«Les investissements consentis en Algérie depuis des années n’absorbent que 20 à 25% de leurs capacités du fait que les entreprises qui interviennent en aval ne recourent souvent pas aux produits fabriqués localement», remarque le ministre du Commerce. Nous ne voulons pas priver les Algériens de consommer ce qu’ils veulent, mais il s’agit de provoquer un choc dans l’économie nationale». C’est là une mise au point du ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, concernant la question de la suspension de l’importation de certains produits. Invité de la Chaîne 3 de la Radio nationale, le ministre a expliqué que la suspension des importations vise fondamentalement à redresser la balance commerciale, qui demeure déficitaire, et à promouvoir la production nationale: «J’ai entendu dire que nous voulions priver les Algériens de consommer ce qu’ils veulent. Non, ce n’est pas du tout cela l’objectif. Le but est d’arriver à tout prix à assurer progressivement une intégration de tout ce qui se produit localement pour faire de la substitution à l’importation.» Pour le ministre, le dispositif de suspension de 851 produits à l’importation a un caractère temporaire. Cette disposition sera probablement levée dans deux ou trois ans, et les marchandises concernées par cette mesure feraient l’objet d’un suivi permanent durant la période de la suspension. Le ministre étaye ses propos par des chiffres. Il précise que «les investissements consentis en Algérie depuis des années n’absorbent que 20 à 25% de leurs capacités du fait que les entreprises, qui interviennent en aval, ne recourent souvent pas aux produits fabriqués localement». Par contre, les importations représentent 80% du chiffre d’affaires de l’industrie nationale. Dans le détail, le ministre constate que les produits les plus importés, et qui, ensemble, représentent environ 40% des importations algériennes en 2017, sont les biens alimentaires (9,4 milliards de dollars en 2017), les produits pétroliers (2 milliards de dollars), l’acier (3 milliards de dollars), les médicaments (2 milliards de dollars) et les véhicules SKD et CKD (1,6 milliard de dollars). «Il faut s’attendre à ce que les prochaines années, avec la montée en cadence des usines, le montant des importations de véhicules en CKD et SKD passe à 2, voire 3 milliards de dollars», a-t-il soutenu. Le coût important en importation des véhicules à monter en Algérie sous les systèmes CKD et SKD est expliqué par le ministre par «la faible valeur ajoutée locale dans le processus de production», ce qui a poussé le gouvernement à mettre en place un nouveau cahier des charges et qui prévoit «obligatoirement de monter en cadence en termes d’intégration et de contribution de la valeur ajoutée locale dans le processus de fabrication». Concernant les subventions, le ministre a reconnu que l’Etat subventionnait indirectement les importations à travers un taux de change du dinar «surcoté» sur la place officielle. Les subventions à l’origine de détournements «Le dinar est surcoté sur la place officielle et son véritable niveau est probablement plus proche de celui du marché parallèle. L’Etat est donc en train de subventionner indirectement l’importation», a-t-il déploré, affirmant qu’il faudrait que l’institution d’émission, qui gère la parité du dinar, travaille davantage à ce que les deux taux se rapprochent. Autant dire que le ministre appelle à une dévaluation du dinar. En outre, M. Benmeradi a laissé entendre que le système de subvention est à l’origine de détournements et de pratiques frauduleuses. «Nous sommes en train de travailler pour voir concrètement comment basculer d’un système de subvention généralisé vers un système ciblé qui nous permettra de mettre fin à cette incohérence qui contribue aux dérèglements observés dans le commerce extérieur», note le ministre, soutenant que le système de subventions directes a profité beaucoup plus «à ceux qui en ont le moins besoin, parfois à des entreprises et non à des ménages». En plus du dinar surcoté, qui, selon le ministre du Commerce, augmente la facture des importations, l’Etat subit également des pertes infligées par la surfacturation qui est un phénomène avéré. «La surfacturation existe, mais je ne peux pas dire dans quelle proportion, nous n’avons pas de chiffres. Actuellement, nous travaillons pour essayer de cibler les courants de fraude. Quand vous examinez les bases de données statistiques détenues par les institutions internationales et que vous les comparez aux déclarations d’importation faites au niveau des Douanes algériennes, vous trouvez toujours une différence», a expliqué le ministre du Commerce.
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