La première journée de l’université d’été organisée par l’association Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ), jeudi dernier, a été marquée par la présentation de deux conférences. Nouredine Bouderba, ancien syndicaliste, expert et consultant en relation de travail, a développé un thème autour de «la problématique de l’emploi des jeunes et du chômage en Algérie». Les chiffres récents publiés par l’ONU et l’ONS «contredisent les thèses du vieillissement accéléré de la population algérienne. Ces rapports viennent plutôt confirmer que les véritables défis de l’Algérie pour les décennies à venir doivent concerner beaucoup plus les nouvelles générations que les personnes âgées», selon le conférencier. L’ONU a publié un document, fin juillet 2017, sur la démographie qui rapporte que selon l’ONS, environ 1 algérien sur 4 est âgé entre 15 et 30 ans. Avec 10,1 millions de personnes, cette tranche d’âge représente 24,3% de la population algérienne. Selon les projections, la population âgée de 15 à 30 ans à l’horizon 2030 va représenter 11,44 millions, soit 22,4% de la population totale. Ce qui veut dire, explique M. Bouderba, que «le pourcentage ou la proportion de la population resteront pratiquement les mêmes jusqu’en 2030. Car, selon les dernières projections de l’ONU, en 2017, environ 13 Algériens sur 100 auront 60 ans en 2030 contre 30 Européens à la même année. Cela veut dire que la société algérienne sera plus jeune que la société européenne en 2030.» A l’ombre de ces statistiques, le conférencier a analysé que la mise en œuvre de l’annulation de la retraite anticipée et sans condition d’âge n’a aucun justificatif fondé. Pour lui, le gouvernement «n’a fait que copier la loi sur la retraite des pays européens comme la France et l’Angleterre pour dire que le vieillissement de la société touche l’Algérie au même titre que les deux pays cités». Par contre, la proportion de la tranche d’Algériens ayant moins de 15 ans s’élèvera à 26,6% en 2030 contre 21% pour la Tunisie et 15,2% pour l’Europe. Ceci démontre, précise l’orateur, «que l’Algérie aura à faire face aux besoins de la nouvelle enfance et les jeunes en matière de santé, d’éducation, de formation, d’emploi et de logement. La tranche d’âge des jeunes ayant entre 15 et 25 ans et celle des nouveaux demandeurs potentiels de formation supérieure, d’emploi et de logement…». Et d’ajouter que «cette catégorie passera de 6,35 millions en 2017 à 8,45 millions en 2030, soit 2,1 millions de jeunes supplémentaires qui vont demander un surcroît de moyens et sur lesquels les autorités, qui n’ont pas à regarder du côté des retraités et de la loi sur la retraite, doivent se pencher dès maintenant». Le taux d’activité global en Algérie est de 42%, plaçant l’Algérie dans une position inférieure, loin derrière les pays du Golfe et des pays voisins (respectivement 23% et 24%). Mais avec la discrimination, il n’a été enregistré que 17% des femmes actives contre 66% des hommes. Ceci explique qu’il y a un gisement des deux sexes qu’il faudra verser dans l’emploi pour augmenter le taux de la population active après avoir traité les facteurs qui freinent le développement du marché de l’emploi. Absence d’outils de changement De son côté, le sociologue et chercheur Nacer Djabi a traité du sujet de la «Jeunesse, citoyenneté et crise politique en Algérie», où il a déploré l’inefficacité ou l’absence des outils de changement comme des partis politiques forts, des syndicats et associations rassembleuses, un Parlement issu d’un processus électoral démocratique et propre capables de ramener le changement et réaliser l’adhésion des jeunes aux projets et à la vie politique et publique. De prime abord, le sociologue entame sa conférence en disant que «d’aucuns ne sont d’accord avec le constat selon lequel il y a non-participation des jeunes à la vie politique, qu’ils ne font plus confiance aux institutions étatiques et aux élus et que l’idée que se fait le jeune Algérien de la politique et l’ensemble des institutions et organisations représentatives est négative». Et de renchérir : «Nous sommes tous d’accord pour dire que nous ne savons pas vraiment ce qu’il faut faire pour changer la donne. Si la situation reste telle qu’elle est, nous allons droit vers le pourrissement.» Plus grave encore, les Algériens ne participent même pas à la vie politique à travers les réseaux sociaux. Ce moyen est inefficace pour le cas des Algériens qui l’utilisent pour d’autres fonctions. Il faut réhabiliter la politique, mais comment ? Le chercheur constate que «l’école et la famille ne produisent pas un citoyen qui s’intéresse à l’intérêt public. Les valeurs transmises sont d’ordre personnel visant l’accomplissement de l’individu». Sur un autre registre, M. Djabi s’interroge sur la meilleure façon d’intégrer les jeunes dans la politique dans les conditions dans lesquelles évolue l’Algérie. En effet, il entend par conditions la problématique de la démographie politique. A ce sujet, il estime que «ceux qui contrôlent le pouvoir sont une minorité démographique qui ont plus de 70 ans. Ces gens-là, leur problème sera résolu par la loi de la biologie, n’étant pas près d’accepter le principe de l’alternance», ironise-t-il. Sur la même lancée, le conférencier pense que «cette classe politique ne gère que les vieux, la population rurale et les individus à bas niveau d’instruction qui constituent la majorité démographique qui maintient ladite minorité au pouvoir.» Toutefois, l’espoir est permis pour M. Djabi qui mise, pour sortir de cette démission généralisée des jeunes de la politique, sur le mouvement associatif, les partis politiques et les médias qui, peut-être, arriveront à réhabiliter la politique aux yeux de cette frange de la société à travers ce genre d’initiative (université d’été du RAJ). Le second scénario susceptible de réaliser le changement est plus proche de notre culture et nos méthodes politiques : la rupture. Mais les conditions nationales et internationales le permettent-elles ? s’interroge-t-il
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