L’hôte de l’association Ciné plus a plaidé pendant plus de deux heures, devant une forte assistance, pour la restauration de la dynamique de résistance culturelle afin de triompher des despotismes politiques, doctrinaires et idéologiques. Nous devons développer des anticorps identitaires pour se prémunir contre l’idéologie arabo-islamiste. La cité de demain, dans l’aire nord-africaine, doit se construire sur le substrat amazigh», a déclaré Saïd Sadi lors de la conférence qu’il a animée avant-hier à Timezrit. L’hôte de l’association Ciné plus a plaidé pendant plus de deux heures, devant une forte assistance, pour la restauration de la dynamique de résistance culturelle afin de triompher des despotismes politiques, doctrinaires et idéologiques. Pour s’émanciper des clivages sclérosants, des lubies et autres tâtonnements politiques sans lendemains qui polluent actuellement le champ politique et social, il est nécessaire, selon le conférencier, de réinventer cette dynamique à l’origine de grandes épopées de notre histoire récente. «C’est cette dynamique, avec ses structures et ses réseaux de solidarité ancestraux, qui a animé l’insurrection de 1871, la grève des mineurs de Timezrit, le Congrès de la Soummam et le soulèvement d’Avril 1980», précise-t-il. Un groupe de réflexion dont fait partie le conférencier est déjà à pied d’œuvre pour donner un contenu actualisé à cette dynamique et construire des espaces de débat pour la faire avancer. «C’est vrai que le système, avec ses différents segments, a des réactions foudroyantes quand il s’agit de toucher à son logiciel, mais aujourd’hui, il est suffisamment discrédité pour prétendre étouffer l’expression de la volonté citoyenne», soutient-il. Aux autres contingences qui polluent le débat d’idées, à l’exemple de la culture de la haine, de l’invective, de l’anathème en vogue ces dernières années, l’orateur oppose le respect des différences. «Il faut réintégrer la citoyenneté dans nos cités. On peut ne pas être d’accord, être différent, mais il faut savoir dégager des compromis sur l’essentiel. Il est important de distinguer l’essentiel de l’accessoire. Dans les djemâas kabyles l’intérêt général a toujours transcendé les différences individuelles», souligne-t-il. Citant en exemple Mouloud Mammeri et Kateb Yacine, Saïd déclare que malgré leur différend et leur différence, ils ont apporté chacun de son côté leur précieuse contribution au combat identitaire et démocratique. Les provocations, les pollutions, les violences et les polémiques que vit actuellement, notamment, la Kabylie participent de cette volonté à élargir les fractures et à nourrir la culture de la haine. Aussi l’orateur appelle-t-il à la vigilance. «Il est capital que la Kabylie se stabilise et qu’elle reste en totale possession de ses capacités à discuter. Car chaque fois que la Kabylie a retrouvé en partie ses capacités, c’est tout le pays qui s’en est sorti grandi», dit-il. Cherif Kheddam dans le combat identitaire Dans la foulée, il égratigne ceux qui se placent, ces derniers temps, en nouveaux hérauts du combat identitaire. «Ils ont raté le 20 Avril 1980, mais ils veulent faire, ces derniers jours, des sessions de rattrapage», lance-t-il avec une pointe d’humour. Evoquant Cherif Kheddam auquel il a consacré son dernier ouvrage, Cherif Kheddam. Abrid Iggunin. Le chemin du devoir, l’orateur affirme qu’il est, à côté de Mouloud Mammeri, l’une des deux béquilles sur lesquelles le mouvement berbère s’est appuyé. «Dans une société à tradition orale, la chanson est un élément essentiel dans la transmission des référents culturels. Tout en restant humble, Cherif Kheddam a joué un très grand rôle dans le combat identitaire. C’est un être d’exception. Par son parcours, il me rappelle Albert Camus», indique-t-il. Abordant la question de la langue amazighe, l’orateur fait comprendre qu’il est facile de la restituer, parce qu’il existe plusieurs aires berbérophones en Afrique du Nord. Exemples à l’appui, il explique que le lexique perdu dans une aire berbérophone peut encore se retrouver dans une autre aire et vice-versa. Aux linguistes et aux autres spécialistes de la question de faire ce travail de reconstitution. «Certes, il n’existe pas de langue pure. On peut toujours faire appel aux emprunts. Mais il faut éviter les pollutions linguistiques inutiles.» Tout en rendant hommage au mouvement associatif qui irrigue par ses actions le combat démocratique, Saïd Sadi insiste enfin sur la nécessité d’apprendre aux jeunes générations les meilleures méthodes de lutte, des méthodes à moindre coût, mais avec des résultats notables. Diverses autres questions ont été soulevées lors du débat qui a suivi la conférence. Il a été question notamment de la mort de Abane Ramdane, d’Amirouche et de la place de la littérature berbère dans le paysage social.
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