Pâturages d’Algérie est la première laiterie de statut privé, fondée en 1998 dans la wilaya de Tizi Ouzou. Son gérant, M. Ounoughene, revient sur les difficultés et les perspectives de la filière lait dans l’entretien qu’il nous a accordé. - Quelles sont les principales difficultés que rencontre une entreprise telle que la vôtre ? Il y a d’abord le marché et ensuite le consommateur lui-même. Notre marché était jusque-là inondé de produits d’importation et cela aux dépens du producteur local. Dès lors que c’est l’importation qui est favorisée, on ne peut aspirer à produire plus et mieux. En conséquence, le consommateur est séduit par le produit importé et le choisit. Il y a également le problème des coûts en raison de la maîtrise technologique. Il est alors difficile pour nos produits d’avoir une place de choix sur les étals. - Pourtant selon le Premier ministre, il y a une pléthore de laiteries en Algérie... Il y a peut-être une pléthore de laiteries dans le pays. Mais, pour la majorité, ce sont des laiteries qui font de la reconstitution de lait à partir de la poudre importée. Cependant, les véritables professionnels dans le secteur, tels que les producteurs de fromage, il n’y en a pas en grand nombre. Dans notre métier, il y a des usines qui sont approvisionnées en poudre de lait et qui se limitent à la transformation et d’autres qui achètent de la matière première pour en faire des produits intrants, et c’est ce que nous nous attelons à faire depuis longtemps déjà. - Le producteur national est-il en mesure de répondre aux besoins du marché domestique ? Nous considérons que la satisfaction de la demande locale est à portée de main. Il faudrait valoriser la production en amont, encourager l’éleveur, le collecteur et le transformateur. Il ne s’agit pas de faire uniquement du lait en sachet, mais fabriquer des produits à valeur ajoutée que sont les matières premières fromagères et tous les types de fromage de consommation. Nous sommes attentifs aux mesures du gouvernement, surtout celles qui vont dans le sens que nous attendons, comme la protection et le développement de la production nationale. Nous avons dans notre entreprise un savoir-faire qui nous permet de transformer les matières premières basiques importées en complément à la production nationale. A Pâturages d’Algérie, on pourrait répondre à la fois à la demande locale et exporter. En tout cas, on est déjà dans ce process. On a la matière première et nous approvisionnons des transformateurs publics et privés. On se positionne sur le marché et notre challenge est la recherche et le développement depuis des années. Cela fait 15 ans que nous avons commencé à développer des process pour l’industrie locale. On avait du mal à convaincre nos partenaires, mais à présent, on s’impose par notre savoir-faire. Quelles sont les principales propositions que vous faites pour l’essor de la filière ? Il faudrait lancer une profonde réflexion et passer rapidement à l’action. Lorsque l’Algérien consomme un litre de lait reconstitué, il doit savoir que la subvention de ce produit va à l’éleveur et le transformateur du pays exportateur. Et, dans ces pays-là, les filières agricoles et agropastorales sont essentielles. Pour faire face aux aléas, les pouvoirs publics apportent des soutiens. En Algérie, les droits de douanes sont très limités et c’est au désavantage du produit local. On devrait penser à taxer le lait d’importation et subventionner le produit local. Dans d’autres pays, la protection du produit local se traduit par la surtaxation du lait importé. En période de faible lactation, les vaches laitières étant moins productives, comme en hiver, on importe du lait pour répondre au déficit, et puis dès que la lactation remonte, on revient à la surtaxation. C’est ainsi qu’on définit la régulation. Du point de vue du savoir-faire, la filière lait est dense, allant de la traite des vaches jusqu’aux tours d’atomisation pour produire la poudre de lait. La filière a besoin de complémentarité pour créer de véritables coopératives. De mon point de vue, il serait préférable d’importer de l’eau pour développer la filière que d’importer de la poudre de lait. Nous sommes optimistes pour peu que les voies soient dégagées et les horizons plus clairs.
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