L’ancien ministre des Finances suggère une réflexion urgente sur le secteur économique public, la favorisation de la formation professionnelle et l’implication de la diaspora. Le retour à l’endettement extérieur en ce contexte de crise financière doit à tout prix être évité, a estimé avant-hier l’ancien ministre des Finances, Abdellatif Benachenhou, lors d’une rencontre à Alger, organisée par la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française (CCIAF). Dans une conférence qu’il a animée conjointement avec le professeur d’économie Christian de Boissieu, sur le thème «L’industrialisation et du développement», Benachenhou n’a pas hésité à décrier les thèses évoquant un retour à l’endettement extérieur pour faire face au tarissement des ressources financières du pays. «J’ai fait du désendettement», a-t-il tenu à rappeler, en faisant allusion aux opérations de paiement de la dette par anticipation au début des années 2000, lorsqu’il était à la tête du ministère des Finances. Et d’avertir en ce sens qu’«il faut faire très attention quand on parle d’endettement extérieur» et éviter de répéter deux fois la même erreur. Pour autant, l’ex-conseilleur du président de la République ne manque pas de mettre en évidence la gravité de la crise actuelle, tout en dressant des constats sévères sur les politiques économique et industrielle prônées par les pouvoirs publics. Abondant dans le même sens que le professeur de Boissieu quant aux limites de l’industrialisation dans le contexte actuel de globalisation, Benachenhou soutient que la seule voie à emprunter pour l’Algérie est désormais celle d’une «industrie de demain, sans illusions ni subventions». Selon lui, en l’état actuel des choses, «l’industrie algérienne, quelle qu’elle soit, est une industrie de montage, à faible valeur ajoutée». L’industrie algérienne, lance-t-il, «ne fonctionne que si Sonatrach va bien, car elle consomme des devises sans en gagner». Alors que les entreprises publiques, ajoute-t-il, «ne sont pas des sujets de droit au sens du marché» et ne peuvent donc pas servir de moteur à l’industrie dans leur statut actuel. Le secteur privé, pour sa part, ne compte, a-t-il dit, que «des entrepreneurs et non des entreprises». Aussi, suggère l’ancien ministre des Finances, «pour avoir une industrie, il faut aujourd’hui de véritables acteurs et non des scénarii de stratégie industrielle». Avec la nouvelle conjoncture pétrolière, avertit-il, «la situation n’est pas simple car nous n’avons plus assez de ressources publiques et bancaires pour l’industrie et les choix de financement vont être désormais décisifs». Dans ses propositions de sortie de crise, Abdellatif Benachenhou plaide notamment pour «une réflexion urgente sur le secteur public», «la construction d’un marché industriel concurrentiel et d’un autre pour les crédits bancaires», «l’organisation d’une politique des prix et de contrainte budgétaire», mais aussi et surtout la favorisation de la formation professionnelle et «l’implication de la diaspora. Si nous voulons avancer, il nous faut nos enfants de là-bas», a-t-il insisté en ce sens, estimant en définitive qu’avec les multiples ressources dont dispose encore le pays et une meilleure gouvernance, «nous pouvons faire beaucoup de croissance». Au sujet de ses positions politiques, l’ex-conseiller du président Bouteflika s’est contenté de répliquer, en citant l’économiste français Raymond Barre, que «la politique c’est bien, mais professeur c’est mieux…».
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