mercredi 20 janvier 2016

La famille révolutionnaire se serre les coudes

C’est le grand déballage. Après le procès des années 1990 et les attaques visant les généraux qui ont poussé à l’arrêt du processus électoral après la victoire de l’ex-FIS, c’est au tour du rôle des acteurs de la guerre de Libération de remonter à la surface. Des documents de l’armée française, publiés par le quotidien arabophone Ennahar, mettent en cause Yacef Saâdi et Zohra Drif-Bitat qui auraient fait des confessions sur l’organisation du FLN pendant la Révolution armée après leur arrestation par les parachutistes du colonel Bigeard. Selon les documents datés du 8 octobre 1957, ils auraient balancé tout l’organigramme de l’organisation des groupes de fidayin lors de leur interrogatoire. Si ces accusations ne sont pas nouvelles, elles interviennent alors que depuis 2012, une partie des archives françaises sur la guerre de Libération est accessible aux chercheurs. Déjà en 2011, l’historien Mohamed Harbi était convaincu que la divulgation d’une partie de ces documents serait fracassante. «Je pense que ces archives sont explosives. Moi, j’ai été au ministère des Forces armées comme conseiller de Krim. Belkacem et je peux vous dire que les dossiers sont terribles», avait averti M. Harbi dans les colonnes du quotidien El Watan. Il faut dire qu’au lendemain de l’indépendance, les autorités algériennes, après la crise de juillet 1962, avaient choisi de mettre en place un imaginaire guerrier pour la sauvegarde du système. Cette attitude est encore ancrée dans les esprits d’une bonne partie des acteurs de l’époque, qui continuent de s’opposer à la divulgation de la face cachée de la Révolution. Contacté par téléphone, Saïd Abadou, secrétaire général de l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM), a refusé de s’exprimer sur le sujet. «Pas de commentaire», a-t-il déclaré. Quant à Mustapha Boudina, président de l’Association des condamnés à mort 1954-1962, il juge que «l’histoire ne doit prendre en compte que le côté positif et mettre de côté les divergences». Et d’ajouter : «Ce sont des combattants de la Révolution.» Par le passé, le rôle des deux personnalités durant la guerre de Libération avait été pointé du doigt par d’autres moudjahidine et moudjahidate. C’est le cas de Louisette Ighilahriz qui avait, dans un entretien accordé à El Watan Week-end en 2011, accusé Zohra Drif-Bitat et Yacef Saâdi d’avoir «fauté». Elle racontait son face-à-face avec le capitaine Graziani, lors de son interrogatoire. «A un moment donné,W il s’est approché de moi et il m’a mis sous le nez une photo montrant Zohra et Yacef assis ensemble. Sur cette photo, Yacef écrivait. Il avait les jambes croisées et Zohra était à ses côtés. Il m’a dit : ‘‘Regarde, pendant que tu t’entêtes à ne rien dire, eux ils ont déjà parlé…’»

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