dimanche 3 décembre 2017

«L’élection de 2019 est le seul cap» du gouvernement

Des experts de l’Union européenne (UE) suivent avec «préoccupation» le développement de la situation économique et financière en Algérie. S’exprimant lors d’une visite de journalistes algériens aux institutions européennes à Bruxelles, des analystes économiques de la Commission européenne se montrent «préoccupés» par l’orientation prise par le gouvernement algérien, concernant les mesures visant à maîtriser le déficit budgétaire. Certains de ces experts disent «ne pas comprendre le changement de cap du gouvernement, opéré en moins d’une année et demie». «Les élections présidentielles de 2019 semblent être la logique qui prédomine dans le plan d’action du gouvernement», estime le représentant d’une des directions de la Commission européenne, qui a requis l’anonymat. Pourtant, a-t-il fait remarquer, «en 2016,  avec la préparation de la loi de finances 2017, l’Algérie a émis des signaux reflétant l’ambition du gouvernement de diversifier l’économie du pays. Le nouveau modèle de croissance économique annoncé à cette époque portait sur un programme de consolidation budgétaire s’étalant à 2019-2020, pour atteindre la stabilité». Dix-huit mois après, constate notre interlocuteur, la situation a assez changé, puisque «l’impact des mesures annoncées n’est pas visible sur le terrain». Au contraire, poursuit cet expert, l’Algérie a perdu des points concernant le climat des affaires: «Même si la situation n’est pas encore dramatique, on ne voit  pas le résultat des mesures sur le secteur privé qui doit être l’alternative aux hydrocarbures». Les experts de l’UE s’interrogent sur les motivations du gouvernement qui a opté pour d’autres mesures, dans le cadre de la loi de finances 2018 Car, selon eux, «au lieu de continuer dans l’effort de baisse du déficit budgétaire, on remarque une expansion de ce déficit», souligne un autre expert. En 2016, le déficit budgétaire était de 13% du PIB. En 2017 il se situe entre 5 et 6. Mais il va remonter en 2018 à 9% du PIB », estime-t-il, avant d’ajouter: «On ne comprend pas très bien le choix du gouvernement algérien si ce n’est la logique électorale qui dicte cette option. Ce changement de cap n’est pas compris de l’Union européenne, sachant que cela est en totale contradiction avec les mesures lancées en 2016. Les arguments du gouvernement algérien qui compte reprendre en 2020 les mesures de consolidation pour tenir l’équilibre un an plus tard ne tiennent pas», selon notre interlocuteur, qui trouve «préoccupant que le gouvernement inverse carrément la tendance en un an». La politique risquée de la planche à billets Les préoccupations des experts européens s’expliquent également par le recours du gouvernement algérien au financement non conventionnel qualifié de «politique risquée». Les craintes de voir la planche à billets se substituer à la machine économique, -malgré les assurances des responsables algériens- sont justifiées par le risque de récidive. «Même si le recours à cette mesure implique l’amendement de la loi sur la monnaie et le crédit et bien que le gouvernement assure que c’est une mesure conjoncturelle, rien ne garantit qu’il n’y fera pas recours de nouveau  et surtout que les  montants sont significatifs (le gouvernement donne un chiffre qui avoisine les 18 milliards de dollars en 2018), soit 11% du PIB», soutient un des experts de l’UE qui se sont confiés à des journalistes. L’expert estime que le financement non conventionnel pourrait atteindre 42% du PIB sur le court terme, avec tous ses impacts sur l’inflation et les répercussions sur la compétitivité de l’économie algérienne. Appelant les autorités de notre pays à dépasser «l’aversion» pour la dette externe, «séquelle de l’expérience négative des années 90», les experts de l’UE estiment que l’endettement externe serait «un choix plus judicieux que la planche à billets». Les économistes sont peu convaincus par les arguments des responsables algériens. «Il n’y pas un lien entre perte de souveraineté et augmentation de la dette externe qui est plus maîtrisable». Les experts rappellent d’ailleurs que dans le rapport du Fonds monétaire international (FMI) de juin 2017, il est indiqué que la loi de finances 2017 prévoyait une consolidation de l’équilibre budgétaire assez forte -10% du PIB-  et conseillait une consolidation plus graduelle de l’équilibre budgétaire  et de la complémenter avec la dette. «La dette permettrait une transition graduelle et éviterait un choc qui affecterait la population. La planche à billets, elle, peut fonctionner pour une période très courte. Mais elle ne peut pas se substituer à la machine économique», conclut un analyste de l’UE.  

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