samedi 29 juillet 2017

La classe politique dubitative

Le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune, rencontrera demain le patronat, dont le FCE et son président Ali Haddad, et l’UGTA dirigée par Abdelmadjid Sidi Saïd, officiellement pour préparer la prochaine tripartite. Si pour certains observateurs et acteurs politiques cette réunion vise a priori à calmer le jeu après la tempête politico-médiatique des dernières semaines, pour d’autres c’est le flou total. Tebboune aurait-il mal décodé un message venu d’en haut ? A-t-il été piégé ? S’agit-il uniquement d’une scène de ménage ? Va-t-il réellement mettre de l’ordre, ou va-t-il jouer l’apaisement ? Ce sont entre autres questions que se posent, à la veille de cette rencontre, des responsables de parti et des personnalités politiques.  En tout cas, le FFS croit qu’il s’agit là d’une politique «spectacle» et d’une «scène de ménage». «Le pouvoir essaye aujourd’hui de détourner l’attention de tout ce qui est essentiel. La polémique entre Haddad et Tebboune entre dans le cadre d’une recomposition à l’intérieur du sérail», note M. Ferli, regrettant les tentatives de démobilisation de la population. Abdelaziz Rahabi, ancien ministre et ambassadeur, ne se fait pas trop d’illusions, il est convaincu qu’il s’agit là d’une opération de «marketing» et une affaire pour occuper la «galerie». «Ceux qui tirent les ficelles sont les mêmes et l’objectif est le même. Ces acteurs appartenant à des institutions ou pas sont le pire produit de l’ère Bouteflika et ce n’est pas la première fois que l’on assiste à ce genre de polémique», tranche Rahabi qui se réjouit toutefois de voir le pouvoir faire son propre procès. A travers ce conflit, le gouvernement, d’après Rahabi, reconnaît tacitement qu’il y a collusion entre l’argent et le politique. «Le pouvoir avoue avoir commis une erreur d’appréciation en ouvrant certains espaces au capital. Il reconnaît l’immixtion de l’argent dans la prise de décision des pouvoirs publics», note l’ancien ministre. Le politologue Mohamed Taïbi reste persuadé que Tebboune voulait mettre de l’ordre dans la scène politique et remettre chacun à sa place, y compris Haddad qui se comportait comme un membre du gouvernement. «Tebboune a invité à la table des négociations le FCE, une institution et non une personne. Il fait la part des choses. Il ne faut pas confondre entre un conflit qui existe entre deux responsables et la marche morale des institutions du pays. C’est une question vitale», affirme Taïbi, précisant que Tebboune veut opérer un changement, pas dans la douleur mais dans la sagesse, et le patron du FCE sortira, selon Taibi, très fragilisé de cette affaire. Selon bon nombre d’observateurs, l’image de Haddad a accusé un coup, parce qu’il n’a pas agi de manière professionnelle, mais de manière politique. Il est parti, selon eux, se battre dans un champ politique qui n’est pas le sien et aujourd’hui l’opinion publique va lui endosser l’échec des projets. C’est lui qui prend la responsabilité de l’échec des projets et probablement il va y avoir un recentrage au sein du FCE. Par ailleurs, pour certains partis proches du pouvoir, le pays a besoin en ce moment de stabilité et de beaucoup de sérénité, d’où le recours à une rencontre d’apaisement. «Nous n’avons pas besoin de politique exhibitionniste, ce n’est pas le moment et ce n’est pas l’objectif. Certes, il faut apprendre à maîtriser les dépenses, à recompter son argent, à lutter contre la corruption pour faire face à la crise. Mais nul n’ignore qu’il est impossible de dissocier l’argent du politique. C’est là une pratique courante dans le monde entier», explique un ancien député.

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