La romancière, journaliste et résistante française Edmonde Charles-Roux est décédée, mercredi, à l’âge de 95 ans à Marseille, a fait savoir hier l’Académie Goncourt, qu’elle a présidée entre 2002 et 2014. «Edmonde Charles-Roux a marqué l’histoire de son pays et la littérature, en particulier avec la biographie d’Isabelle Eberhardt», affirme Fatma Oussedik, anthropologue et professeur de sociologie à l’université d’Alger. Après la Libération, Edmonde Charles-Roux entre à la rédaction du tout nouveau hebdomadaire féminin Elle. Puis elle devient, en 1950, rédactrice en chef de l’édition française du magazine Vogue, où elle se lie avec les plus grands artistes. Elle en est licenciée en 1966 pour avoir voulu imposer un mannequin noir en couverture... et cultivé des amitiés trop à gauche au goût de ses patrons américains. Elle devient membre de l’Académie en 1983 et est élue présidente en 2002. Elle ne cèdera la présidence à Bernard Pivot qu’en 2014. Le 7 janvier dernier, elle avait démissionné de l’Académie pour raisons de santé. Lorsque la Seconde Guerre mondiale éclate en 1939, Edmonde Charles-Roux prépare un diplôme d’infirmière. Volontaire, elle est affectée dans un corps d’ambulancières, dans une unité de la Légion étrangère, le 11e régiment étranger d’infanterie. Blessée en 1940, lors du bombardement de son hôpital de campagne, elle continue néanmoins son secours aux blessés et est décorée de la Croix de guerre. «Edmonde était une femme de justice, et elle ne le cachait pas. Malgré qu’elle ait vécu dans un milieu diplomatique, elle a toujours dit ce qu’elle pensait. Elle découvre l’Afrique du Nord grâce à son père et éprouve une grande attirance pour la civilisation arabe, ainsi que que pour sa poésie», témoigne un confrère. «Son œuvre est très profonde et constitue des références pour la littérature universelle. Elle écrit Isabelle du désert et puise dans la vie d’Isabelle Eberhardt», dit-il. A la sortie de son roman Un désir d’Orient en 1989, elle confie dans une interview : «L’histoire d’Isabelle, la musulmane qui traversait le désert et racontait non pas l’Orient des mirages, des harems, mais celui de la vie quotidienne, de la colonisation, avec une honnêteté intellectuelle formidable. Elle parle de la situation du soldat arabe qui rentre dans son village, qui boit, qui court les femmes, qui a oublié sa religion, qu’on méprise. Voir, écrire cela entre 1900 et 1904, ce n’était pas ordinaire ! Lorsqu’Isabelle rencontrera Lyautey, elle comprendra son projet, elle prendra fait et cause pour lui. On a même prétendu qu’elle était une espionne. Ce qui est faux. Tout cela je le raconterai dans ce deuxième volume. Oui, j’admire Isabelle la cosmopolite qui parlait six langues. Et en même temps elle m’a exaspérée, sa lucidité va de pair avec un dégoût de l’Europe. C’est une hippie avant la lettre.» Edmonde Charles-Roux a laissé de belles œuvres : Oublier Palerme, Elle, Adrienne, Un désir d’Orient, Nomade j’étais, sont traduites en une vingtaine de langues.
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