samedi 4 juin 2016

«Nos relations sont trop fondamentales pour être tributaires des remous de l’actualité au quotidien»

Patrick Mennucci, député des Bouches-du-Rhône et président du groupe parlementaire d’amitié France-Algérie, a défendu, en mars dernier, la volonté du président français François Hollande de commémorer le cessez-le-feu de la Guerre d’Algérie. Se disant très attaché à l’Algérie où il compte de nombreux amis, il a fait partie de la délégation parlementaire conduite par le président de l’Assemblée nationale française, Claude Bartolone, qui a effectué jeudi une visite à Alger. A cette occasion, Patrick Mennucci a bien voulu faire le point sur l’état des relations parlementaires entre l’Algérie et la France. Peut-on connaître, Monsieur Mennucci, l’objet de votre visite en Algérie ? Tout d’abord, c’est toujours un honneur et un plaisir pour moi de me rendre dans votre pays auquel je suis très attaché par des liens aussi bien politiques que personnels et affectifs. Ensuite, en tant que président du groupe parlementaire d’amitié France-Algérie, il est normal que j’accompagne M. Bartolone, qui présidera avec son homologue M. Ould Khalifa les travaux de la grande commission parlementaire algéro-française. Quel est l’état de la coopération parlementaire entre l’Algérie et la France ? Quels sont les principaux dossiers que vous aborderez avec vos homologues algériens ? La coopération parlementaire est un élément essentiel des relations bilatérales entre nos deux pays car elle est moins sujette aux fluctuations liées à l’actualité immédiate. Par ailleurs, depuis quatre ans, j’ai noué des relations de confiance et d’amitié avec mes homologues algériens, en particulier le président du groupe parlementaire algérien, Belkacem Bellabes. Ce climat de confiance et de respect mutuel a donné des résultats appréciables, par exemple le fait d’être arrivés, à notre initiative, à une reconnaissance commune des massacres du 8 Mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata. Enfin, nous avons pesé en coulisses pour faire avancer de nombreux dossiers, en matière sécuritaire et économique notamment. Justement, vous nous avez récemment indiqué qu’il sera aussi question, lors de vos échanges avec vos collègues députés algériens, de la sécurité en Afrique. Au niveau parlementaire, cela est assez inédit. De quoi parlerez-vous exactement ? Comme vous le savez, la France est engagée sur plusieurs théâtres d’opération en Afrique afin de lutter contre notre ennemi commun, je veux bien sûr parler du terrorisme. Il est clair que l’Algérie est la clé de voûte de la sécurité pour une grande partie du Maghreb et de l’Afrique subsaharienne. Par ailleurs, vous savez que notre Constitution prévoit que le Parlement doit être consulté en matière d’opérations militaires extérieures, notamment si celles-ci se prolongent. Notre intervention dans ce domaine est donc parfaitement légitime, dans le respect des prérogatives du Président, du gouvernement et des forces armées. Evoquerez-vous plus généralement la question de la coopération sécuritaire entre l’Algérie et la France ? De votre point de vue, où en est-elle actuellement ? Bien sûr et cela constitue même le thème central de ma communication devant la grande commission. Actuellement, la coopération sécuritaire entre nos deux pays est excellente pour la bonne et simple raison que nous faisons face, ensemble, à la barbarie terroriste. La France a connu les attentats barbares que vous savez, quant au peuple algérien, il a expérimenté dans sa chair cette horreur durant la décennie noire. Les perspectives de coopération resteront, je le crois, excellentes, jusqu’à ce que l’hydre terroriste soit définitivement mise hors d’état de nuire. Des observateurs pensent que le conflit du Sahara occidental, dans le cas où il venait à perdurer, pourrait déteindre sur les relations algéro-françaises qui n’ont probablement jamais été aussi bonnes — du moins, cela jusqu’au tweet du Premier ministre français, Manuel Valls. Cela, disent-ils, en raison du soutien franc accordé par la France au Maroc. Qu’en pensez-vous ? Tout d’abord, permettez-moi d’adresser par votre intermédiaire mes plus sincères condoléances au peuple sahraoui suite à la disparition de son leader, Mohamed Abdelaziz. J’ai eu l’occasion de le rencontrer lorsque je me suis rendu au camp de réfugiés, en septembre 2014. Je garde le souvenir d’un homme entièrement habité par la cause qu’il défendait et représentait. Ensuite, à votre question, je vous répondrais que je ne suis pas un observateur, mais un acteur politique et à la place qui est la mienne, je n’ai pas à «commenter des commentaires». Ceci dit, la position française est connue, basée sur le respect du droit international et non pas dictée par des considérations conjoncturelles. J’ai d’ailleurs moi-même récemment prononcé le discours d’ouverture d’un colloque de soutien au peuple sahraoui qui s’est tenu le 19 avril 2016 à l’Assemblée nationale. Enfin, comme je l’ai indiqué au début de notre entretien, la relation bilatérale est trop profonde, trop fondamentale pour être tributaire des remous de l’actualité au quotidien. (*) Entretien réalisé mercredi 1er juin 2016  

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