L’interdiction des conférences à Aokas ou ailleurs suscite le débat sur le pouvoir de la société civile à résister à subir le dikat sous toutes ses formes. Demain, le journaliste et écrivain Chawki Amari animera une conférence-débat portant sur la littérature et l’engagement politique dans le cadre de la conférence organisée par le Café littéraire d’Aokas au centre culturel à 14h. Avant la conférence, une marche à partir de la place Katia Bengena sera organisée, tous les livres à la main, jusqu’au lieu de la conférence. Conférence autorisée ? Verbalement oui par le wali, mais c’est ce même wali qui avait affirmé au lendemain de l’interdiction de la conférence de Ramdan Achhab cette semaine que la «situation le dépassait». L’occasion sera donc donnée lors de cette «action citoyenne» de demander que les autorisations de tenir des conférences ne soient plus délivrées par la chefferie de daïra. Cri de colère de Hafit Zaouch, directeur du Café littéraire qui témoigne : «Pourquoi une autorisation pour permettre à un intellectuel de parler ? Un écrivain algérien qui a édité son livre en Algérie et qui a obtenu son numéro ISBN de la Bibliothèque nationale a-t-il besoin d’une autorisation pour présenter son livre disponible à travers les librairies du pays à ses lecteurs ? Pour rendre les choses plus compliquées, on nous exige de demander une autorisation aux services de la daïra ! C’est quoi le rôle de la daïra déjà ! L’objectif est de fatiguer toutes les bonnes volontés.» C’est une simple «censure», dit Fatah Bouhmila, l’un des animateurs. Depuis janvier, Larbi Yahioun, écrivain et enseignant, était interdit de présenter sa conférence sur la langue kabyle dans la littérature et la science, puis c’est autour de Younes Adli, en mars qui devait présenter à ses lecteurs son livre La pensée kabyle. Livre Toujours en mars de l’universitaire Benhaimi Loubna n’a pas pu parler des mythes fondateurs des sociétés et en avril c’est au tour de Karim Akouche qui a été interdit de présenter son dernier livre La religion de ma mère. La cinquième conférence interdite est celle de l’universitaire Farida Boualit et l’écrivaine Rénia Aoudene le 15 avril. Ces deux femmes de lettres devaient rendre hommage à l’illustre écrivain algérien Nabile Farès. Une conférence sur le chemin légendaire de Lounès Matoub qui devait être présentée par Yacine Hebbache, le 20 avril, n’a pas eu d’autorisation. Et même l’étranger et l’ami de l’Algérie Armand Vial, qui voulait présenter son dernier livre Mon chemin de terre est rentré bredouille. Avant Ramdane Achab, Zoubir Zerarga, programmé pour le 15 juillet, n’a pas réussi à présenter aussi son livre Le montagnard au grand nez. L’énigme, toutes ces conférences ont pu, sans aucun obstacle, avoir lieu à la ville de Béjaïa où ailleurs, même si le Café littéraire de Bouzeguène n’a pas pu résister aux interdictions répétitives de leurs débats. Analogie faite par Chawki Amari à la devise de Hadj Mohamed El Anka qui disait : «Si tu n’as jamais lu, pourquoi écris-tu.» enchaînée par Hafit Zaouch : «Notre slogans sont du débat jaillit la lumière et vive la culture. Le pouvoir algérien a peur du libre débat. Un pouvoir qui a peur toujours des idées novatrices et surtout un pouvoir qui prend les Algériens pour des éternels gamins.» Pas question de baisser les bras. Pour la société civile, c’est l’heure de la résistance. Quelle que soit la décision du chef de daïra, une conférence est programmée chaque samedi. «On peut aisément comprendre qu’ils prennent conscience que les maigres acquis démocratiques de 1988 sont menacés et le pouvoir actuel vire vers l’autoritarisme. Le consensus est visible et tout le monde est persuadé qu’une réponse nationale à la hauteur de la gravité d’interdiction de conférences est nécessaire», explique encore Zaouch. La thèse de Bouhmila : «Le pouvoir ne veut pas que la société sorte de sa torpeur et s’organise. Il agit de sorte à diviser en permanence les Algériens sur les malheurs qui les frappent et à comprendre que le problème essentiel est la mauvaise gouvernance. Sur le plan politique, le Café littéraire fait s’entendre sur un minimum des forces qu’il veut tout le temps opposées.» Chawki Amari: «Ma conférence est surtout à titre de solidarité d’abord, puis par souci de maintenir une activité culturelle et enfin mettre le point sur la stratégie de du régime».
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