mercredi 2 décembre 2015

«Il y a un risque de perte de confiance en le dinar»

L’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie met en garde contre une dépréciation continue de la valeur du dinar algérien. Selon lui, l’économie nationale a besoin d’investissements qui ne peuvent se faire, cependant, dans un contexte de renchérissement des prix des équipements et des matières premières importées, conséquence inévitable de la valeur dépréciée du dinar. La valeur du dinar a connu une baisse de plus de 25%. Quel est, selon vous, l’impact de cette baisse sur les ménages et les entreprises ? D’une manière générale, la dépréciation de la valeur du dinar algérien est préjudiciable à l’économie. Elle va, certainement, accentuer la baisse du pouvoir d’achat des ménages, accroître le coût de revient de production des entreprises et décourager beaucoup d’entre elles à investir. Il y a aussi un risque que la population perde confiance en leur monnaie nationale, si cette dépréciation continue dans le temps. Nous pouvons constater cela, d’ailleurs, sur le marché parallèle de la devise où il y a vraiment une flambée qui incite à la fuite des capitaux. Si cela continue, il y aura un appauvrissement grave des ressources du pays et de la masse monétaire considérable que les pouvoirs publics veulent mobiliser pour relancer l’activité économique. Selon vous, cette baisse va-t-elle s’accentuer ? Et que peut faire la Banque d’Algérie pour y mettre un terme ? J’ai l’impression que la Banque d’Algérie est consciente des risques que provoque une dépréciation continue du dinar. Elle dit qu’elle a été obligée de recourir à la dépréciation en raison de la crise que subit l’économie et de la perturbation des fondamentaux de l’économie (déficit de la balance des paiements, déficit budgétaire, baisse de la croissance, augmentation de l’inflation, etc.). La Banque d’Algérie affirme qu’il n’est pas très réaliste de continuer à avoir une monnaie forte, alors que l’économie s’est affaiblie, en ce sens qu’il y a un décalage trop important entre la valeur du dinar et la situation de l’économie nationale. Il y a des indices qui laissent entrevoir une forte inflation en 2016. Quelles sont vos prévisions ? Il est clair qu’aujourd’hui nous dépendons fortement de l’étranger, aussi bien pour les produits de consommation que pour ceux nécessaires à la production, les intrants, les équipements et autres. Une dépréciation du dinar entraînera inévitablement une inflation due au renchérissement des prix de tout ce que nous importons. Et l’expérience a montré qu’à chaque fois qu’il y a une dépréciation de la monnaie, l’augmentation des prix dépasse le taux de dépréciation. L’économie nationale a besoin d’investissements et augmenter le taux d’intégration dans ces investissements. Cela ne peut se faire qu’avec l’importation des intrants et des équipements. Mais si nous déprécions notre monnaie, nous provoquerons un renchérissement des prix qui va décourager les investisseurs aussi bien nationaux qu’étrangers, d’autant que nos importateurs ne s’approvisionnent pas auprès des producteurs directement, ce qui rend les produits importés beaucoup plus chers comparativement à ceux importés par d’autres pays. Que faut-il également craindre en 2016, à la lumière de certaines dispositions contenues dans la nouvelle loi de finances ? Il y a surtout ce problème de l’inflation qui va affaiblir encore le pouvoir d’achat des citoyens, d’autant plus que pour procéder aux ajustements nécessaires, l’Etat va être obligé de réduire les subventions et le soutien des prix de certaines marchandises. Mais ce qui est le plus à craindre, outre la perte de confiance en la monnaie nationale, c’est l’impact sur la production et la croissance, en ce sens que les  investissements vont diminuer à cause de l’augmentation des prix. C’est pourquoi la Banque d’Algérie, me semble-t-il, cherche maintenant à stabiliser le dinar pour éviter une autre dépréciation. 

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