Une semaine, jour pour jour, après que l’information ait été éventée par la presse, Ahmed Ouyahia, directeur de cabinet de la présidence de la République et secrétaire général par intérim du RND, confirme la portée de la décision présidentielle supprimant — par un décret non publiable — aussi bien l’organe que la fonction. Lors de sa conférence de presse – tenue à Ben Aknoun, au siège de son parti — Ahmed Ouyahia a tenu à apporter, dit-il, «des éclaircissements sur cette restructuration (des services) qui vient d’arriver à son terme». «La présidence de la République voulait se donner une semaine avant de rendre publique la décision pour notamment permettre aux services de sécurité de se préparer et de s’organiser, mais il y a eu une fuite.» Cette fuite, regrette-t-il, «comprend une part de vérité mais aussi beaucoup de contrevérités». «La vérité est que le DRS, précise-t-il, a été dissous. Trois de ses anciennes directions qui sont au cœur des missions des services de renseignement, le contre-espionnage et la sécurité intérieure et autres sont promues en tant que structures de l’Armée nationale populaire (ANP) en directions générales rattachées directement à la présidence de la République. Il en sera ainsi comme pour la Garde républicaine, une structure de l’ANP rattachée de par ses missions à la présidence de la République, mais qui peut être, en cas de guerre, mobilisée par l’état-major de l’ANP.» Les anciennes directions du DRS promues en directions générales sont, énumère Ouyahia, la Direction générale de la Sécurité intérieure (DGSI), la Direction générale de la Documentation et de la Sécurité extérieure (DGDSE) et la Direction générale du Renseignement technique (DGRT). Quid de la DSS, la fumeuse Direction des Services de sécurité, structure équivalente, censée remplacer le DRS ? «Le cœur du DRS a été préservé, mais il n’y a plus de direction», oppose Ouyahia. «Il y a un conseiller auprès du président de la République chargé de coordonner les services de sécurité rattachés à la présidence de la République. Le conseiller en question est le frère Athmane Tartag, dit Bachir.» Interrogé sur le prétendu poste de ministre d’Etat attribué à ce dernier, Ouyahia dément. Dans l’ordre protocolaire, explique-t-il, Tartag a un statut «équivalent à celui d’un ministre, mais il n’est pas ministre». Pour Ahmed Ouyahia, il ne s’agit là que d’une «évolution», d’«une nouvelle ère dans l’histoire de l’organisation sécuritaire algérienne», très loin, souligne-t-il, des conjectures et commentaires auxquelles a donné lieu l’opération de «restructuration des Services». «Certains, dans la presse, ont conclu que le président de la République a voulu diminuer les prérogatives du vice-ministre de la Défense, chef d’état-major de l’armée, hacha oua lilah ; que le Président a mis sous cap les services de sécurité, etc. Il n’en est rien.» En France, en veut-il pour exemple, la Direction générale de la Sécurité extérieure relève du Premier ministre, alors que la Direction générale de la Sécurité intérieure dépend, elle, du ministère de l’Intérieur. «Une organisation de ce type signifie-t-elle que les prérogatives de l’armée française ont été diminuées ? Non. Nous avons le devoir de préserver ces structures des luttes et des polémiques», conclut-il ce chapitre. Volubile à l’extrême, Ahmed Ouyahia prend de ces doucereux plaisirs à ne décliner aucune des questions qui lui sont posées. Le show médiatique, c’est son dada, l’élément de l’animal politique. Servi par une rhétorique décapante, à la limite de l’absurde, Ouyahia tire à boulets rouges. Sur l’ambulance d’abord. A l’image de Barakat et du MJIC assimilés à des «mouvements fascistes». «Oui, je réitère, ces mouvements sont des mouvements fascistes», hausse-t-il le ton. «La gauche comme la droite françaises ont condamné les événements de Mai 1968 en France comme étant des mouvements fascistes.» Ouyahia comme il agrafera le PT de Louisa Hanoune et le Comité des chômeurs de Ouargla dits les «Farghin Chroul (les désœuvrés) et assimilés à des ‘‘incitateurs au désordre», et épinglera rétrospectivement les animateurs des manifestations d’Alger de 2011 — survenues dans le sillage du «printemps arabe» «Ces danseurs du samedi», ironisait Ouyahia. Des croche-pieds, il en glissera également. Pour le ministre des Finances entre autres, Abderrahmane Benkhalfa, qu’il invitera à demi-mot à faire son travail, à dire aux Algériens «où sont passés les 800 milliards de dollars» supposés avoir été investis dans l’économie. «Il a les chiffres. Je l’ai aussi.» Il prendra à partie son alter ego et ennemi intime du FLN, Amar Saadani en l’occurrence, qu’il qualifiera (sans le citer) de «cynique professionnel». «Echaâb, le peuple, est heureux de découvrir le projet de la Constitution (…) et je dis bravo aux cyniques professionnels d’avoir réussi à transformer l’article 51 (accès des binationaux aux hautes fonctions) en parfait écran de fumée. Ces gens-là ont marqué un but en or.» Ouyahia expliquera qu’il y a quelque cinq millions d’Algériens expatriés. «Ils ne peuvent pas tous devenir ministres (…), mais ceux qui le désirent n’ont qu’à faire cet énorme sacrifice de renoncer à leur nationalité acquise.» L’argent sale dans les dernières sénatoriales, le SG du RND, qui a eu à accuser le FLN de Saadani d’user de la chkara pour gagner les élections, en remettra de nouveau une couche. «L’argent sale est une triste réalité. J’en ai déjà parlé en 2012 et ça a créé un tollé. Qu’il y ait des lobbys financiers, c’est tout à fait normal, mais qu’il y ait des gens qui achètent des voix, c’est une autre chose. Dans une des villes, des électeurs remettaient leurs bulletins de vote après avoir pris l’argent laissé dans la malle ouverte d’une voiture stationnée dans la cour de la wilaya», surprend-il.
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