Son livre Pédophiles, ex-auteurs et victimes, (Méthode Latifa) explique comment, elle, coach des pédophile, peut intervenir avant le passage à l’acte. Le but est d’éviter les victimes mais aussi d’aider les pédophiles dans leur vie. - Vous êtes une experte en coaching en pédophile abstinent. En quoi consiste votre méthode ? Je fais de la prévention et de l’information concernant la pédophilie. Ma première école était l’Algérie, où j’ai rencontré les premières victimes d’abus sexuels. Je me suis intéressée à ce phénomène : ses raisons, ses causes et à la racine de ce «plaisir», d’autant plus que moi-même j’ai été victime de viol dans mon enfance par l’employé de mon père. A l’époque, j’étais au Maroc lorsqu’il a abusé de moi. Sous la menace, cet abus a duré de l’âge de 5 ans jusqu’à 13 ans. J’avais très peur. Le violeur, qui avait un accès libre à notre maison, était cette personne en qui mon père avait une grande confiance. C’était même celui qui l’accompagnait à la mosquée. Il était à l’abri de tout reproche et de tout doute. C’est notre départ vers Alger qui m’a sauvée, mais qui a quand même suscité chez moi une certaine curiosité. A Alger, j’avais 15 ans lorsque j’ai rencontré pour la première fois une victime de pédophilie (victime de son père, son oncle et son frère). Je l’ai coachée sans savoir ce que cela voulait dire. La devise : ne pas se taire, même si partout, en Algérie, au Maroc ou ailleurs il existe des tabous auxquels se heurtent les différentes populations. Cette jeune fille était un catalyseur, comme un téléphone arabe, surtout qu’elle était sortie de son silence. Je me suis retrouvée à l’écoute de beaucoup de victimes et j’étais tellement heureuse de me propulser sur ce terrain. J’ai appris le mode opératoire des auteurs à travers les victimes. J’ai appris comment aider un homme attiré par les enfants de ne pas passer à l’acte. - Comment un pédophile peut-il se confier ? J’ai exploré cet horizon. A chaque fois qu’une victime me raconte son histoire, cela m’enrichit et je parviens de plus en plus à comprendre l’auteur du délit. Je cherche toujours la possibilité de rencontrer cet homme. C’est la meilleure façon de le dissuader de passer à l’acte. J’ai appris à écouter. C’est ma manière d’imaginer, de penser et d’agir pour éviter d’autres victimes. J’ai sauvé des milliers d’enfants en Algérie par la simple écoute. Je les ai aidés à comprendre leur fonctionnement, leur désir et à évoluer dans ce désir et progresser dans l’âge. C’est ici que j’ai eu ma meilleure école avec des délinquants sexuels qui sont déjà passés à l’acte et dont les victimes refusaient toute juridiction. Car, il est difficile de porter plainte et il y a d’autres obstacles religieux, sociétal… Même en France, les lacunes étaient et sont les mêmes. Le silence, le tabou… J’ai tout de même continué à être à l’écoute des victimes potentielles, c’est-à-dire celles ayant un doute ou des tentatives ou des anciennes victimes qui faisaient appel à moi. - Vous avez tout de même réussi à regrouper dans la même salle des victimes et des pédophiles ou ceux ayant des dérives… Je n’ai pas la prétention de régler totalement le problème, mais j’ai au moins la volonté de réduire la courbe des victimes. C’est-à-dire donner la possibilité au pédophile en pleine abstinence qui ressent un désir et des attirances et qui voudrait passer à l’acte de pouvoir continuer à résister à ses pulsions. L’idée est d’éviter qu’il y ait d’autres victimes. Cette abstinence peut prendre plusieurs années. «Je souffre depuis des années, mais aidez-moi à ne pas passer à l’acte», me demandaient certains. Et cela se fait à la demande de la victime (pédophile en abstinence). Cette catégorie d’auteur peut être prise en charge dans des structures spécialisées. Car j’insiste sur le travail en amont. C’est la raison pour laquelle j’ai créé mon site qui les aidera à sortir de l’ombre. Je suis arrivée au stade où j’ai réuni les victimes et les pédophiles (pas spécialement leurs victimes directes) dans des groupes de parole. Il y a une entraide entre ces groupes. Cette méthode préventive a suscité l’intérêt institutionnel, politique et médiatique compte tenu du caractère pionnier. Mon expertise a été reconnue dès le début comme une référence, d’abord européenne, ensuite mondiale en matière de prévention vu les demandes d’aide qui me parviennent de tous les pays, notamment d’Algérie, du Maroc et de la Tunisie. Les pays musulmans sont prisonniers à cause de leur culture et le silence triomphe à ce jour. Ma démarche a été encouragée par plusieurs imams en France, y compris par des anthropologues. Les psychiatres et les avocats algériens que j’ai rencontrés m’ont encouragée à exporter mon concept en Algérie et sensibiliser le gouvernement et la population algériens à faire face à cette réalité en osant la vulgariser sans tabous. De ce fait, je lance aujourd’hui un appel aux autorités pour qu’elles cessent de faire dans l’hypocrisie. On ne peut pas cacher ce qui existe. - Avec les nouvelles technologies et les réseaux sociaux, toute méthode semble inapplicable vu l’ampleur des délinquants sexuels… Il faut savoir que tous les délinquants sexuels ne sont pas pédophiles, et tous les pédophiles ne sont pas des délinquants sexuels : cela semble évident pour les auteurs de faits concernant des majeurs, mais cela est vrai également concernant les auteurs de maltraitance sexuelle sur mineurs, car à proprement parler de pédophilie, il faut qu’il y ait chez l’auteur des attirances sexuelles avérées pour les enfants. En effet, ce sont ses attirances qui définissent un pédophile, non pas ses actes. Au sens strict, la pédophilie désigne l’attirance sexuelle d’un adulte pour des individus impubères. Par abus de langage, on parle parfois de pédophilie dans des affaires mettant en cause un adulte et des adolescents. L’attirance pour les adolescents est appelée hébéphilie. De même que des pulsions violentes, voire meurtrières, ne se traduisent pas automatiquement par des passages à l’acte, la pédophilie comme l’hébéphilie peuvent très bien ne déboucher sur aucun contact sexuel avec des mineurs. Beaucoup de pédophiles ou d’hébéphiles ne passent jamais à l’acte, certains par manque d’occasion ou par peur, mais d’autres aussi par choix. A l’inverse, il arrive que des viols et des agressions sexuelles sur mineurs soient commis par des individus qui, en réalité, ne sont pas pédophiles. Marc Dutroux, qui fut longtemps présenté par les médias comme le pédophile emblématique en offre un bon exemple. En outre, les rapports incestueux sont souvent le fait d’hommes ou de femmes qui ne présentent pas d’attirances sexuelles pour les enfants ou les adolescents en général. La consommation de la pornographie à l’âge précoce peut avoir plus tard des conséquences et un impact destructeurs sur le comportement du sujet. Il peut basculer vers la pédopornographie. Je fais alors, à défaut d’une prévention dans ce cas, un éclairage sur les conséquences. Les réseaux sociaux d’aujourd’hui sont aussi très dangereux, ils sont un terrain fertile pour les «pédosexuels» qui sont attirés par la tranche d’âge de 12 à 16 ans. C’est très dangereux, et c’est pour cela qu’il faut insister sur l’éclairage des parents. - S’agit-il d’une pathologie ? Il ne s’agit pas d’une pathologie, mais d’une déviance qui se génère à travers toutes les dérives virtuelles. Car l’addiction au monde virtuel permet de générer des souffrances, des dépressions et même des phobies. - Vous avez suivi des cas d’enlèvements d’enfants. Y a-t-il un lien entre ces kidnappings et les pédophiles ? Ce ne sont pas forcément des pédophiles qui sont derrière ces enlèvements. Si on élimine les raisons financières, il peut y avoir d’autres raisons, comme des pulsions sexuelles incontrôlables ou une carence sexuelle. Ces enfants deviennent alors des proies, les plus faciles dans une misère sexuelle que vit aujourd’hui la société. Une misère criante sans pouvoir en parler. Une victime m’a parlé d’une vieille qui le stimule sexuellement… et puis à l’âge adulte, il enregistrera une dérive sexuelle. Car il y a eu un flash-back. Aujourd’hui, je dis que je suis disponible à former des psychologues et des pédopsychiatres dans ce domaine. - Faites-vous un lien entre ces dérives sexuelles et le nombre d’homosexuels en augmentation ? Les dérives peuvent générer une homosexualité si le jeune garçon vit cela comme un jeu avec son ami, étant gamins, car la genèse est presque la même. Comme d’ailleurs le viol d’une fille écœurée par son agresseur qui ne peut plus partager sa vie avec un homme.
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