mercredi 24 février 2016

L’action syndicale autonome noyée dans les revendications corporatistes

Ballottés entre les manœuvres de l’administration qui empêchent toute ouverture réelle et des conditions de travail de plus en plus précaires, les syndicats autonomes n’ont pas encore réussi à se constituer en centrale syndicale autonome pouvant «rivaliser» avec la centrale UGTA. Plus d’un quart de siècle après l’ouverture, les organisations syndicales sont noyées dans des revendications corporatistes qui sont le seul soutien dont disposent les millions de travailleurs de plus en plus menacés de précarité. L’UGTA demeure le seul syndicat autorisé dans le secteur économique. «Nous aurions pu peser dans l’orientation du pays. Une centrale syndicale autonome aurait pu empêcher certains choix économiques, elle aurait pu jouer son rôle dans la lutte contre la corruption», estime Meziane Meriane. «Les actions corporatistes effritent la mobilisation et affaiblissent les rangs», soutient M. Meriane, coordinateur national du Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest). L’évolution des différents secteurs de la Fonction publique a exigé une mobilisation sans faille de ces organisations syndicales nées du pluralisme politique et syndical pour peser dans l’orientation du pays et son développement. Mais force est de constater qu’après toutes ces années, l’ouverture n’est que de «façade», précise M. Meriane, ce qui freine l’action des représentants des travailleurs, empêchés de se réunir, de s’exprimer et d’agir. Le pouvoir politique n’a pas rompu avec les pratiques de l’ère du parti unique, préférant, des décennies après l’ouverture, traiter avec un seul syndicat, ignorant les remarques, les propositions et la détresse des autres forces. Ce syndicaliste estime que l’absence d’une volonté politique a empêché le développement du mouvement syndical en Algérie qui ne dispose que de la centrale syndicale du parti unique, réduisant au silence toutes les autres voix appelant au changement. Les syndicalistes algériens admirent d’ailleurs l’expérience des pays voisins. La Tunisie, le Maroc et le Mali sont en train de vivre cette belle expérience du pluralisme syndical, selon M. Meriane, se référant aux multitudes centrales syndicales qui s’y sont constituées. L’arrestation de syndicalistes, les bastonnades infligées aux fonctionnaires qui ont osé manifester leur colère contre la dégradation de leur situation, les actions en justice contre toute action de protestation limitent l’action syndicale. Les formations syndicales se dispersent entre leur combat pour survivre et les actions pour lesquelles elles ont été créées, à savoir la défense des droits des travailleurs. Lyès Merabet, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de santé publique (Snpssp), dénonce «l’attitude négative» des pouvoirs publics contre ces organisations syndicales «qui auraient pu constituer un partenaire social fiable, une force de propositions sur laquelle pourrait s’appuyer le gouvernement et un relais crédible pour l’accompagner dans les différentes politiques prônées», regrette le Dr Merabet, rappelant l’obstacle fait à maintes reprises à la création de la confédération des syndicats autonomes, en apposant un niet catégorique aux demandes introduites par les représentants syndicaux en 1990, en 2001 et début 2016 en empêchant la réunion de syndicalistes à Alger. Mme Maghraoui, secrétaire nationale au Syndicat national autonome des personnels de l’administration publique (Snapap), a, quant à elle, pointé du doigt les restrictions imposées aux fonctionnaires, à travers la précarisation de l’emploi par des contrats temporaires, donnant libre champ à tous les excès et muselant toute revendication de changement.

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