Le développement de l’appareil productif national semble un slogan creux. Plus de quatre années après l’annonce d’un nouveau modèle économique visant la diversification des exportations, très peu de choses ont été faites. Le ministère de l’Industrie, censé préparer le terrain et réunir toutes les conditions pour créer une véritable industrie nationale, semble pécher par manque de stratégie. Les polémiques récurrentes sur la balbutiante industrie de montage automobile et l’ampleur qu’elles prennent renseignent sur l’absence d’une politique industrielle claire, aux objectifs bien définis. En rendant publics tout récemment les prix des véhicules sortis d’usine, le ministère de l’Industrie a démontré un intérêt tout particulier à cette branche d’activités qu’il semble suivre de près plus que toutes les autres industries, dont certaines sont totalement à l’abandon, quand elles ne sont pas soumises à la loi de la jungle. Les Algériens savent aujourd’hui combien coûte le véhicule monté localement à sa sortie d’usine. Mais ils ne savent pas combien coûtent à la sortie d’usine le kilogramme de pâtes, le litre d’huile de table, le pot de yaourt, la boîte de fromage, le paquet de biscuits, le sac de semoule, le sac de ciment, le quintal de rond à béton... Car, tous les Algériens ont constaté la hausse importante des prix de divers produits, allant de l’alimentaire, aux vêtements en passant par tout ce qui est manufacturier, les matériaux de construction... Des hausses qui vont jusqu’à 100% pour certains produits touchés par l’interdiction à l’importation. Une hausse que la seule dépréciation du dinar ne peut expliquer. S’il est vrai que l’automobile passionne les Algériens et que pouvoir produire des véhicules localement reste un prestige que tous les pays n’ont pas, il n’en demeure pas moins que cette branche d’activité ne peut pas constituer, à elle seule, l’industrie nationale. En effet, l’intérêt du ministère de l’Industrie, en charge de ce secteur, ne doit pas se limiter à une seule branche d’activité. Son plan d’action doit coiffer l’ensemble du secteur, de l’agroalimentaire à la métallurgie, en passant par la pétrochimie, la sidérurgie et l’électronique. Cela d’autant plus que beaucoup reste à faire pour sortir notre pays de cet immense désert industriel. Tout le monde sait que l’Algérie n’arrive toujours pas à produire localement. Les taux d’intégration, bien qu’ils varient d’une filière à l’autre, demeurent des plus faibles dans la région. Notre industrie est dépendante du savoir-faire étranger et surtout des intrants importés. Il n’y a pas une seule filière qui échappe à ce triste constat, reflété notamment par la structure des exportations. En effet, la «rubrique» relative aux équipements, intrants et diverses matières et composants destinés à l’industrie nationale représente 65% des importations globales. Et les produits faits localement ne sont pas toujours moins chers que ceux importés. Si l’on prend, par exemple, le cas de l’industrie pharmaceutique, le générique fabriqué localement coûte plus cher que le produit importé. L’une des raisons de ce coût élevé est que tous les intrants viennent de l’étranger. Qui doit-on blâmer ? Le producteur qui ne trouve pas localement de fournisseurs ou l’Etat qui n’a rien fait pour permettre le développement de l’ensemble des filières industrielles ? En effet, en Algérie, l’industrie des intrants est quasi inexistante. Et même quand elle existe, elle ne correspond pas aux normes requises en la matière. Ce constat a été établi par bien des producteurs. Le cas le plus récent est celui des céramistes qui ont interpellé le Premier ministre sur l’absence de fournisseurs locaux de frites et engobe deux intrants, qui entrent dans la fabrication de la céramique, interdits à l’importation. Dans le domaine de l’électroménager ou l’électronique, les producteurs nationaux ramènent l’essentiel des composants de l’étranger. Même les entreprises publiques font dans ce qu’on appelle en jargon économique du CKD, SKD et dépendent totalement du marché extérieur. Les exemples sont nombreux et tous illustratifs de ce désert industriel, qui n’est que le résultat de la gestion politicienne des affaires économiques. Malgré toutes ces déficiences dont souffre notre industrie et l’énorme retard à rattraper, l’acte d’investir n’est toujours pas libre dans notre pays. Combien de dossiers d’investissement sont en souffrance au ministère de l’Industrie ou au niveau du Conseil national d’investissement qui attendent l’aval d’on ne sait quelle puissance ? Combien de projets sont bloqués par des bureaucrates qui sont beaucoup plus préoccupés par leur carrière que par l’avenir de l’industrie ? Le réveil industriel ne semble pas pour demain.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire