lundi 2 mai 2016

Un nouveau syndicat pour les magistrats ?

Déçue par le Syndicat national des magistrats (SNM), dirigé par Djamel Aïdouni depuis 15 ans, cette nouvelle force veut peser dans l’échiquier national pour arracher un certain nombre de «droits bafoués», selon une source de ce syndicat en devenir. «Nous avons attendu le SNM pendant 15 ans, mais nous n’avons rien eu alors que d’autres secteurs ont arraché des augmentations de salaires et des logements», nous a confié notre source qui a requis l’anonymat. L’anonymat se comprend dans ce cas, sachant le devoir de réserve auquel sont soumis les magistrats et la frilosité du pouvoir actuel au moindre mouvement qui tenterait de sortir des scénarios qu’il écrit lui-même. D’ailleurs, les meneurs de cette initiative ne veulent pas se contenter de revendications sociales. C’est là où cette action se distingue sachant le terrain miné sur lequel ils s’engagent. En effet, notre source décrit le sentiment général qui caractérise les magistrats, à savoir un rejet total du rôle caricatural auquel est réduit le juge : traiter la quantité et suivre des instructions. «L’indépendance de la justice n’existe que sur le papier. Mais la nouvelle génération de magistrats est différente de l’ancienne, quoi qu’on dise. Nous aspirons réellement à notre indépendance», estime notre source. Voilà qui n’est pas pour donner sommeil au palais. D’ailleurs, samedi, le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Tayeb Louh, a convoqué M. Aïdouni pour étudier avec lui les tenants et les aboutissants de cette action et éventuellement calmer la protestation. Mais à la question d’augmenter les salaires, le ministre aurait opposé un niet. De toute façon, le SNM semble complètement dépassé cette fois, lui qui ne compte que 800 adhérents face aux 2000 rassemblés autour du nouveau syndicat. De plus, si le nouveau syndicat, qui a le vent en poupe, décroche son agrément, le SNM risque de se vider. Adhésion massive Pourtant, tout a commencé sur les réseaux sociaux. De simples échanges se sont vite mués en débats sérieux dans un groupe fermé, traduisant une soif ardente d’une nouvelle organisation corporative capable de devenir un espace de débat et un outil de défense de la famille et de la noble profession de la magistrature, malmenée par le pouvoir exécutif et inféodée à des forces souvent informelles. Une première rencontre, tenue il y a deux mois dans un endroit discret, a permis de réunir 20 magistrats, nous confie notre source, et la résolution a été prise de créer un syndicat. Des formulaires ont été distribués par la suite pour recueillir les adhésions et la réaction a, semble-t-il, surpris les organisateurs tant l’écho était massif. Aujourd’hui, l’initiative a franchi une nouvelle étape, notamment avec la rédaction de statuts et la mise en place d’un comité de préparation de l’assemblée générale constitutive avant le dépôt du dossier auprès du ministère du Travail. Ceci dit, les initiateurs de ce nouveau syndicat redoutent des obstacles de la part de l’administration, sachant qu’une lettre a été adressée au ministre de la Justice sans lui parvenir à cause de la fermeture de tous les canaux employés. Les initiateurs soulignent son caractère libre et son indépendance de toute chapelle partisane ; ils aspirent à se faire une place dans le paysage syndical en toute légalité et souhaitent ne pas rencontrer d’obstacle aux niveaux du ministère du Travail et de la wilaya d’Alger, où ils comptent organiser leur assemblée générale, note notre source. Pour rappel, l’actuel SNM est le fruit d’un redressement effectué en 2004, au lendemain de l’élection présidentielle d’avril. L’ancienne équipe, présidée par le juge Ras El Aïn, a payé cher sa neutralité devant le dossier d’invalidation du 8e congrès du FLN et pour avoir qualifié de «justice de la nuit» le coup de force qui a délogé Ali Benflis.

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