dimanche 22 mai 2016

Les leçons de journalisme de Amar Saadani

Le secrétaire général du FLN, Amar Saadani, fait feu de tout bois. A chaque fois qu’il est politiquement au fond du trou, que la presse se fait l’écho de bruissements du sérail le présentant en disgrâce et en fin de mission par rapport à son rival du RND, Ahmed Ouyahia, qui reprend du galon après le dernier congrès de ce parti, le voilà qu’il tente de rebondir en s’attaquant aux forces saines de ce pays qui n’ont pas fait allégeance, comme lui, au système. C’est la seule force dont il dispose – celle d’invectiver et de diffamer ses adversaires en toute impunité – pour négocier sa place dans le système. C’est le loup-garou du pouvoir ! Plus il se déchaîne et se défausse contre des hommes et des femmes libres qui refusent que l’Algérie pour laquelle sont tombés un million et demi de martyrs soit livrée à la prédation, plus il pense pouvoir gagner les faveurs et la confiance du pouvoir et arriver ainsi à continuer à arrimer son wagon brinquebalant à la locomotive du sérail. C’est que l’homme est moralement et politiquement mal placé pour donner des leçons d’indépendance, de probité intellectuelle, de vertu, de patriotisme. Lui, le sous-traitant en chef du système qui ne fait aucun pas, aucune déclaration sans en être missionné par ses mentors. Il occupe la scène médiatique quand on le lui demande, et s’éclipse lorsqu’il faut faire le dos rond pour se préserver, mais tout en étant toujours en embuscade pour frapper à la déloyale, à la manière d’un reptile guettant sa proie. La technique utilisée ne dupe plus personne aujourd’hui. Le mensonge et la calomnie qui lui tiennent lieu d’éléments de langage et de «combat» politique à lui et à ses semblables en mal d’arguments ne passent plus, tellement la couleuvre est trop grosse à avaler. Dans sa dernière sortie, Saadani, entre deux virées parisiennes, se joint à la curée lancée avec une rare virulence contre des parties cataloguées comme étant des opposants à Bouteflika pour tenter de discréditer, aux yeux de l’opinion, les forces politiques et sociales, les médias qui refusent la privatisation de l’Etat et du pays au profit du clan au pouvoir. Après avoir épuisé tous les arguments fallacieux de la main de l’étranger, déversé sa bile sur «la presse mercantiliste», Amar Saadani sort cette fois-ci de son chapeau de paille un fétu de scoop en accusant le journal El Watan d’être «le porte-parole des généraux écartés» et du DRS et notre journaliste d’investigation, Salima Tlemçani, de rédiger ses reportages sous la dictée des généraux. C’est la preuve par Saadani que les informations que rapporte El Watan font mal et font mouche. Selon Saadani, un bon journaliste vertueux, pour reprendre une expression chère au ministre de la Communication, est un journaliste qui s’abreuve à la seule source institutionnelle du pouvoir et de ses satellites. Tout ce qui ne vient pas des cercles du pouvoir et de ses relais est suspect et n’est que manipulation, à bien suivre le professeur en journalisme Amar Saadani. Ce pitoyable débat dans lequel on cherche, non sans calculs, à entraîner la presse et l’opinion vise, on l’aura compris, à faire diversion pour la détourner des véritables enjeux auxquels fait face le pays. On aurait aimé que le secrétaire général du FLN et tous ceux qui, dans l’entourage du pouvoir, se disent préoccupés et scandalisés par les manquements aux règles de l’éthique et de la déontologie de la part des publications qui dérangent le pouvoir se prononcent sur le fond du travail informationnel de ces journaux qui semblent hanter leurs nuits. L’information est soit vraie, soit fausse. S’il y a diffamation, il y a des voies légales pour sanctionner le support médiatique en faute. Dans le dossier de l’ancien ministre de la Justice M. Adami révélé par El Watan que l’on accuse perfidement aujourd’hui d’être derrière le décès (!) de la femme du ministre, faut-il rappeler que la justice n’a rien trouvé à l’époque pour épingler El Watan tant les documents sur lesquels le journal a travaillé étaient inattaquables. Depuis son lancement, El Watan n’a jamais hésité – indépendamment des gouvernements qui se sont succédé et en prenant tous les risques que l’on imagine – à exploiter des documents sensibles, comme le fameux rapport des généraux dans l’affaire du défunt général Beloucif. Il continuera à le faire toujours avec le même professionnalisme et le même sens élevé de la responsabilité et de la défense des intérêts supérieurs du pays, qui ne sont pas les monopoles exclusifs de Saadani et consorts. Dans les années 1990, des journalistes d’El Watan étaient jetés en prison sous le gouvernement Belaïd Abdeslam parce que le journal avait publié une information qualifiée de «vraie mais prématurée». En diabolisant El Watan, M. Saadani cherche à nous ramener des années en arrière, à revenir à la presse du parti unique et des communiqués officiels.

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