- Chaque année, à l’approche du mois sacré, les promesses du gouvernement en direction de la population sont lancées pour rassurer quant à la stabilité des prix durant le Ramadhan. Cependant, les résultats ne sont pas probants. Selon vous, pour quelle raison ? Le mois de Ramadhan est une période de l’année où la consommation des produits alimentaires augmente de façon significative, en Algérie mais aussi dans beaucoup de pays musulmans, ce qui, bien entendu se répercute sur le prix, avec une augmentation significative. En général, on attribue cette situation à la loi de l’offre et la demande. Il est clair que la demande est importante avant et pendant ce mois sacré. Mais par ailleurs, nous avons constaté par le passé que souvent l’offre était au rendez-vous, donc il faut trouver la ou les réponses ailleurs. Par ailleurs, pour comprendre la raison pour laquelle cette question revient chaque année, il faut comprendre comment fonctionne notre marché pour essayer de se rapprocher de la vérité de la situation. Comme vous devez le savoir, et je l’ai même soulevé très souvent lors de mes différentes interventions, notre marché n’est pas structuré et pas du tout organisé. L’Etat ne contrôle plus rien, les circuits de distribution sont sous le contrôle total du privé. Deux causes sont derrière cette situation. La première est liée aux importations de denrées alimentaires pour la période de Ramadhan, dont les négociations commencent tardivement, oubliant au passage que la majorité des pays musulmans s’approvisionnent en même temps, créant ainsi une forte demande donc une augmentation sensible des prix à l’international. La deuxième cause est à mon avis artificielle, aidée par le comportement du consommateur algérien pendant cette période, orchestrée par un petit nombre de «supergrossistes» qui contrôlent les circuits de distribution et arrivent à créer une rareté artificielle de produits dont la demande est forte avant et pendant ce mois. - Quelle serait la meilleure solution pour réellement contrer la hausse des prix ? La première solution serait de réfléchir à la mise en place d’une politique sérieuse pour organiser le commerce domestique à travers l’organisation de circuits et réseaux de distribution flexibles qui pourraient s’adapter, éventuellement, à des situations spécifiques du marché. Cette réflexion doit évidemment s’appuyer sur des données réelles émanant d’un diagnostic approfondi du secteur. Aussi, il faut savoir que le consommateur a sa part de responsabilité. Il peut agir sur le marché en modérant sa consommation, notamment la première semaine du Ramadhan, au-delà du rôle régulateur de l’Etat qui devrait être plus efficace. Par ailleurs, je me demande où en est le programme gouvernemental de construction d’un grand réseau de marchés de gros évoqué il y a une dizaind d’années. Ce programme de construction de marchés (on évoquait 50 marchés) avait pris forme pour organiser la distribution via des circuits identifiés, bien visibles, avec des aires de stockage modernes. Mais il est resté sans suite, du moins on ne voit rien venir pour l’instant. L’absence de structures de grande distribution, notamment pour les produits de large consommation, ne facilite pas les choses et est l’un des principaux problèmes du commerce en Algérie. - Croyez-vous en l’efficacité des marchés de proximité ? Moi je crois au sérieux, au travail réfléchi, pas aux solutions provisoires et au colmatage. L’organisation du marché apparaît comme une condition nécessaire pour tout projet de développement économique du pays. Cette organisation permettrait d’assurer une bonne distribution des différents produits, du producteur au consommateur en passant par des circuits et canaux de distribution bien définis et identifiés. Une bonne organisation permettrait d’assurer une meilleure couverture du marché, des statistiques réelles, un bon niveau de chiffre d’affaires, une meilleure régulation à travers un contrôle sérieux et efficace des intermédiaires. Cela permettrait aussi une meilleure prise en charge des excédents notamment en produits agricoles, évitant ainsi le gaspillage, un épisode qui revient chaque année.
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