le portail en fer de l’entrée, attendant avec chagrin l’arrivée de la dépouille. On comptait aussi la présence de nombre d’enfants, des écoliers en vacances, qui ont tenu, eux aussi, à faire un dernier adieu à Nihal, cette petite fille qui aurait pu être leur camarade de classe ou de jeu. A mesure que la matinée avançait, le soleil tapait de plus en plus fort, mais cela n’a pas empêché les gens de venir, encore, grossir les rangs de la foule. Puis, quand le fourgon mortuaire a fait son apparition à l’entrée du cimetière, l’émotion était à son comble et se lisait dans les yeux de tous. Les éléments de la BRI, formant un cordon sécuritaire, ont demandé aux gens de se tenir par la main et de rester calmes, mais cela n’a pas empêché la colère de les submerger. L’imam de la mosquée sise dans l’enceinte du cimetière, à travers son haut-parleur, a crié à la foule : «Je comprends votre colère, je comprends votre émotion, mais ici, nous sommes dans un cimetière. Un peu de retenue par respect aux morts !» Après avoir accompli la prière du mort, la foule compacte, toujours en procession, s’est dirigée vers l’emplacement de la tombe de Nihal, au sud-ouest du cimetière. «Allah yarhamak ya Nihal», «Birouh, biddem nefdik ya Nihal», tels étaient, entre autres, les cris de colère de la foule. Prévu à 10h, l’enterrement n’a finalement eu lieu que vers midi tant il était difficile aux organisateurs de contenir la foule immense. Beaucoup, sous le coup de l’émotion sans doute, ont appelé à la vengeance et à l’application de la peine de mort pour les tueurs d’enfants. A ce propos, certains ont regretté que des drames pareils soient exploités par certaines chaînes de télévision, dont le populisme et le conservatisme dépassent l’entendement, qui utilisent ce genre d’événement tragique pour faire pression sur le pouvoir pour qu’il rétablisse la peine de mort en Algérie. «Moi, je ne suis pour la peine de mort dans des cas bien spécifiques, par exemple, pour les tueurs d’enfants. Ces gens-là n’ont que la forme humaine, mais n’ont ni l’esprit ni le cœur humain. Même les animaux ne se comporteraient pas comme eux. Il faut les éradiquer sans état d’âme», tempête un vieil homme. Beaucoup de personnes présentes au cimetière étaient d’ailleurs de son avis, soutenant que l’application de la peine de mort aurait un effet dissuasif : «A la prison, ils sont dorlotés, ce sont des colonies de vacances pour eux… Non, il faut des peines plus lourdes.» Certains, sans pour autant réclamé l’application de la peine de mort, ont préconisé que la justice soit plus dure et intransigeante à l’avenir : «On les voit bien, dans nos quartiers populaires, ces voyous. Ils n’hésitent pas à agresser à l’arme blanche, en se disant que de toutes les façons, quand bien même seraient-ils arrêtés, ils ne feraient pas long feu en prison à cause de la grâce présidentielle. Il faut que cette politique laxiste cesse.» D’autres, moins nombreux sûrement, ont plus de recul et rejettent l’option de la peine de mort : «Qu’est-ce qu’un tueur d’enfant sinon un psychopathe ? A la limite, cela arrange ces gens-là de mourir. Ne leur offrons pas ce luxe ! Il faut les maintenir en prison des décennies et des décennies, jusqu’à ce qu’ils comprennent qu’ils ne seront jamais libres de leurs mouvements, jusqu’à ce qu’ils se rendent compte de la gravité de leurs agissements.» Toujours est-il que la petite Nihal a été inhumée hier et ses parents peuvent enfin faire leur deuil. Elle repose à présent en paix, loin de la folie des hommes.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire