L’éloquence la plus achevée de même que la connaissance la plus fine de son parcours ne suffisent pas à rendre au défunt Si Hocine Aït Ahmed ce qui lui est légitimement dû, tant ce dont les générations de l’indépendance et celles à venir sur cette terre bénie lui sont redevables est difficilement mesurable. Beaucoup a été dit au sujet du défunt, mais cela représente si peu au regard de son parcours et son œuvre. Nous lui sommes tous redevables de beaucoup, mais nous ne nous sommes acquittés que d’une part infime de la dette que nous avons envers lui. Sa vision était autrement plus pénétrante, ses prévisions plus justes et le rythme de sa marche plus rapide. Sa vision était plus pénétrante, car il a été le premier à voir que la plus grande ambition de la Glorieuse Révolution de Novembre resterait lettre morte aussi longtemps que serait différé l’avènement de la République démocratique et sociale que lui-même et ses compagnons ont fixé à l’Algérie indépendante et souveraine comme aspiration suprême et but absolu. Ses prévisions étaient plus justes, car il a toujours senti au plus profond de lui-même que l’avènement de ce projet était inévitable en dépit des obstacles qui se multipliaient sur son cours, des entraves répétées qu’il rencontrait sans cesse et des adversités qui se diversifiaient pour toujours différer l’heure de sa venue ; et nous voilà à cette heure qu’il avait prévue, celle de l’appel au retour au projet de l’Etat démocratique et social qu’il n’a pas cessé un seul instant de lancer et que nous avons pour devoir national de perpétuer après lui. Le rythme de la marche de Si Hocine Aït Ahmed était plus rapide et il était en avance sur son temps, car il a su identifier opportunément la citoyenneté, la souveraineté populaire, les libertés et les droits humains comme autant de piliers dont ne peut se passer la construction d’un Etat moderne, d’une nation soudée et d’une société harmonieuse et unie. Si justice n’a pas été rendue à Si Hocine Aït Ahmed, c’est l’histoire elle-même qui la lui rendra, cette histoire dont il a écrit les plus belles pages s’agissant du sacrifice, de l’abnégation et du don de soi à son pays et à son peuple. La mémoire nationale collective sait comment protéger et pérenniser la mémoire des plus grands et parce que Si Hocine Aït Ahmed a fait partie des plus grands, elle saura comment dire que pour lui le sacrifice quel qu’il soit était insignifiant et que seul comptait plus que tout son devoir envers son peuple. La mémoire nationale collective saura, aussi, comment dire que pour lui le coût de l’abnégation comptait pour si peu au regard de l’envergure de ses responsabilités envers la nation. La mémoire nationale collective saura, enfin, comment dire qu’il ne tenait aucun compte du souci de soi, mais qu’il prenait toujours la juste mesure de ce qu’il lui importait d’accomplir pour être en conformité avec ses convictions, pour être en paix avec sa conscience et pour mériter la seule reconnaissance à laquelle il tenait, celle de son peuple qu’il a su servir sans compromission et sans défaillance.
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