vendredi 7 juillet 2017

Psychiatres : «Nous travaillons sous la terreur des trafiquants»

L’hôpital psychiatrique de Ouled Mansour est sous la menace d’une fermeture imminente du fait des menaces de mort dont fait l’objet l’équipe pluridisciplinaire, l’autisme des autorités locales et le silence suspect des services de sécurité face aux multiples plaintes déposées par la direction de l’établissement et restées sans suite. Ce constat a été fait par le représentant de cet établissement psychiatrique. Cette semaine, une rencontre a été organisée en coopération avec la sûreté de la wilaya sous le thème «La lutte contre la toxicomanie». Constat confirmé, lors de notre déplacement hier, par Mohamed Abdelli, directeur de cet établissement hospitalier spécialisé en psychiatrie de Ouled Mansour, qui a déclaré : «Nous sommes confrontés à une double problématique, l’insécurité et l’isolement, par le fait que cet hôpital est implanté dans une commune rurale, à 12 km du chef-lieu de la wilaya, ce qui constitue une contrainte supplémentaire pour les spécialistes.» Et d’ajouter : «Cette équipe pluridisciplinaire, composée de 8 psychiatres, 8 généralistes, 4 psychologues et 2 orthophonistes, assurant le fonctionnement de cet hôpital d’envergure régionale depuis son ouverture en février 2015, et pour lequel un effort colossal a été consenti, risque fort de disparaître si rien n’est entrepris en matière de sécurité.» Avant d’expliciter que la menace qui pèse sur ces spécialistes, confrontés à une catégorie particulière de «patients» qui ne sont pas des malades qui aspirent à être pris charge pour être désintoxiqués, provient en fait de trafiquants de psychotropes qui se présentent pour une consultation devant les psychiatres et  exigent la prescription de médicaments bien précis. Et au docteur Farid Tayoub d’enchaîner : «Ces individus, dotés d’armes blanches, d’objets contondants, dénommés sociopathes, ne cherchent pas à se défaire de leur addiction, mais se livrent à des actes de violence dès lors que le médecin refuse de se plier à leurs exigences.» Menaces Le hic réside dans le fait, dira le directeur de l’établissement, que «ces individus, identifiés, dont le nombre ne dépasse pas la dizaine, connus des services de sécurité, est que rien n’est entrepris contre eux, avant que la grâce du 5 juillet ne vienne démultiplier leur nombre et accroître la persécution des spécialistes qui n’aspirent qu’à la sécurité pour exercer dans des conditions normales et prendre en charge une catégorie de malades, à savoir les schizophrènes dont le nombre a atteint 284, dont 37 femmes en 2016 et 200 dont 37 femmes pour le 1er trimestre 2017». La menace contre les spécialistes est plus importante s’agissant des psychiatres femmes, à l’image de la spécialiste Ouchia Mounia. «J’ai été menacée de mort le 12 juin dernier par un patient que j’avais refusé de recevoir alors que j’étais en pleine consultation. Il voulait renouveler son ordonnance et ne s’est pas embarrassé pour s’adonner à des actes de violence si on ne répondait pas à ses exigences. Outre la menace de mort, a ajouté Mme Ouchia, on nous met la pression en nous suivant tout le temps ; à cause de cette pression, on est continuellement terrorisé.» Et d’ajouter : «Cette situation ne peut plus durer, plusieurs psychiatres ont refusé de venir dans cet établissement du fait de son isolement et de l’insécurité qui y sévit.» Et de noter : «Il est plus facile d’implanter un commissariat de police dans un lieu où le besoin se fait pleinement sentir que de ramener un psychiatre dans les conditions de sécurité actuelles.»  Un spécialiste vivant la pression de ses pairs et au fait de la journée de «Lutte contre la toxicomanie» a déploré «la fuite» du wali de M’sila, qui n’a pas assisté à la conférence donnée par le représentant de l’hôpital sur la problématique de l’insécurité qui y sévit et la menace de fermeture imminente de l’hôpital psychiatrique si rien n’est entrepris en urgence.  

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