dimanche 26 juin 2016

Des députés s’insurgent contre le coup de force de l’Exécutif

Six autres projets de loi d’une grande importance vont être votés demain alors qu’il n’y a aucune urgence à les valider dans la précipitation. Une situation qui suscite crainte et colère chez les députés de l’opposition… Après avoir dénoncé la programmation effrénée de plusieurs projets de loi d’une grande importance pour la vie politique et économique du pays, les députés de sept partis politiques — le Front des forces socialistes (FFS), le Parti des travailleurs (PT), le Front pour la justice et le développement (FJD), le Mouvement pour la société et la paix (MSP), Ennahda, parti El Karama, El Islah — se sont réunis hier pour décider de l’action à mener afin de faire face «au coup de force» de l’Exécutif qui veut faire passer tout un arsenal législatif «qui va à l’encontre du multipartisme, de la démocratie et de l’Etat de droit». Les contestataires ont émis plusieurs options avant de retenir celle qui consiste, dans un premier temps, à aller en force aujourd’hui à la plénière, consacrée au débat sur le code électoral et de mettre en exergue «le caractère extrêmement dangereux de ce projet de loi sur la démocratie». Plusieurs articles, sur les 2002 que compte ce texte, font polémique et constituent, selon les députés, «une grave violation de la Constitution». A titre d’exemple, ils citent les articles 73 et 94, qui excluent les partis n’ayant pas obtenu plus de 4% des voix, lors des dernières élections législatives (en 2012), des prochaines échéances. «Nous savons tous, et de l’avis même de ceux qui ont organisé les élections de 2012, qu’il y a eu fraude et que les résultats ne reflètent pas la réalité du suffrage. Comment peuvent-ils venir aujourd’hui exclure ceux auxquels ils ont donné 4% des voix ? Ils veulent préparer le terrain aux partis de la coalition en éliminant tous ceux qui les gênent», s’inquiètent les députés contestataires. D’autres articles sont également pointés du doigt, comme celui lié au poste de président de l’APC, qui revient au parti qui a obtenu le plus de sièges, ou encore celui de l’interdiction faite aux fonctionnaires de la commune de se présenter aux élections, sans oublier l’article relatif au président de l’APC, poste qui revient en cas de conflit à celui qui a le plus de sièges. Autant de dispositions arbitraires et liberticides qui mettent en danger les acquis démocratiques des Algériens. Aujourd’hui, nous dit-on, les contestataires seront mobilisés pour mettre à nu ce «coup de force» et dévoiler «les objectifs inavoués de l’Exécutif». Les parlementaires comptent également dénoncer la planification effrénée d’autres projets de loi, qu’ils jugent «liberticides» et dont six sont déjà programmés pour être votés demain. Il s’agit des deux ordonnances relatives à l’obligation de réserve imposée aux retraités de l’armée et aux réservistes, objet d’une grande polémique, du code des investissements, le règlement budgétaire, la loi qui régit les relations entre les deux Chambres et le gouvernement et celle relative aux commissaires-priseurs. Un programme très chargé surtout qu’il est question de lois organiques qui appellent à une plus grande réflexion d’abord au sein de la société avant d’arriver à l’APN désertée, y compris lorsqu’il s’agit de lois organiques. L’exemple le plus navrant a été donné lors des discussions relatives au code des investissements, où seulement 36 députés sur les 462 que compte l’Assemblée étaient présents. Ce qui dénote le désintérêt et la démobilisation des parlementaires, y compris ceux de l’alliance gouvernementale. Raison pour laquelle les représentants de sept formations politiques ont décidé de dénoncer la gestion de l’Assemblée et d’interpeller l’opinion publique sur ce qu’ils estiment être «une mise à mort» du champ politique par des lois «scélérates», avant la prochaine échéance électorale. Lors de leur réunion d’hier, ils ont décidé de «rester mobilisés» et de ramener à leur rang les nombreux députés des autres formations politiques, dont ceux de l’alliance gouvernementale, restés jusque-là silencieux, «mais qui désapprouvent la politique de l’Exécutif». Pourquoi tant d’empressement à vouloir faire passer des projets de loi, extrêmement importants, en un laps de temps très réduit ? Une question que se pose une grande partie des parlementaires, d’autant que depuis deux semaines, ces derniers sont ballottés entre les débats en commission, qui finissent toujours en queue de poisson, après le rejet des amendements, et des plénières souvent houleuses. Pour bon nombre d’entre eux : «A l’approche des élections législatives de 2017, l’Exécutif est en train de baliser le terrain. Il a mis en place un dispositif législatif qui lui permet d’agir en toute quiétude aussi bien sur le terrain politique, à travers des élections bien ficelées, sans aucun contrôle, et sur le terrain économique, avec des décisions aux conséquences douloureuses pour les citoyens. Il ne peut pas prendre le risque d’attendre la rentrée sociale. Le mois de Ramadhan et le début de l’été constituent les moments propices pour faire passer comme une lettre à la poste tous les textes liberticides, en profitant de l’absentéisme et du désintérêt des uns et de la vulnérabilité des autres. Les députés n’ont pas le temps d’aller au fond des textes, ni  d’en étudier la forme pour relever les articles les plus pernicieux.» Aujourd’hui, ils comptent jouer les perturbateurs, même si au fond ils savent que leurs chances de faire passer des amendements sont vraiment minimes, sauf surprise. Tout comme, ils ne croient pas vraiment à un report du vote des six projets de loi prévu demain.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire