mercredi 17 juin 2015

Ghardaïa : 4 personnes brûlées par un cocktail Molotov

Malgré l’impressionnant déploiement de forces de l’ordre, la violence persiste dans divers endroits de la wilaya de Ghardaïa.
Après le très mouvementé enterrement, lundi soir, de la victime des évènements de la semaine dernière au quartier Baba Saâd à Berriane, le défunt Chanâa Ahmed, âgé de 31 ans et père de 3 enfants, qui a fini dans un déferlement de violences alors que l’oraison funèbre n’était pas encore finie, le tension n’a toujours pas baissée d’intensité, bien au contraire, d’autres foyers de violences sont signalés en divers endroits des communes de Ghardaïa et de Berriane.

Rappelons que lors de cet enterrement, des individus dissimulés sur les terrasses de quelques maisons de la cité du 5 juillet, mitoyenne du cimetière Malékite  et entièrement habitée par des Ibadites, ont lancés des pierres et des cocktails Molotov sur les citoyens malékites au moment de la récitation de la Fatiha à la mémoire du défunt. Des dizaines de grenades lacrymogènes furent tirées par les éléments des forces antiémeutes de la police qui étaient stationnées juste à côté du cimetière pour, d’une part, mettre fin à l’agression et d’autre part, empêcher les jeunes malékites qui voulaient coûte que coûte s’introduire dans ces maisons pour déloger les agresseurs, d’y parvenir.

Comme dans la marée humaine qui avait accompagnée le défunt à sa dernière demeure il y avait beaucoup de personnes âgées, nombre d’entre eux se sont sentis mal en suffocant à l’inhalation du gaz lacrymogène. Il a fallu l’intervention énergique et une interposition musclée des forces de sécurité des deux corps de la gendarmerie et de la police  pour annihiler toute volonté de contact entre les jeunes des deux communautés.

Maisons incendiées 

À 45 kms plus au sud, c’est les habitants malékites de la cité El Korti, dans la commune de Ghardaïa  qui vont vivre des affrontements avec leurs voisins Ibadites pendant près de deux jours, d’alleurs toute la nuit du mardi au mercredi et jusqu'au soir, les violences et les affrontements à coups de pierres, de bouts de boulons lancés avec des frondes et des cocktails Molotov n’ont pas cessés.

La cité est complètement encerclée et les agresseurs viennent par quatre fronts différents, à savoir Châabet Etteli, Belghenem, Ighouza et Beyn Djeblin, toutes à population Mozabite. Beaucoup de blessés sont signalés notamment parmi les forces de l’ordre, alors que l’on signale l’incendie de deux maisons, d’un commerce et d’une voiture. Même au centre ville de Ghardaïa, et à quelques encablures du foyer et du célibatorium de la police, contigu au tribunal de la ville, des individus ont réussis à s’introduire dans deux magasins, un marchand de chaussures et une papeterie, appartenant à des Mozabites, où ils ont volés quelques marchandises avant de mettre le feu à ce qui restait. Les éléments de la protection civile arrivés rapidement sur les lieux ont réussis à circonscrire les deux incendies avant qu’ils ne se propagent aux voisins.

Mais c’est à Berriane, que quatre citoyens Mozabites ont faillis laisser leurs vies lorsqu’ils ont été surpris, vers 5 heures du matin, alors qu’ils étaient dans une Toyota, sur la route nationale N1, se dirigeant vers Ghardaïa. Des jeunes malékites, embusqués sur le muret longeant la route leur ont lancés des cocktails Molotov alors que leur  véhicule  ralentissait devant un dos d’âne. Le feu a rapidement dégénéré à l’intérieur du véhicule et c’est alors que le chauffeur, par panique, a continué de rouler quelques mètres avant d’être arrêté par un mur de protection de la station d’essence.

Rapidement les policiers et les gendarmes, stationnés à proximité, leur ont portés secours en les déshabillant, avant de les évacuer vers la structure sanitaire de Berriane, à une centaine de mètre du lieu de l’embuscade. Le véhicule  a pratiquement été calciné par les flammes alors que les 4 personnes, âgées entre 35 et 60 ans, s’en sont sorties avec des brûlures du 1er degré.

A signaler qu’avant cet acte, la veille et toujours à Berriane, un véhicule  4X4 Toyota Hillux, appartenant à un malékite a été surpris vers 20 heures après le pont de l’oued Ballouh par des jeunes Mozabites qui l’ont complètement incendiés. Son propriétaire n’ a du son salut qu’en se sauvant. C’est dire que malgré l’impressionnant déploiement de forces de l’ordre la violence persiste et en divers endroits de la wilaya de Ghardaïa. Ce qui suscite beaucoup d’inquiétudes parmi la population surtout en cette veille de Ramadhan.

Triste Ramadhan

« Beaucoup de rumeurs sur une explosion de violence dans la vallée du M’zab  pendant Ramadhan  ont fait fuir des dizaines de familles vers des régions plus clémentes », déclaré Mustapha, cadre dans une banque publique,  ajoutant « j’en fais de même, je suis originaire de Mostaganem et je vais envoyer ma femme et mes enfants aujourd’hui même passer ces deux mois loin de toute violence. Mes enfants sont traumatisés, je crois d’ailleurs que je vais les inscrire dans des établissements scolaires à Mostaganem. Je ne pense pas les ramener ici, c’est trop risqué et je n’ai pas le droit de jouer avec la sécurité de ma petite famille, quitte à vivre seul encore quelques temps ici. »

Pour Azzedine, entrepreneur  Annabi installé de longue date dans la vallée du M’zab «l’inquiétude est palpable sur les visages des citoyens. Ces milliers d’hommes de police et de gendarmerie déployés, partout sur les boulevards, les axes importants et même dans toutes les rues et ruelles de la ville et des villes de Berriane et de Guerrara, ajoutent à l’angoisse de la population qui, et à juste titre, comprend que tant que ces forces sont encore là, le danger est encore là. Et c’est là que réside tout le sentiment d’inquiétude qui risque quelque part de virer à la paranoïa ».

D’habitude, à la veille de chaque Ramadhan, les maîtresses de maisons envahissent les magasins à la recherche de produits, et d’ustensiles et de vaisselles neuves, ce qui n’est pas le cas cette année. Les grands boulevards de la ville et leurs commerces sont tristement vides. Comme quoi que le cœur n’y est pas,  et il le serait à moins. 
 

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