samedi 26 décembre 2015

Recueillement dans la sobriété et l’intimité à Lausanne

La cérémonie de recueillement sera ouverte aux membres de la communauté algérienne en Europe et aux amis suisses du défunt. Aït Ahmed quittera définitivement, jeudi prochain, son exil suisse qui n’a que trop duré pour celui qui fait partie des pères fondateurs de la nation algérienne. Depuis l’annonce de son décès mercredi matin, les membres de sa famille les plus proches se recueillent, restreints par une intimité totale, dans une chapelle du centre mortuaire Montoie de Lausanne. Ils profitent du «calme» helvétique pour faire dignement leurs adieux à un parent si valeureux. Néanmoins, d’après nos informations, la famille organisera une veillée funèbre publique mardi. La cérémonie de recueillement sera ouverte aux membres de la communauté algérienne en Europe et aux amis suisses du défunt. Sa veuve et ses enfants ont ainsi fait le choix de la sobriété et de la décence — valeurs non étrangères au zaïm éternel du Front des forces socialistes (FFS) — dans leur manière de lui rendre un ultime hommage avant le rapatriement de sa dépouille, baignée dans les honneurs, vers l’Algérie, seul «vrai» chez-lui. Il y recevra manifestement un vibrant hommage populaire, d’abord au siège national du FFS à Alger, le 31 décembre, et ensuite dans son village natal à Aïn El Hammam (Tizi Ouzou), le 1er janvier lors de son enterrement. En attendant, le «fief» helvétique du zaïm n’a pas échappé, en toute logique, à la fièvre de prosternation devant l’immensité de ses services glorieux rendus à la nation depuis 1945. En effet, quelques journalistes et plusieurs concitoyens guettaient, depuis jeudi après-midi, la moindre information sur la possibilité de se recueillir une dernière fois sur la dépouille de feu Dda L’Hocine, puisqu’ils ne pourront pas le faire au pays. La plupart ont fait le déplacement à Lausanne depuis Genève, Paris ou encore Bruxelles. Souvent, ses concitoyens se sont rendus au centre hospitalier universitaire Vaudois (CHUV) où s’est éteint Si L’Hocine à l’âge de 89 ans. Faire le deuil en était certainement l’unique quête. Pour cause des fêtes de Noël, réduit était le personnel de ce grand hôpital lausannois. Mais les quelques infirmiers approchés ont exprimé leur «regret d’apprendre la disparition d’un homme sage et dévoué». Emue, une infirmière avoue connaître «Monsieur Aït Ahmed» depuis une trentaine d’années. Fatigué et affaibli par une longue maladie, aggravée par l’accident vasculaire cérébral (AVC) qu’il a subi en janvier 2015, l’artisan de Bandung a rejoint l’Au-Delà «paisiblement, sans souffrance», selon sa famille. Son cœur de fils de la Toussaint a fini par céder à un arrêt cardiaque après une hospitalisation très brève cette fois-ci. Le plus sage des neuf historiques algériens est parti sagement, sans faire de bruit. Paradoxalement, de sa mort paisible a retenti un vacarme tumultueux. Celui d’une mobilisation populaire sans précédent autour de l’héritage de sa mémoire et de ses combats. Le deuil national historique décrété par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a pris effet hier et durera encore sept jours. Les avis sont unanimes. «J’ai appris la triste nouvelle à la télé suisse romande. Ma première réaction était de me demander : qu’a-t-il fait de mal pour mourir en exil ? Je me suis dit que l’Algérie a toujours su donner des grands hommes que le régime a exclus», a regretté Mohamed Chetouane, un ostéopathe algéro-suisse de Fribourg, à 60 km de Lausanne. Il espère, vu l’ampleur de l’hommage national unanime rendu à feu Aït Ahmed, «en tirer de bonnes leçons. En tout cas, j’espère que son combat ne sera pas enterré avec lui. C’était un combat d’un patriote pour l’amour de son pays». Dans le même sillage, notre ancien confrère Madjid Talbi, établi à Genève depuis 2011, a réaffirmé qu’«il s’agit d’une grande perte pour une Algérie qui cherche encore son chemin de liberté. C’est une lumière qui s’est éteinte pour notre génération assoiffée de démocratie». Pour lui, l’héritage de l’ancien patron de l’Organisation Spéciale est celui d’«un homme qui a toujours défendu son pays avec une conviction ferme, tout en rêvant d’un idéal que les obscurantistes opportunistes ont jusque-là toujours détruit». Quant à Belkacem Amarouche, l’un des premiers arrivés à Lausanne au lendemain de l’annonce du décès de Si L’Hocine, il pense que «sa mémoire peut métamorphoser nos actions politiques et citoyennes pour un avenir meilleur et radieux de notre pays». Toujours optimiste, le député FFS de la circonscription électorale Europe-Amérique, dont fait partie la Suisse, a martelé qu’«Aït Ahmed a toujours inspiré les choix du FFS et son idéal nous guidera sûrement à faire plus d’efforts pour l’édification d’un réel Etat de droit en Algérie», rappelant que le fondateur du FFS et son président pendant un demi-siècle a toujours porté le flambeau de la liberté et la démocratie. «Il a, dit-il, défendu dignement les intérêts de toutes les Algériennes et tous les Algériens, que ce soient ceux établis en Algérie ou ceux établis à l’étranger. Il leur souhaitait une citoyenneté ouverte sur l’universel.» 

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