vendredi 3 juin 2016

L’ambassadeur d’Algérie en France : «Nous ne cherchons pas à contrôler l’islam en France»

La Mission sénatoriale d’information sur l’organisation, la place et le financement de l’islam en France et de ses lieux de culte a reçu, mercredi, Amar Bendjama, ambassadeur d’Algérie en France. L’intervention de l’ambassadeur d’Algérie en France Amar Bendjama devant la mission sénatoriale a été retransmise en direct sur le site internet de la Haute Assemblée française. Au cours de son propos liminaire, le diplomate a rappelé que l’immense majorité de la population algérienne «99,99%» est musulmane en Algérie : «L’islam fait partie du quotidien des Algériens. Il est inspiré de la tradition sunnite, rite malékite. Un islam du juste milieu, modéré, empathique, ouvert sur la recherche, le questionnement, sur la modernité». Parlant des années noires en Algérie, sans citer nommément cette période, il a souligné que c’est cette tradition de «tolérance et de capacité de débat et d’ouverture» qui «a permis de mettre en échec les tentatives propagatrices d’idées étrangères à la société». Concernant la communauté algérienne en France, il a avancé le chiffre de 2 millions d’Algériens immatriculés dans les 18 consulats en France : «Ces Algériens sont pour les deux tiers franco-algériens», a-t-il ajouté indiquant que «la communauté d’origine algérienne constitue la part principale de la communauté musulmane en France». C’est pour cela, a-t-il insisté, que le gouvernement algérien «depuis toujours a consenti un effort financier considérable pour soutenir ou pour répondre aux demandes de cette communauté. Les demandes se font en deux directions : pour les aider à financer des travaux pour mettre aux normes les locaux des lieux de prière et des cultes. Nous participons aussi de manière épisodique et jamais de manière unilatérale et unique, en apportant la mise première qui permet aux associations de récolter de l’argent pour construire un lieu de culte. Nous ne participons jamais à la construction ou la réhabilitation d’un lieu de culte. Par notre dépôt financier, nous considérons que nous apportons un témoignage de légitimité à l’action de ces associations en répondant à leur appel pressent. Ce soutien à des associations est minime. D’après notre comptabilité, nous avons distribué à une cinquantaine d’associations un peu moins de 4 millions d’euros il y a 5 ans. Depuis, aucune affectation n’a été réalisée». L’ambassadeur d’Algérie a tout de même mis l’accent sur l’effort financier consenti dans deux directions : «Pour soutenir le fonctionnement de la Grande mosquée de Paris dont les relations avec l’Algérie sont évidentes, des relations qui appartiennent à notre histoire commune et, d’autre part, nous accompagnons financièrement le déploiement d’une centaine d’imams dans des mosquées gérées par des associations essentiellement algériennes dans toute la France. Tout ceci se fait de manière extrêmement transparente, c’est-à-dire par les réseaux bancaires et pour le déploiement en relation avec le ministère de l’Intérieur et des préfectures.» «Aucune emprise politique» Pour ce qui concerne la Mosquée de Paris, M. Bendjama a avancé le montant de 2 millions d’euros annuels pour son fonctionnement et l’animation de l’Institut El Ghazali. Quant au coût du déploiement des imams algériens en France, détachés pour quatre ans, il reviendrait globalement à 300 000 euros par mois pour le règlement des salaires. L’ambassadeur a été assez vif sur la notion de séparation entre les musulmans et leur pays, avancée par la sénatrice Nathalie Goulet qui lui posait la question : «Nous n’avons aucune emprise politique sur les mosquées et nous ne cherchons pas à en avoir… Je n’ai jamais entendu parler d’une proposition de couper l’islam des musulmans français des pays d’origine et je m’interroge sur la capacité de quiconque d’interférer dans la relation entre le croyant et Dieu (…).» Abordant les exemples marocain et turc qui investissent dans la mise en place de mosquées, l’ambassadeur a considéré que l’Algérie n’avait pas «cette ambition et je crois que nous n’avons pas les capacités financières pour contrôler d’une quelconque manière l’islam en France.» Il a ajouté cependant que la nature ayant horreur du vide, «nous travaillons de concert avec le ministère de l’Intérieur pour éviter le vide dans les lieux de prière qui pourrait être dangereux pour notre communauté et pour le pays d’accueil.» Il a, sur ce thème, souligné la formation de haut niveau des imams en Algérie et la continuation de la formation universitaire en France pour ce qui est du perfectionnement en langue française, mais aussi pour apprendre le droit constitutionnel français, l’histoire, le principe de laïcité et le fonctionnement des institutions françaises. Enfin, sur ce qu’Amar Bendjema a appelé «la question sempiternelle d’islam en France ou d’islam de France», il a préféré avancer la notion d’«islam tout court, un islam tolérant qui professe l’amour et le vivre-ensemble, un islam qui puisse être un enrichissement πspirituel et non pas un problème pour le pays d’accueil. Au lieu de prétendre organiser une religion en France, (…), je voudrais vous dire avec humilité mes convictions : sans doute pourrions-nous tous offrir de meilleures conditions pour les musulmans dans ce pays, des musulmans qui sont aussi français, qu’ils puissent pratiquer librement et dans des conditions décentes et dignes leur religion.» Lyon.

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