Les critiques contre le plan d’action du gouvernement Ouyahia se suivent et s’exacerbent. C’est au tour de l’ancien ministre de l’Economie, Mourad Benachenhou, de «crucifier» l’actuel Premier ministre et de vilipender le «programme présidentiel» qui sert de paravent pour les différentes équipes gouvernementales sous Bouteflika. Dans une tribune publiée par le Quotidien d’Oran dans sa livraison de jeudi passé, M. Benachenhou rappelle d’abord que la crise économique qui secoue violemment le pays n’est pas soudaine, mais le produit d’une succession de mauvaises décisions depuis au moins dix ans. «Brusquement, semble-t-il, un de ceux qui sont au dernier étage de la hiérarchie du pouvoir a pris la peine de regarder par sa baie vitrée, et il voit un gros nuage noir dans le ciel, juste au-dessus de sa bâtisse super-sécurisée. Et il découvre, par hasard, que le pays est en plein ouragan ! Un ouragan dont les signes précurseurs datent de neuf ans. (…) Il faut beaucoup de temps, une série ininterrompue de mauvaises décisions, prises sur une longue période, sans réflexion, pour que le pays soit déclaré en ‘‘état de redressement’’ (…)», assène l’économiste. L’ancien ministre sous le gouvernement de Réda Malek s’interroge à cet effet sur l’incapacité d’anticipation et de voir se former cet ouragan économique. «Comment se fait-il que des responsables qui ont à leur disposition des centaines de milliers de fonctionnaires, qui ont accès en temps réel aux informations économiques les plus confidentielles du pays, aient mis autant de temps à s’apercevoir que la météo ‘‘économico-financière’’ annonçait un cyclone ?» s’interroge-t-il. Pour lui, c’est la preuve que le sommet de la hiérarchie «ne tient les rênes du pouvoir que de manière plus ou moins chronique, et non de façon continue, comme le demande sa haute fonction». Connu plutôt pour sa pondération, Mourad Benachenhou brocarde avec force le discours dit «transparent» du Premier ministre. «Une transparence qui cache la vérité». Celle de la responsabilité du désastre économique annoncé. Une stratégie qui consiste à faire peur pour passer sous silence les responsabilités. «Le scénario change ; les Algériennes et Algériens sont noyés sous une avalanche de chiffres à donner le tournis, et dont l’objectif est de les mettre en situation de panique extrême afin de leur faire avaler la dure pilule du ‘‘redressement de bilan,’’ tout en leur faisant oublier que ce sont les artisans de cette situation qui continuent à régner. Sans perdre leurs privilèges ni souffrir d’une interruption quelconque dans leurs pouvoirs ou leur autorité, ces ‘‘artisans’’ passent du rôle de ‘‘démolisseurs’’ à celui de ‘‘redresseurs,’’ toute honte bue, et en voulant faire oublier leurs responsabilités totales et sans partage, tout autant que leur pouvoir dans cette triste situation du pays», cingle-t-il «Faire peur pour effacer ses propres responsabilités !» accuse-t-il encore. Ahmed Ouyahia en prend pour son grade. M. Benachenhou pousse encore son analyse pour situer l’objectif politique : «Derrière cette stratégie politique, il y a, en fait, une volonté de maintenir le statu quo à la fois économique et politique, en soulignant les aspects financiers de la crise actuelle, qui est non une cause, mais une conséquence et tend à transformer les problèmes auxquels est confronté le pays en problèmes exclusivement comptables de redressement, dont même la durée a été ‘‘officiellement’’ fixée à trois ans, sans doute à la minute près !» dissèque l’ancien ministre. Le programme présidentiel dont tous les responsables se réclament en le présentant comme étant l’unique salut passe à la moulinette de l’expert Benachenhou. «Malgré cette tentative de brouiller les cartes, cette ‘‘transparence’’ constitue une reconnaissance implicite de l’échec de ce programme, qui a encouragé le consumérisme cosmopolite, tout en décourageant la diversification de la production nationale, et a exacerbé la dépendance économique dont souffrait déjà le pays depuis longtemps», ajoute-t-il encore. et de conclure que l’équipe Ouyahia est un «gouvernement de sursis, dont l’objectif est de gagner du temps plus que de redresser la situation», charge Mourad Benachenhou.
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